Anse Vata : la ville maintient le cap

Sonia Lagarde a présenté la dernière mouture de l’aménagement de l’anse Vata le vendredi 25 février. La maire compte sur une communication autour du projet finalisé pour lever les oppositions qu’il suscite, alors que les travaux doivent démarrer à la mi-mars.

Le projet « a évolué depuis la présentation de septembre dernier », annonce Sonia Lagarde, vendredi 25 février, lors de la conférence de presse de présentation de la version finale de l’aménagement de l’anse Vata, même si les grandes lignes n’ont pas changé. « Parfois mal compris », il avait provoqué une polémique menée par la communauté des windsurfers rejointe par des Calédoniens et rendue publique sur la page Facebook « Touche pas à ma plage – Sauvons l’Anse-Vata », à laquelle l’exécutif veut mettre un terme. « Ce n’est pas seulement la volonté d’un maire, on s’est entourés de toutes les recommandations scientifiques, on est sur la sauvegarde du site et non pas quelque chose de capricieux. Je ne souhaite pas voir la plage et la route disparaître. »

Le principal objectif, rappelle Sonia Lagarde, est de lutter contre l’érosion. Pour ce faire, la mairie a pris attache d’un cabinet local et métropolitain. « Les deux expertises ont conclu qu’il était temps de faire quelque chose, sans quoi la plage disparaîtra en 2050. »

Les stationnements ne se trouveront plus côté mer mais côté terre.

 

Malentendu

Romain Paireau, secrétaire général, reconnaît cependant des maladresses, notamment au niveau de la communication, qui a manqué. « Il y a eu un malentendu et des incompréhensions, on s’en excuse. On pensait tenir des réunions publiques, mais avec le confinement et les règles sanitaires, cela n’a pas été possible. » Quant aux critiques – stationnement, mur de soutènement, piste cyclable – qui subsistent, Romain Paireau y répond.

« Les gens disent ‘On ne veut pas que du béton’, cela tombe bien parce que ce n’est pas l’idée, affirme le secrétaire général. Certains voudraient le stationnement côté plage, ce n’est pas la philosophie, les quatre voies de circulation non plus, il s’agit de voir la mer sans que la vue soit bouchée par les voitures » et ainsi se balader sans les gaz d’échappement à côté.

Les arbres ? Il y en aura 410 contre 230 aujourd’hui, insiste Sonia Lagarde. Et s’il n’y a pas de « vraie » piste cyclable, comme demandé par l’association Droit au vélo, une bande sera réservée aux cyclistes. La ville a par ailleurs été destinataire des quelque 250 commentaires rendus lors de l’information publique ouverte par la province Sud. « Il n’y a pas eu que du négatif, mais aussi des questions, des remarques positives et des conseils », indique Romain Paireau.

Des panneaux informatifs

Philippe Blaise, premier président de la province Sud et conseiller municipal à Nouméa, se veut rassurant. « On va restituer ce à quoi les Calédoniens sont attachés, l’herbe et les arbres. » Pour lui, les oppositions sont naturelles. « Le changement entraîne de la résistance, il y a toujours des gens qui ne sont pas contents. Il faut faire de la pédagogie et informer le public avec de meilleurs visuels qui devraient répondre aux interrogations et lever les objections. »

C’est ce que la mairie envisage de faire en disposant des panneaux informatifs sur l’esplanade de La Promenade, afin que chacun puisse prendre connaissance du contenu du projet. Philippe Blaise indique qu’il ira à la rencontre des associations afin d’en discuter. Et présenter ce qui doit donner « un sursis de plusieurs dizaines d’années » à la baie.

 

Anne-Claire Pophillat (Images © Ville de Nouméa)

 


Avec la suppression de l’actuelle zone enherbée, la plage va gagner trois mètres.

 

2,2 milliards de francs

Le total de l’intervention est estimé à 2,2 milliards de francs, dont 1,8 milliard pour l’aménagement et 400 millions pour l’installation des brise-houle. Une partie est financée par le contrat d’agglomération. La ville y contribue à hauteur de 743 millions de francs, l’État 654 millions, la province Sud 305 millions et l’Agence française de développement 10 millions.

