Centre Culturel Tjibaou : Une année sous le signe de la révolution

La direction a promis une année riche en événements, placée sous le signe de la révolution. Le premier spectacle ne l’aura pas fait mentir. Portrait au vitriol de la société et plaidoyer pour le vivre-ensemble, le concert de la section autochtone aura fait vibrer les murs d’une salle Sisia pleine à craquer.

En-Ga-Gée ! L’année culturelle proposée par le centre culturel Tjibaou promet d’être riche en émotion. Pour Emmanuel Tjibaou, le directeur de l’Agence de développement de la culture kanak, elle traduit une certaine idée de la révolution. Pas celle, toutefois, de la mise à bas de toutes les références. « Nous allons bientôt devoir nous prononcer sur notre avenir, mais avant de partager cet avenir, il faut déjà partager le présent. Dans nos assiettes, dans nos vêtements, nos façons de parler, dans tout ce que l’on a à partager… C’est le sens du mot révolution que nous avons employé. C’est ça le projet du centre culturel Tjibaou », insiste Emmanuel Tjibaou.

L’idée est donc relativement simple et reflète la mission fixée lors de la création de l’ADCK en 1988, lors des accords de Matignon-Oudinot, et consiste à produire et valoriser les références de la culture kanak. Pour le directeur de l’ADCK, elle doit être au cœur même de ce qui fait l’histoire de la Nouvelle-Calédonie et constituer la base de l’émancipation sur le plan culturel. « Cela nous oblige à faire le deuil de la société coloniale, mais aussi de la société traditionnelle qui nous enferme dans des niches et nous empêche de nous projeter. Nous tous témoignons que notre pays est riche et heureux ! Il faut que l’on se nourrisse les uns des autres et ne pas avoir peur des langues et de connaître la culture des autres. Nous témoignons que notre pays est riche et heureux. Nous sommes fiers de vivre ensemble », plaide encore Emmanuel Tjibaou.

Une alternative aux propositions dominantes

L’exposition photographique, Les bâtisseurs de Futuna, de Théo Rouby est un appel dans ce sens de l’ouverture. Une invitation à mieux connaître une des cultures qui peuplent la Nouvelle-Calédonie. Le photographe nous livre un travail réalisé à Futuna sur ces derniers bâtisseurs de cathédrales. Loin des cartes postales, les images proposées par Théo Rouby sont autant de questionnements sur l’identité, le rapport à la terre et ce qui permet de faire société. Ce n’est donc pas par hasard que cette exposition ait été choisie pour ouvrir la saison culturelle 2017 duCCT.

« Le centre n’est pas un théâtre, pas une salle de concert, un lieu d’exposition, ni une école ou une salle de congrès et encore moins la tour Eiffel de Nouvelle-Calédonie, précise Guillaume Soulard, le directeur du centre. C’est avant tout un projet de développement culturel et nous avons la chance d’avoir tous les outils que j’ai cités pour le mener à bien. Notre volonté est de proposer une alternative aux propositions dominantes qui font le fast-food de la culture ». Ce qui n’empêche pas le CCT d’essayer de coller au plus près des questionnements du pays, que ce soit sur des problématiques aussi variées que l’environnement, l’économie, la politique, la démocratie ou le vivre-ensemble.

Cet engagement pour la culture s’est exprimé au travers des micros de la section autochtone du Pacifique dont le spectacle, Le Cri de la terre, a été présenté dans une salle Sisia archicomble. La dizaine d’artistes du collectif ont offert des slams poétiques, mais sans concessions sur une société calédonienne qui se cherche. Le spectacle dénonce en particulier des politiques libérales délétères et génératrices d’inégalités, le racisme, la corruption tout en mettant en avant l’importance de l’éducation et de la compréhension entre les cultures. Ceux qui n’ont pas pu y assister peuvent voir ce spectacle sur la chaîne YouTube du groupe.

Le programme de la saison est par ailleurs fait pour toucher l’ensemble des Calédoniens et sera l’occasion de renforcer la présence du centre sur l’ensemble du territoire. En chiffres, cela donne 15 films, 12 spectacles, 10 conférences, 8 expositions dans les murs du CCT et 8 autres hors des murs. Le centre sera présent à Maré, Lifou, Ouvéa, Koné, La Foa, Koumac, Poindimié, Kaala Gomen ainsi qu’à l’Université. S’il soutient les artistes locaux, le CCT vient aussi en aide aux artistes internationaux. En plus des vingt artistes calédoniens originaires des trois provinces, le centre accueillera des artistes de Niué, Tonga, du Vanuatu et d’Afrique du Sud.

