Les Francofolies à Nouméa

Pour la première fois, le festival des Francofolies va s’installer pour trois jours à Nouméa. Du 8 au 10 septembre, une centaine d’artistes poseront leurs valises pour un grand rassemblement autour de la langue française. Pour les organisateurs, les enjeux sont multiples. Tourisme, culture et soutien de la scène locale sont quelques-unes des facettes de ce festival qui a fait des petits dans le monde entier.

Les Francofolies de La Rochelle sont une véritable institution. Créé en 1985 par Jean-Louis Foulquier et Philippe Friboulet, le festival, qui a vocation à promouvoir la langue française, a rapidement trouvé ses marques. Depuis quelques années, il attire plus de 100 000 festivaliers et génère près de 1,2 milliard de francs de retombées économiques. Depuis quelques années, l’événement, bien ancré dans le centre historique de La Rochelle, a largué les amarres et fait des petits.

« Il y a toujours eu cette envie de faire rayonner la chanson francophone autour du globe », insiste Gérard Pont, l’actuel directeur du festival des Francos. En 1989, le festival débarque à Montréal, puis en Bulgarie. « Quand ils nous ont sollicités, explique le directeur, je suis allé en Bulgarie en me disant que ce ne serait pas possible, mais nous avons eu de bons échanges. » Pour la Nouvelle-Calédonie, les choses ont plus ou moins suivi le même chemin. Plutôt sceptique lors de sa première venue, Gérard Pont assure avoir rencontré à Nouméa « des gens très motivés, sérieux et professionnels ». Mais ce qui a peut-être fait la différence, c’est le fait que les Francofolies ont « une consonance » chez les acteurs calédoniens rencontrés par le directeur du festival qui est désormais une marque internationalement reconnue.

Un projet pays touristique et culturel

Et c’est bien cela que sont allés chercher les promoteurs calédoniens du projet. L’idée d’implanter un festival tel que les Francofolies à Nouméa repose sur trois objectifs. « Le premier est de le pérenniser, explique Chris Tatéossian, un des cogérants de la toute jeune société MusiCal productions, à l’origine du partenariat. Le deuxième est de construire quelque chose autour du tourisme et le troisième est l’accompagnement et la valorisation des artistes locaux en leur offrant la possibilité d’avoir accès à un réseau international. »

Pour la partie tourisme, les organisateurs comptent sur la renommée du festival pour faire venir des gens. « En termes de visibilité, c’est une opportunité dont il faut se saisir pour rayonner de manière différente, car il s’agit avant tout d’un festival culturel », note Joël Kasarherou, un des actionnaires de la société de production. Un festival culturel et, qui plus est, francophone. Selon Joël Kasarherou, ce premier cœur de cible francophone dans la région représente environ 500 000 personnes dans le Pacifique. A titre de comparaison, le festival australien So French, So Chic attire près de 10 000 personnes sans aucune tête d’affiche.

Un partenariat avec Aircalin et NCTPS va permettre la création de packages. Ces derniers sont en cours de création et il faudra voir si leur contenu est attractif, mais ils ont tout intérêt à l’être. Selon les promoteurs, un touriste culturel représente environ 100 000 francs de dépenses par séjour. Mais il ne faut pas non plus compter sur un raz-de-marée de festivaliers étrangers, les capacités d’accueil du centre culturel Tjibaou étant limitées à 5 000 à 5 500 personnes.

Une des explications du coût relativement élevé du billet, fixé à 7 500 francs en plein tarif et 6 500 francs en tarif réduit. Un prix élevé à relativiser en comparaison des 8 000 francs que l’on peut débourser pour un concert unique à l’Arène du Sud d’un artiste venu seul. Les organisateurs des Francofolies Nouvelle-Calédonie font valoir que chaque soirée est l’occasion d’assister à cinq concerts de formations locales et de têtes d’affiche internationales. Autre particularité assez peu fréquente, les artistes sont invités en formation complète afin de proposer « des spectacles de qualité ». Pour Black M, par exemple, la délégation représente 25 personnes, ce qui a évidemment un coût non négligeable. Au total, c’est une centaine d’artistes internationaux (pour huit artistes ou groupes) qui seront présents du 8 au 10 septembre aux côtés des Calédoniens.

Et c’est le troisième et dernier objectif de l’événement que de valoriser et d’accompagner la scène locale. Six artistes ou groupes assureront les premières parties des invités. Pour donner du corps à cet objectif, le festival de Francofolies de La Rochelle a créé le Chantier des Francos, il y a 18 ans. La mission de ce dispositif est d’accompagner les artistes en début de carrière afin de les aider à améliorer leur prestation scénique et de favoriser leur insertion professionnelle.

