Les gels antibactériens à nouveau dans le viseur

Une récente note d’information du Médipôle à usage interne évoquait la question de l’utilisation des gels antibactériens. Alors sont-ils vraiment dangereux pour notre santé ?

La semaine dernière, une note interne informait les agents du Médipôle de Koutio sur l’utilisation des gels antibactériens. Ce document fait référence à une récente tribune de la revue scientifique Environnemental Health Perspectives dans laquelle près de 200 chercheurs et professionnels de santé de 29 pays ont à nouveau appelé à la prudence.
La note a été lue par bon nombre de personnes avec l’effet escompté, jusqu’en dehors de l’hôpital : faire passer le message que deux nouveaux perturbateurs endocriniens contenus dans ces gels ont des incidences très néfastes.

Le service en charge des produits de santé de la Dass*, qui assure la mise en œuvre et la coordination des systèmes de vigilance et d’alerte, indique : « Les chercheurs de cette importante étude font état de deux nouveaux perturbateurs, le triclosan et le tricocarban, qui, contenus dans certains gels antibactériens, ont des effets négatifs. Utilisés de façon répétée, ils créeraient une résistance aux antibiotiques et auraient une incidence sur le cancer du sein ou endommageraient les spermatozoïdes. »

Ces gels sont dangereux

Cette dernière étude enfonce le clou sur la dangerosité ou non des gels antibactériens. Pratiques à transporter, faciles à utiliser, ont-ils des effets nocifs sur la santé ? Selon cette tribune, intitulée Florence Statement, les deux composés mis en avant sont « inutiles et dangereux ».

Mais outre leurs effets antiseptiques, discutés aujourd’hui, car ils pourraient participer à l’augmentation de la résistance de certaines bactéries, en 2013 l’étude des chercheurs de l’université du Missouri qui avait fait grand bruit, que ces désinfectants participaient à l’absorption par la peau du bisphénol A, reconnu comme perturbateur endocrinien, lui aussi. Aujourd’hui, les chercheurs confirment également que la présence de triclocarban et surtout de triclosan peut les amener à persister dans l’environnement en tant que source de composés toxiques et cancérigènes. De plus, ils pourraient augmenter la sensibilité aux allergènes.

Pour la Dass, « ces gels, qu’ils soient à usage professionnel ou privé, comportent des risques. Ils font l’objet d’une vaste étude de la part des veilles sanitaires européennes. Mais tant que des conclusions n’ont pas abouti et tant que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé ne les interdit pas, nous ne pouvons que préconiser de ne pas les utiliser. » Les États-Unis ont tout simplement interdit la vente de ces gels antibactériens depuis septembre 2016.

Le triclosan dans d’autres produits

La présence du triclosan pose effectivement question. S’il est dangereux pour notre santé, le serait-il dans d’autres produits ? Car aujourd’hui, il est également ajouté par les industriels pour ses propriétés antiseptiques dans des savons, des dentifrices, dans certains déodorants, les cosmétiques ou encore dans la fabrication des sacs-poubelle et des tapis.

Des études pour répondre à sa dangerosité sont depuis quelques années menées par des équipes de chercheurs et des mesures ont déjà été prises. Depuis 2014, il est interdit dans tous les produits de rasage. Il reste cependant autorisé en quantité maximale de 0,3 % dans les produits cosmétiques et de 0,2 % dans les bains de bouche.

En attendant, les professionnels de santé recommandent d’éviter une exposition trop importante à cette substance sauf sur prescription (exemple : un dentifrice indiqué par un dentiste pour traiter une maladie des gencives). Les autorités sanitaires demandent que les industriels étiquettent les produits contenant du triclosan, du triclocarban et autres antimicrobiens afin de renseigner au mieux le consommateur.


Le Triclosan

Aussi appelé 5-clhoro-2- (2,4-dichlorophénoxy) phénol, c’est un biocide (pesticide organique de synthèse) proche du chlorophénol, un composé que l’on trouve dans de très puissants désinfectants industriels comme le Cresyl. Il est largement utilisé, depuis les années 1970, et massivement dans des centaines de produits courants (dont des produits de soin), depuis le début des années 1990. Reconnu pour être un perturbateur endocrinien et parce que son efficacité peut être inhibée face à des microbes qui lui sont devenus résistants, ce produit préoccupe depuis des années les toxicologues et spécialistes de santé publique.

C.Sch