 

Deux ans de travaux

Le coup d’envoi du chantier, qui devrait provoquer des perturbations sur le stationnement, est annoncé aux alentours du 15 mars. La pose des brise-houle est prévue à partir du deuxième trimestre 2023. La livraison est attendue au premier trimestre 2024.

 

Un phénomène érosif qui « s’accélère »

C’est ce qu’affirme Philippe Jusiak, secrétaire général adjoint à la mairie de Nouméa. Le phénomène érosif, constaté depuis des décennies, « s’accélère, et la plage n’est pas résiliente ». D’après les estimations, le trait de côte recule chaque année de 0,2 m à l’ouest et de 0,90 m à l’est, côté arroyo, la partie la plus exposée. « Et cette réalité va s’aggraver », annonce Philippe Jusiak. Sachant que les dépressions tropicales Lucas et Niran ont enlevé entre sept et dix mètres de littoral l’an dernier. Le trait de côte « n’est pas historique », il a notamment été modifié dans les années 1980 puis en 2006, avec l’installation des cocotiers et du talus enherbé. Résultat : « la plage naturelle a progressivement disparu ».

 


Confortement du trait de côte et brise-lames

La promenade, d’une dizaine de mètres de large, sera divisée en trois zones, dont une réservée aux cycles.

 

Le projet de lutte contre l’érosion s’articule autour de deux axes : la construction d’un mur de soutènement et la pose de trois brise-houle dans la baie. Cela s’accompagne de la reprise du bord de mer « au profit des modes doux et des loisirs familiaux ».

♦ Mur de soutènement

L’ouvrage de confortement du trait de côte sera posé entre la résidence La Plage (après le terrain Sofinor) et jusqu’à l’arroyo, soit un linéaire de 840 m sur les 1,1 km de long de la baie, la partie qui se trouve du côté du restaurant Le Fun restant en l’état. Son installation implique d’enlever la partie enherbée, ce qui permettra de retrouver la partie de la plage qui se trouvait en dessous et ainsi de l’agrandir de trois mètres. « Cela va lui redonner son visage naturel », indique Sonia Lagarde.

♦ Dix mètres de promenade

À la place de l’actuel trottoir de trois mètres, une promenade d’une dizaine de mètres de large divisée en trois espaces : en bord de mer, des zones engazonnées, des arbres, des farés pour les loueurs de matériel avec places de stationnement, des workout, des transats, des paillottes, des anneaux pour les planches à voile, des points d’eau, des douches et des toilettes, puis un espace pour les piétons et autres poussettes, et enfin, un dernier réservé aux cyclistes, skates et rollers. « C’est un projet inclusif qui tient compte de tous les usages, modes doux et loisirs familiaux, personne n’est oublié », insiste la maire.

♦ 340 stationnements

Les places de parking seront reportées de l’autre côté des voies pour « redonner une vue non polluée par les voitures », et resteront au nombre de 340. Les voies passent de quatre à deux, et trois ronds-points seront créés (au niveau de l’aquarium, de la route de l’Anse-Vata et de la rue Laroque).

♦ 410 arbres

L’exécutif garantit qu’un maximum de cocotiers et de banians seront sauvés (quatre l’ont déjà été après la dépression Lucas) et des arbres de mer doivent être plantés. La promenade comptera plus d’arbres qu’aujourd’hui, 410 au lieu 230.

♦ Ancienne polyclinique

Le terrain d’un hectare, cédé gratuitement par le gouvernement, accueillera un espace mémoriel dans un des bâtiments qui sera conservé pour rappeler l’histoire des Américains et celle de la polyclinique, mais aussi les boulistes, dont les terrains ont été détruits par Lucas, des farés pour les marchés artisanaux, du snacking et environ 40 places de parking.

♦ Trois brise-lames

D’une longueur de 100 m, leur rôle est de casser la force des vagues et de diminuer l’érosion de la plage. L’idée est d’en faire des récifs artificiels et d’y implanter des coraux.

 

A.-C.P.