Un accompagnement de la scène locale

Si ces chantiers sont sur sélection, d’autres initiatives locales ont été prévues pour soutenir nos artistes. En partenariat avec le Poemart, des formations professionnalisantes seront dispensées à trois groupes locaux, les 100 Fous, Nasty et Reza, ainsi que la section autochtone du Pacifique. Il s’agit d’un coaching artistique et scénique dans la logique de ce qui avait déjà été réalisé par le Poemart en 2014 et 2015, au travers du travail de la coach Juliette Solal. Sous réserve de l’obtention des financements, des master class d’écriture de chansons pourraient être proposés à une dizaine d’artistes. Les organisateurs ont également invité des programmateurs d’événements internationaux de façon à mieux exposer la scène locale. Ils viendront d’Australie, de Nouvelle-Zélande ou encore du Japon et des représentants de l’Alliance française seront présents afin de découvrir nos artistes, dans l’optique qu’ils les fassent tourner par la suite.

Cet événement et son ampleur constituent de véritables défis, mais la réussite de son organisation pourrait être extrêmement bénéfique et pas simplement aux promoteurs du festival. Comme le souligne Joël Kasarherou,« une étude métropolitaine de 2014 montrait que la culture était un des principaux contributeurs du PIB et qu’un euro d’argent public investi générait entre quatre et six euros de dépenses.» Au-delà de l’aspect économique, il y a également une question d’image, d’autant plus importante en ce moment où la Nouvelle-Calédonie se cherche une place au sein de sa région.


Une scène et un village

Fidèle à l’organisation du festival rochelais, celui des Francofolies Nouvelle-Calédonie aura une grande scène au centre culturel Tjibaou, qui sera complétée par un village. Le lieu fait toujours l’objet de négociations, mais le village, qui pourrait être gratuit si les organisateurs parviennent à boucler le financement, donnera un côté un peu plus populaire à l’événement. L’idée est de pouvoir rencontrer les artistes locaux et nationaux, de se faire dédicacer des albums, mais aussi d’assister à des showcases, des spectacles jeunes publics, des danses traditionnelles ou encore des siestes acoustiques.


Un tarif de lancement

Le pass journée est à 7 500 francs pour les adultes et 6 500 francs pour les moins de 16 ans. Le pass VIP est à 13 000 francs. Ce tarif de lancement durera deux mois (jusqu’à mi-mai), il prendra ensuite 1 000 francs et augmentera une dernière fois de 1 000 francs deux mois plus tard. Des pass pour les trois jours seront également disponibles. Les billets sont déjà à prendre sur le site www.tickets.nc.


La programmation

Le vendredi 8 septembre

Le Festival propose une scène nouvelle tendance avec Julia Paul, Boulevards des Airs, Claudio Capéo et LEJ.

Le samedi 9 septembre

La soirée sera marquée par une ambiance plus urbaine avec les 100 Fous, la section autochtone du Pacifique et Nasty et Reza, pour la scène locale, et Youssoupha et Black M, pour les artistes internationaux.

Le dimanche 10 septembre

La programmation de la dernière soirée du festival sera dans le pur esprit des Francofolies avec la mise en avant des échanges avec les groupes locaux, Celenod et Edou, et la présence de piliers de la chanson française tels que Miossec, Cali et Hubert-Félix Thiéfaine.


Les têtes à l’affiche !

Boulevard des Airs

Inspiré par la chanson française classique autant que par le rock alternatif contemporain, le collectif Boulevard des Airs fusionne rock, reggae, jazz, ska, musiques latine et balkanique. BDA a participé à de nombreuses tournées avec des groupes comme Les Ogres de Barback, Babylon Circus ou Les Hurlements d’Léo, avant de signer chez Sony son premier album Paris-Buenos Aires, disque d’or en 2011. Boulevard des Airs a aussi été nominé aux Victoires de la Musique, en 2013. Son troisième opus, intitulé Bruxelles, est déjà Disque de platine et sa tournée actuelle est un immense succès partout en France et dans le monde.

