Un nouveau paysage politique, côté loyaliste

Le renouvellement du bureau du Congrès n’a pas fait vaciller le perchoir de l’assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie : Thierry Santa retrouve son fauteuil. Mais le paysage politique de l’hémicycle a quelque peu été rafraîchi, avec plus que deux groupes, côté loyaliste : « Calédonie ensemble, Rassemblement, Mouvement populaire calédonien, Les Républicains » présidé par Philippe Michel d’un côté ; et de l’autre « Les Républicains calédoniens », présidé par Sonia Backes. Simplification de l’échiquier ? Peut-être. Mais pour les textes à venir, les majorités ne seront pas simples à trouver…

Logique de plateformiste. – En annonçant « un regroupement historique des loyalistes, le plus important depuis la signature des Accords », Philippe Michel affirme « être dans le prolongement logique de la plateforme, signée le 15 juin dernier », soit à la veille du second tour des législatives. Par commodité de langage, Philippe Michel parle d’un « intergroupe ». Mais les institutions calédoniennes ne connaissent pas ce terme et c’est donc bien un groupe politique qu’il s’apprête à présider. Un groupe où se dilueront les voix les plus faibles ?

L’absorption en marche. – Moult fois rêvée par Philippe Gomès, la « fusion-absorption » du Rassemblement et du MPC par Calédonie ensemble serait-elle en marche ? « Vous allez voir ce que c’est d’avoir un chef maintenant ! », ironise déjà un jeune élu du parti gomésien à l’adresse de pontes du Rassemblement. Lesquels répliquent à mots couverts : « Vous verrez, c’est plutôt Calédonie ensemble qui va changer… ». À ce stade, tous les espoirs sont encore permis.

Pichenette à Germain. – À son habitude, Philippe Michel reste plus lucide : « Il fallait d’abord garantir la stabilité des institutions ! » Mais qui la menaçait ? Ensuite « nos divergences existent et il faudra, sur chaque texte, trouver ensemble des points d’équilibre pour faire évoluer la politique économique actuelle et rendre la confiance aux investisseurs ». Discrète petite pierre dans le jardin du gouvernement Germain. Mais bien placée.

Groupe sans majorité. – Reste qu’avec 23 élus sur 54 boulevard Vauban et donc, a priori, cinq membres du gouvernement sur 11, les plateformistes de l’intergroupe ne sont majoritaires ni au Congrès, ni à l’exécutif. Jusque- là, le gouvernement Germain s’était appuyé sur les voix de Calédonie ensemble, de l’Uni-Palika, parfois aussi sur celles de l’Union calédonienne. Mais après les récentes déclarations de Louis Mapou, Daniel Goa, Charles Washétine et Paul Néaoutyine sur « le mépris et la condescendance » que leur « témoignait Philippe Gomès », il ne faudra plus compter sur le vote systématique des indépendantistes. Qui « apprécieront les textes au coup par coup ».

Surdité assumée. – Raison de plus pour ne pas être sourd aux appels à « l’union sacrée » lancés par Sonia Backes et les siens la semaine dernière ? « Rien entendu ! », raillent avec une mauvaise foi assumée Gil Brial et Philippe Michel. « Nous ne pouvons que constater une attitude de mépris et d’arrogance, rétorque Sonia Backes, nous n’attendions aucune contrepartie au dialogue entre loyalistes, si ce n’est de pouvoir représenter légitimement nos 40 % d’électeurs loyalistes aux discussions d’avenir. Nous prenons donc acte du refus de discuter de la situation de notre économie et des finances locales, qui est catastrophique et qui appelle une remise à plat urgente ».

« Les Républicains calédoniens ». – Conséquence : la deuxième force loyaliste de Calédonie s’est regroupée sous la bannière « Les Républicains calédoniens », du nom du groupe politique constitué mardi au Congrès. Un groupe de six élus, composé de Nicole Andréa-Song, Isabelle Lafleur, Philippe Blaise et Harold Martin ; Sonia Backes en assurera la présidence et Grégoire Bernut la vice-présidence. Résolument et sans conteste pour la Calédonie dans la République : ils viennent de le prouver, en votant, dès le deuxième tour de scrutin, pour Thierry Santa à la présidence du Congrès, après avoir présenté Grégoire Bernut au premier. Les Républicains calédoniens représenteront, au sein de l’assemblée du boulevard Vauban, une opposition de droite clairement affichée, notamment sur les textes économiques.

Statu quo indépendantiste. – Côté indépendantiste, pas de changement en revanche : le groupe UC-FLNKS et nationalistes (15 élus) reste prédominant sur celui de l’Uni (9 élus). Au total et avec Basile Citré (qui siège en non-inscrit), le rapport de force reste inchangé : 25 voix indépendantistes contre 29 voix non- indépendantistes dans l’hémicycle.

M.Sp.


Crash budgétaire annoncé 

Parmi les dossiers qui fâchent Les Républicains calédoniens : l’autosatisfaction du gouvernement Germain sur le « rétablissement des comptes publics ». Or, explique Grégoire Bernut, « le compte administratif 2016 transmis aux élus du Congrès montre que nos recettes fiscales sont en chute libre : les recettes des impôts directs sont passées de 69,7 Mds de francs en 2015 à 65 Mds de francs en 2016, soit une chute de 6,67 % ; les recettes des impôts indirects sont passées de 120,7 Mds à 116,2 Mds, soit une chute de 3,69 %. Et, au global, le trou d’air de nos recettes fiscales entre 2015 et 2016 est de 6,7 Mds ». En clair et pour la première fois, « le cumul de tous les budgets, propre, de répartition et de reversement, est dans le rouge », s’alarme le vice-président des Républicains calédoniens, qui prévient : « le crash budgétaire n’est pas loin ! Et l’on ne pourra pas éternellement piller les réserves financières de l’OPT, ponctionné de 4 milliards cette année, pour équilibrer artificiellement les comptes publics ».