Au CHT, quelles solutions pour les services en souffrance ?

Cardiologie, gastro-entérologie, pneumologie… Plusieurs unités subissent un manque d’effectifs. Des médecins dénoncent les conditions de travail. La commission médicale d’établissement assure travailler à améliorer l’organisation au sein de l’hôpital.

Les quatre cardiologues ont démissionné en décembre. Leur contrat prend fin en juillet. S’ils partaient tous, la coronarographie (spécialité de la cardiologie), installée sur le territoire depuis quinze ans, disparaîtrait. Or, c’est elle qui permet de traiter les infarctus. Il resterait alors l’évasan, plus coûteuse et plus longue. Ce que dénoncent les praticiens ? Le salaire, certes, « mais surtout les conditions de travail » : les congés non posés, les astreintes trop fréquentes, le statut, le manque de perspectives, le sous-effectif, l’épuisement, les moyens mis à disposition au quotidien. « Les mesures nécessaires ne sont pas prises assez vite », note l’un d’eux. Les cardiologues ont écrit au gouvernement et à la direction pour faire part de leurs revendications et de leurs inquiétudes.

Quel devenir pour la prise en charge des patients ? Thierry de Greslan, président de la CME au CHT, l’affirme : leurs demandes sont bien prises en compte. « On a, entre autres, acté la création d’une salle de rythmologie pour la fin de l’année, une meilleure rémunération pour les astreintes et on travaille au recrutement. » D’autres services vivent le même scénario. Le Médipôle peine à recruter des professionnels qui ne trouvent plus d’intérêt à venir ici, la Métropole offrant de meilleures opportunités.

Revoir le statut de praticien hospitalier

En Nouvelle-Calédonie, par exemple, le statut de praticien hospitalier ne permet pas de faire du libéral, ce qui représente une perte de salaire. « On pourrait créer un statut qui autorise à exercer dans un cabinet en ville », développe Bruno Calandreau, président de l’Ordre des médecins. Mais aussi simplifier la procédure de recrutement et faire appel à des docteurs francophones.

« On réfléchit à tout ce qu’on peut faire pour que ça change, pour redevenir attrayant, faire évoluer les modalités d’exercice et de pratique, notamment pour les gardes et les astreintes, explique Jacqueline Bernut, présidente des conseils d’administration du CHT et du CHS – qui connaît également une pénurie de psychiatres –, mais ce n’est pas simple à résoudre et la situation du Ruamm nous contraint financièrement. »

Ouvrir davantage de postes

Parmi les autres pistes, l’augmentation du nombre d’internes. « On demande une rallonge du budget pour en prendre plus. L’idée est qu’ils restent ou reviennent après leur internat. Pourquoi ne pas imaginer aussi un contrat pendant lequel le soignant ferait quatre mois au CHT puis trois dans chaque province », suggère Thierry de Greslan.

Le défi ? Faire venir, et surtout donner envie de rester. Cela nécessite de revoir le management, la qualité de vie et de travail. « Il faut augmenter le nombre de médecins, on demande six postes supplémentaires cette année. » Et accroître le nombre de paramédicaux. « On manque d’infirmiers de bloc opératoire, donc les chirurgiens n’opèrent pas autant qu’ils le voudraient. » La réflexion sur les 35 heures s’est invitée dans les discussions. Inappliquées sur le territoire, elle pourraient jouer sur « la ventilation du temps de travail ».

Parallèlement, une cellule dédiée au recrutement doit être mise en place. « On ne peut pas demander aux gens de sacrifier leur vie pour l’hôpital, mais il faut du temps pour reconstruire un service, environ deux ans. On a réussi à le faire avec l’ophtalmologie et l’ORL, entre autres, mais c’est fragile tant que le changement de l’organisation de l’hôpital n’aura pas abouti. »

 


Un hôpital « magnétique » ?

Pour Thierry de Greslan, c’est la réponse à apporter au malaise actuel. Inspiré du « magnet hospital », qui a vu le jour dans les années 1990 aux États-Unis, ce concept se base sur le développement de la bienveillance, l’autonomie, la responsabilisation et la coopération, l’objectif étant d’améliorer la qualité de vie au travail et celle des soins, mais aussi d’attirer et de fidéliser le personnel soignant. « On mène une réflexion depuis deux ans autour de cette idée. La direction est d’accord. Le but est de recentrer sur le soin. En plus, ces hôpitaux coûtent moins cher et sont plus attractifs. »

 

Anne-Claire Pophillat (© A.-C. P.)