Claudio Capéo

En 2017, le single Un Homme debout de Claudio Capéo comptabilise 60 millions de vues sur YouTube et ferait presque oublier que ce jeune chanteur-accordéoniste s’était déjà fait remarquer lors de l’émission The Voice, en 2016. On l’a alors beaucoup comparé à un « Zaz au masculin ». Mais, lui, se considère simplement comme un artiste de « chansons françaises urbaines » et de « chansons de rue ».
Il puise ses influences dans les grands classiques français, mais aussi dans le rock métal, qui lui donne la réputation de toujours « envoyer du gros son » sur scène.

 

LEJ

Lucie, Elisa et Juliette, les filles de LEJ, seront sûrement à leur aise en Nouvelle-Calédonie, puisqu’elles aiment jouer pieds nus et sous un soleil de décor paradisiaque.
À elles trois, elles forment le groupe LEJ, célèbre pour ses mash-up et medleys de tubes du moment, interprétés a cappella sur une beat box et du violoncelle, que l’on retrouve dans leur premier opus En attendant l’album… Elles viennent de recevoir le prestigieux prix Révélation scène des Victoires de la musique 2017. Leur deuxième album, prévu pour cette année, privilégiera les compositions originales en français et donnera l’occasion au public des Francofolies de découvrir, également, leur talent d’auteurs-compositeurs sur ce qui s’annonce une scène exceptionnelle.

Youssoupha

Youssoupha, riche de sa double culture africaine et européenne, bouleverse le rap français par son humanité, son verbe et sa liberté de parole.
Qualifié de « rappeur politique et conscient », il s’inspire de son enfance en République démocratique du Congo, de son passé difficile en banlieue parisienne et de ses brillantes études littéraires. Dans son dernier album, il continue à interroger la négritude et approfondit toujours plus son engagement pour la non-violence.
Il a collaboré avec Diam’s, Kool Shen, Oxmo Puccino, Kery James… et a assuré les premières parties de 50 Cent, Snoop Dogg ou encore Busta Rhymes.

 

Black M

D’origine guinéenne et membre du collectif rap Sexion d’Assaut depuis 2004, Alpha Diallo, alias Black M ou Black Mesrimes, s’est distingué par son « côté fou », qu’il cultive avec de nombreux gimmicks, des textes ponctués d’onomatopées, du verlan alambiqué et ses célèbres « gros yeux ». Son premier album solo intitulé Les Yeux plus gros que le monde a été sacré Disque de diamant.
En 2016, à l’occasion de la sortie de son dernier opus, Éternel Insatisfait, Black M diffuse une web série intitulée Direction Éternel insatisfait où sont dévoilés des titres qui ne sont pas dans l’album. Sur scène, il se glisse dans la peau de différents personnages, dans une ambiance totalement cartoonesque.
Fort de son engagement humaniste, en 2016, il rejoint la troupe des Enfoirés et les Restos du cœur.

Miossec

De la personnalité tourmentée de Christophe Miossec, dit Miossec, découlent des textes acerbes et des prestations aussi généreuses qu’imprévisibles.
Ses créations poético-rebelles sont souvent provocatrices, notamment ses textes sur l’amour, écrits avec des mots crus et bouleversants. Il a composé certains des tubes de Johnny Hallyday, Cali, Nolwenn Leroy et de son grand ami Yann Tiersen.
Le concert qu’il donnera au Francofolies promet d’emporter le public dans un flot de tangos intrépides, de folk fougueux et de valses tziganes.

Cali

Cali est un auteur-compositeur-interprète aussi engagé que sentimental.
Sa patte est reconnaissable dans le contraste entre l’orchestration impeccable de ses musiciens et sa voix grave débitant des textes aux rythmes asymétriques et boitillants. Il s’est imposé comme une « bête de scène », qui s’engage corps et âme face à son public. Bains de foule, litres de transpiration et « bis » jusqu’à extinction de voix ne l’effraient pas. Le chanteur a sorti en 2016 un nouvel opus intitulé Les Choses défendues, introduit par le single I Want You. Écrit dans l’urgence, cet album a été produit par Edith Fambuena (Alain Bashung, Jacques Higelin, Zazie…).

 

Hubert-Félix Thiéfaine

H.F. Thiéfaine… On ne le présente plus…
Après 40 ans de carrière, le rockeur-poète ne semble pas prêt à prendre sa retraite. Figure incontournable de ce festival, sa dernière tournée s’est achevée en novembre 2016, au Zénith de Paris, et déjà en ce début d’année, il était annoncé dans plusieurs prestigieux festivals.
H.F. Thiéfaine ne fonce pas dans le public. Il ne le fait pas danser. Il l’empoigne. Il l’envoûte !