« Un Comité très positif »

Si la matinée du 19e Comité des signataires a été consacrée aux questions économiques, comme prévu, c’est ensuite sur la date et les conditions d’organisation du deuxième référendum que les participants se sont principalement attardés des heures durant. Chacun aura mis de l’eau dans son vin pour finalement aboutir à un accord. Sonia Backes, cheffe de file de l’Avenir en confiance, est rentrée la première en Nouvelle-Calédonie. L’occasion de lui demander ses réactions.

DNC : Sonia Backes, que retenez-vous de ce 19e Comité des signataires ? Était-il important, déterminant ?

Sonia Backes : Vous savez, nous étions très inquiets avant que les discussions ne commencent, compte tenu des enjeux et des positions des indépendantistes et de Calédonie ensemble. Ce Comité était important dans la mesure où il fallait que l’on arrive à fixer un calendrier de sortie de l’Accord de Nouméa. C’est au final ce que nous avons fait et dans le sens que nous avions voulu à l’Avenir en confiance, puisque la date du deuxième référendum, initialement prévue en novembre 2020, a été avancée. Nous avons aussi obtenu des garanties sur une possible sortie de l’Accord de Nouméa avant la fin de la mandature nationale, des conditions pour le deuxième référendum qui soient sensiblement les mêmes que pour le premier et enfin, un véritablement engagement financier de l’État d’accompagner la relance économique.

Sur la question référendum, pourquoi était-ce si important pour l’Avenir en confiance d’avancer la date ?

Les forces politiques présentes lors de ce Comité sont parties avec des positions très divergentes. Les indépendantistes et Calédonie ensemble voulaient absolument que le référendum soit le plus tard possible, en novembre, pour exclure la possibilité d’avoir un troisième référendum avant l’élection présidentielle. C’était, pour nous, impensable. Il a donc fallu beaucoup discuter pour finalement obtenir gain de cause. La date, comme nous le voulions, a finalement été avancée, au 30 août ou au 6 septembre, de manière à ce que la possibilité d’un troisième référendum puisse se dérouler soit avant, soit juste après la campagne de la présidentielle. Les Calédoniens savent donc aujourd’hui qu’en 2021 ou en 2022, au plus tard, l’Accord de Nouméa sera terminé.

Au final, c’est donc la date du troisième référendum, par incidence, qui est essentielle ?

C’est capital, notamment pour la question du corps électoral. Car une fois l’Accord de Nouméa terminé, nous pouvons imaginer que les 43 000 personnes exclues aujourd’hui des scrutins, dont un tiers est né en Nouvelle-Calédonie, pourront voter aux provinciales de 2024. Donc, le fait d’avoir une date de fin de l’Accord de Nouméa était plus qu’essentiel pour nous.

Et puis pour ce troisième référendum, dès l’instant où on aura déjà posé deux fois la même question aux Calédoniens, avec le même corps électoral, on saura ce qu’ils veulent vraiment pour leur avenir. C’est en ce sens qu’à l’Avenir en confiance, nous souhaitons qu’au lendemain des résultats du deuxième référendum, nous puissions lancer des discussions pour transformer le troisième et dernier référendum binaire de l’Accord de Nouméa par un référendum qui permette aux Calédoniens de se projeter dans un nouveau statut.

Autre point important de ce 19e Comité des signataires, la question des modalités sur le corps électoral, avec notamment l’inscription des natifs qui justifient de trois ans de résidence. Êtes-vous vous satisfaite de la proposition de l’État ?

Je veux avant tour rappeler que tous les gens qui ont été inscrits pour le premier référendum sont toujours inscrits et pourront voter pour le deuxième. C’est important de le souligner. Les discussions ont donc porté sur les personnes qui, principalement, sont devenues majeures entre le premier et le deuxième référendum et de savoir si elles étaient inscrites automatiquement ou pas. De notre côté, on considère qu’il ne doit pas y avoir de différence dans les modalités d’inscription sur la liste référendaire entre Kanak et non-Kanak, entre personnes de statut coutumier et de droit commun. C’est en ce sens que nous avons demandé une modification de la loi organique pour que tout le monde soit inscrit automatiquement. Les indépendantistes et Calédonie ensemble ne voulaient pas. Au final, l’État, sans modifier la loi organique, s’est engagé à contacter et accompagner les natifs jusqu’à leur inscription effective. Un dispositif qui doit produire les mêmes effets que l’inscription automatique.


L’avis des autres forces politiques

Si les autres participants sont pour la grande majorité toujours en Métropole, voici les réactions recueillies, à Paris, par nos confrères de la presse locale et nationale.

Le FLNKS :

Victor Tutugoro : « Sur la date, nous aurions préféré novembre, mais un compromis a pu être trouvé sur le mois de septembre. Ce qu’il faut retenir, c’est qu’il faut discuter, il faut aller l’un vers l’autre, il faut savoir faire les compromis pour qu’on puisse continuer à avancer et qu’on puisse continuer à construire. Nous avons pu arriver à un accord, ce qui finalement est de bon augure pour la suite. »

 Roch Wamytan : « Sur la question des listes électorales, nous ne voulions pas bouger, pas changer la loi organique. Le Premier ministre a dit, est-ce qu’il faut modifier la loi organique pour l’inscription de 2 500 jeunes majeurs ? Non, on ne bouge pas la loi organique, mais on actualise la liste électorale spéciale. Donc il est venu quelque part dans notre sens. »

Calédonie ensemble 

 Philippe Michel : « Le bilan est plutôt mitigé. Nous souhaitions éviter à tout prix que la date du troisième référendum ne puisse percuter le calendrier de l’élection présidentielle avec les risques d’instrumentalisation politique inévitables qui en découlent. Donc sur ce point, on est très satisfait. À côté de cela, un motif d’insatisfaction ou de regret, on aurait souhaité que pour le deuxième référendum le consensus politique sur lequel nous étions parvenus pour garantir l’inscription d’office dans des conditions équivalentes pour les Calédoniens d’origine kanak et non kanak, ne soit pas reconduit. Cela même si l’État nous assure qu’il va, par une démarche d’identification et de relance auprès de chaque électeur concerné, l’inciter à s’inscrire. C’est discriminant, cela ne nous convient pas. »


La position de l’État évoquée par le Premier ministre, Édouard Philippe

Sur la date : « Je propose, je proposerai que ce référendum, cette consultation se tienne le 30 août ou le 6 septembre 2020. La date sera fixée précisément dans les 15 jours prochains, après une instruction complémentaire par les ministères de l’Intérieur et de la Justice, afin que nous soyons en mesure de garantir la mobilisation des moyens équivalents à ceux qui ont été utilisés à l’occasion du scrutin de novembre dernier. »

Sur la liste électorale : « Nous pourrons actualiser la liste électorale spéciale pour la consultation, en particulier pour les jeunes majeurs, mais aussi pour les autres catégories d’électeurs. Il s’agit notamment des électeurs qui sont nés en Nouvelle-Calédonie et qui y résident depuis plus de trois ans. Ils seront informés par l’État de leurs droits. Notre volonté collective est que tous ces électeurs soient identifiés, contactés personnellement, afin d’être inscrits comme la loi organique leur en reconnaît le droit. »

Sur la date du troisième référendum : « Nous avons exclu que cette troisième consultation puisse être organisée entre le milieu du mois de septembre 2021 et la fin du mois d’août 2022. Il nous est en effet collectivement apparu qu’il était préférable de bien distinguer les échéances électorales nationales et celles propres à l’avenir de la Nouvelle-­Calédonie. »