TGC : le nouvel avis de l’Autorité de la concurrence

La TGC a-t-elle vraiment vocation à s’appliquer un jour ? On peut se poser la question à voir les innombrables modifications apportées aux textes successifs visant à encadrer sa mise en œuvre. Cette mesure, au cœur de la grande réforme fiscale obtenue par l’intersyndicale contre la vie chère, n’en finit plus d’opposer les formations politiques et les partenaires sociaux. Certains évoquent même une volonté délibérée de faire capoter, ou du moins reporter, ce projet à la limite du suicide politique à quelques mois des prochaines élections provinciales qui détermineront les futurs équilibres au Congrès pour les cinq prochaines années. Suicide politique dans le sens où la baisse annoncée des prix à la consommation de l’ordre de 10 % pourrait demeurer un vœu pieu.

C’est du moins ce que l’on pouvait en conclure à la lecture du premier rapport de l’Autorité de la concurrence sur le projet de loi encadrant les prix ou les marges rendu le 17 mai 2018. L’Autorité alertait sur le fait que le projet de réglementation présentait un risque inflationniste estimé entre 0,3 % et 5 %. Le gouvernement a donc revu en partie sa copie. Sur le fond, le nouveau projet ne suit toutefois pas la recommandation de l’Autorité qui estimait plus efficace et moins « attentatoire à la liberté d’entreprendre » un système de suivi des prix avec forte amende en cas de dérapage plutôt qu’un encadrement des marges et des prix sur 18 mois. L’Autorité recommande fortement au gouvernement de mettre en place un dispositif d’information auprès des entreprises et des consommateurs afin de mieux appréhender cette réforme et la formation des prix.

Ne pas chercher à tout contrôler

Le gouvernement entend donc maintenir le plafonnement des marges des entreprises au même niveau que celui précédant la réforme dans les secteurs de l’alimentaire, des fruits et légumes, de l’hygiène, de l’entretien, des pièces automobiles et des matériaux de construction. Comme elle l’avait déjà estimé dans son précédent rapport, l’Autorité de la concurrence juge le contrôle d’un tel système difficilement réalisable car coûteux et complexe. Pour maintenir ce système, le gouvernement s’appuie sur l’avis du Conseil d’État du 22 mai qui explique que le gouvernement peut porter « cette restriction notable à la liberté d’entreprendre » puisqu’elle découle d’un accord conclu par le gouvernement avec les organisations professionnelles. Si cet avis fait référence à l’accord sur l’agenda partagé, celui-ci a sérieusement du plomb dans l’aile.

Concernant les secteurs, l’Autorité estime que le gouvernement voit trop large et devrait se concentrer sur les secteurs pas ou peu concurrentiels. Sur la question des fruits et légumes, par exemple, l’Autorité rappelle l’avis qu’elle a rendu le 23 juillet et les 10 recommandations qui étaient assorties et appelle le gouvernement à rétablir la liberté des prix pour les produits importés, surgelés, congelés ou en conserve et ceux non soumis à protection de marché. Elle recommande également de ne pas réglementer les prix des verres optiques pour lesquels une concurrence existe, de la même façon que pour le plaques minéralogiques. De manière assez tonnante et alors que les professionnels donnent eux- mêmes un montant moyen de 3 100 francs pour le changement des deux plaques, le gouvernement a choisi de fixer une fourchette de prix comprise entre 5 000 et 7 000 francs. L’Autorité recommande, en revanche, de rétablir un contrôle des prix sur le papier hygiénique dont l’approvisionnent est désormais assuré par un seul opérateur en position de monopole qui dispose de nombreuses protections de marché.

Sur le contrôle, le nouveau projet a fait évoluer les sanctions et introduit une procédure de sanction administrative avec une amende d’un montant maximum de 1,75 million de francs. Le gouvernement prévoit également de présenter un bilan des effets de la réglementation devant le Congrès à mi-parcours ainsi qu’au bout des 18 mois. Le bilan d’étape pourrait permettre d’adapter le dispositif. De manière plus générale, l’Autorité regrette le manque de précisions de certains points des textes qui représente une source d’incertitude pour le monde économique. Il est recommandé de mettre en place un dispositif d’information, tant pour les entreprises que les consommateurs afin qu’ils puissent appréhender au mieux les complexités de cette réforme et de la formation des prix.

M.D.