M.D. 

©M.D. – Eric Dell’Erba/CCT


Demandez le programme !

  • Tù*

*«Conque»et«baleine»en langue kapumë

Cette exposition d’art contemporain sera présentée salle Komwi, du 3 mars au 27 août. Il s’agit d’un travail collectif de Christelle Montané, Arnaud Elissalde, Ito Waïa, Kapoa et Seilui Tiaou, Nicolas Molé, Sacha Terrat, Marie-Ange Kapetha, George Nuku, Ruha Fifita et John Puhiatau Pule. Tù est le son qui sort de la toutoute pour appeler la tribu à se réunir. Un son qui ressemble au souffle de la baleine et marque le début du travail de la terre pour la nouvelle saison de l’igname. Les artistes se font l’écho des chants des baleines et proposent un travail autour du précieux océan qui nous entoure.

Du 3 mars au 27 août en salle Komwi

  • Pawno sur grand écran

Première projection de l’année, Pawno est un long métrage australien de Paul Ireland. Cette comédie dramatique de 2015 se déroule à Footscray, une banlieue populaire et animée de Melbourne. Le réalisateur nous propose de suivre Les Underwood, qui tient une boutique de prêts sur gage du quartier. La boutique de cet homme au caractère un peu difficile est l’occasion de dresser des portraits et de livrer quelques secrets d’une population haute en couleur.

La projection aura lieu en salle Sisia jeudi 13 avril, à 18 h 15

  • Kakang, la voix du respect

Kakang est un spectacle de danse proposé par la compagnie Nyian et l’association indonésienne de Nouvelle-Calédonie. Arrivé il y a 120 ans, la communauté indonésienne s’est largement métissée avec les autres ethnies présentes en Nouvelle-Calédonie. Pour les jeunes danseurs, qui ont grandi dans une société connectée au reste du monde, ce spectacle est une réflexion sur leurs origines, les souffrances du passé, mais aussi tourné vers un avenir qui se construit chaque jour.

Du 11 au 13 mai, en salle Sisia, à 19 heures

  • Fin mal barrés

Le référendum d’autodétermination flotte au-dessus des têtes des Calédoniens depuis 1989. Le sujet inquiète ou suscite l’enthousiasme, mais ne laisse pas indifférent. Jenny Briffa et Marithé Siwene se sont penchées sur la question et propose une pièce de théâtre originale et drôle. L’occasion de passer au peigne fin les (nombreux) travers de la politique calédonienne.

Salle Sisia du 22 au 25 juin, à 19 heures

  • Quelles options monétaires pour la Nouvelle-Calédonie ?

Une conférence sur le thème de la monnaie est organisée jeudi 23 mars, à 18 h 15, en salle Sissia. Laïsa Ro’i, docteure en économie à l’IAC, Institut agronomique néocalédonien, tentera de répondre à cette question en prenant en compte les objectifs économiques de la Nouvelle-Calédonie ainsi que les évolutions du contexte régional. Laïsa Ro’i s’appuiera également sur une comparaison des différentes expériences des pays océaniens.

Jeudi 23 mars, en salle Sisia, à 18 h 15

  • Un marché pour les femmes de brousse

Le marché des femmes rurales est un des nouveaux rendez-vous mensuels du centre culturel Tjibaou. Un dimanche par mois, il accueillera un marché vivrier tenu par des femmes. L’occasion de venir acheter ses fruits et légumes directement auprès de ces cultivatrices. Participer à ce marché est un acte culturel qui permet de soutenir les producteurs qui vivent de la terre et la font vivre.

Le premier rendez-vous se tiendra le 23 avril, puis le 14 mai, le 18 juin, le 23 juillet, le 13 août, le 17 septembre, le 15 octobre (Journée internationale de la femme rurale), le 19 novembre et le 17 décembre. Le marché se tient de 9 heures à midi.

  • Kaneka, une musique en mouvement

Le kaneka a fêté ses trente ans. L’occasion pour le CCT de proposer une exposition réalisée par Virginie Soula, en partenariat avec la Sacenc. Cette musique emblématique du pays s’est imposée comme l’étendard sonore de la culture kanak. Porteuse de rythmes et de chants traditionnels, le kaneka est une fusion en constante évolution.

Du 21 juin au 19 novembre dans l’allée centrale.

Retrouvez l’intégralité du programme sur le site www.adck.nc