MKM condamné pour avoir défriché illégalement

Après trois ans de procédure, la société MKM a finalement été condamnée à verser six millions de francs en réparation du préjudice et deux millions de francs au collectif Ensemble pour la planète. À compter de 2012, le mineur a défriché sans autorisation un morceau de forêt humide patrimoniale.

Comme beaucoup d’autres dans le secteur des carrières et de la mine, l’histoire est tristement familière. En 2010, la société Maï Kouaoua Mines dépose une demande d’autorisation de défrichement en vue de démarrer l’exploitation de la mine Ada, au Mont-Dore. La province Sud lui accorde l’année suivante. Une autorisation que remet en question le mineur qui en demande la modi cation. En 2012, une visite sur site des services de la province permet de constater que les employés de la société MKM procèdent à des défrichements illégaux. Une mise en demeure est alors adressée à la société pour cesser immédiatement ces infractions sur un domaine patrimonial.

En 2014, une nouvelle mise en demeure de l’institution enjoint MKM à remettre le site en état. Face à l’impasse de la situation, le collectif d’associations EPLP décide d’attaquer MKM en justice pour avoir détruit sans autorisation 600 mètres carrés de forêt littorale en baie N’Go, écosystème reconnu d’intérêt patrimonial. Les recours en justice font bouger l’industriel qui procède à quelques travaux de réhabilitation sans commune mesure, toutefois, avec le préjudice causé.

Des dégâts sur une forêt patrimoniale

Le jugement, daté du 8 janvier 2018, donne quelques éléments qui pourraient faire rire s’il ne s’agissait pas d’un morceau de forêt humide qui se fait de plus en plus rare. La société MKM explique, non sans une certaine mauvaise foi, qu’une seconde piste – non autorisée – a été ouverte par la sortie de route d’un engin. Pour sa défense, le mineur a également fait appel au bureau d’études EMR. Le rapport produit est tout ce qu’il y a de plus complaisant si ce n’est mensonger. EMR parle d’un simple débroussaillage, alors que les agents de la province eux-mêmes ont constaté un véritable défrichement et de conclure « qu’il est possible de dire que l’intensité à l’impact n’a pas modifié de manière effective la qualité de la composante du milieu et que les e ets ne sont absolument pas irréversibles au regard de la régénérescence naturelle ».

Condamné à verser 8,5 millions de francs

Le juge a finalement condamné la société MKM à 8,5 millions de francs : six pour l’indemnisation du préjudice écologique, deux pour l’indemnisation de l’association et 500 000 francs pour la prise en charge des frais de justice.

Cette histoire met en lumière plusieurs dysfonctionnements dans le système actuel. Tout d’abord, l’absence de barème permettant à la justice d’évaluer le préjudice en fonction des dégradations et des milieux abîmés. Ce barème pourrait être particulièrement utile dans l’établissement des compensations pour les travaux miniers. Il montre également le sentiment d’impunité qui peut parfois prévaloir dans le monde minier. Mais la société MKM est plutôt exemplaire en la matière. Ses méthodes ont fait sa réputation et ce défrichement laisse craindre le pire quant à l’exploitation de ses mines dans le sud. EPLP redoute notamment que la mauvaise gestion des eaux ait un impact significatif sur la baie N’Go où viennent charger les minéraliers. Plus inquiétant enfin, si les agents de la province Sud ont effectué tous les relevés nécessaires, un courrier de la Direction de l’environnement expliquait que « la cicatrisation naturelle pourrait se faire par la plantation et la réhabilitation du milieu ». Une phrase qui laisse perplexe quand on sait que les opérations de revégétalisation présentent des résultats assez mitigés et que le nombre d’espèces susceptibles d’être replantées est très limité, ce qui n’était pas le cas de cette forêt humide patrimoniale. Le sentiment d’impunité pourrait donc être lié à une certaine forme de complaisance de responsables de l’administration.

M.D