À l’épreuve des quarts

L’équipe de France a pris en stature dans cette Coupe du monde après son gros match face à l’Argentine. Elle affrontera, samedi matin, pour la première affiche des quarts de finale, l’Uruguay, et celui qui est considéré comme le meilleur attaquant au monde, Cavani. Si tant est que celui-ci est effectivement remis de sa blessure.

Mais quel énorme match ce France-Argentine ! Du jeu, des occasions, des frayeurs, sept buts dont trois merveilleux… Voilà la Coupe du monde dans toute sa splendeur et un match qui restera dans les mémoires. Après une rencontre laborieuse contre l’Australie, moyenne contre le Pérou, ennuyeuse contre le Danemark, les Bleus n’avaient finalement rien montré jusqu’ici. Mais face à la grande nation argentine, nous avons enfin vu du vrai jeu.

La formation française a ouvert le score à la 13e minute avec un penalty de Griezmann, suite à une faute de Marcos Rojo sur Kylian Mbappé, qui venait de faire son désormais fameux sprint à 37 km/h. L’Argentine a recollé au score à la 41e minute, grâce à un superbe but de Di Maria, servi par Banega. Stupeur, Gabriel Mercado a ensuite donné l’avantage aux siens à la 48e minute, servi par Messi.

Menés à 2-1, les Français ont alors senti qu’ils allaient rentrer à la maison et ont joué le tout pour le tout. Pavard d’abord, sur une passe d’Hernandez, a égalisé à la 57e minute avec un tir brossé sorti de nulle part. Kylian Mbappé a suivi à la 64e minute. Puis servi par Giroud, quatre petites minutes plus tard, il a doublé ! L’équipe argentine a inscrit le dernier but à la 90e minute avec une tête de Sergio Aguero, servie encore par… Messi.

La confrontation a été pour la moins tendue : trois joueurs ont été avertis du côté des Bleus, Matuidi, Pavard et Giroud, ainsi que Rojo, Tagliafico, Mascherano, Banega et Otamendin dans les rangs de l’Argentine. Blaise Matuidi ne jouera pas la prochaine rencontre. Et il manquera évidemment.

« Le match va être chiant »

Mais les Bleus sont en forme. Le talent de Kylian Mbappé, 19 ans, homme du match, a sauté aux yeux du monde. Griezmann, fatigué après sa saison pleine, est sur le bon chemin. Kante, l’infatigable milieu de terrain, a multiplié les interceptions. Varane prend du poids, les défenseurs latéraux Pavard et Hernandez ont ébloui. La force du groupe a aussi surpris sur le terrain, et en dehors, avec un bon mix entre les cadres et les jeunes. Un bon état d’esprit est au rendez-vous.

Les Bleus sont remontés, disent n’avoir « peur de personne » et pensent avoir de quoi aller plus loin. Mais ils savent aussi qu’il faut garder les pieds sur terre. Griezmann a ainsi prédit une rencontre très ennuyeuse face à l’Uruguay : « Ils vont prendre leur temps, ils vont tomber, ils vont aller voir l’arbitre. […] Le match va être chiant, a-t-il prévenu. Il va falloir être calme et faire jouer cette défense. »  L’engagement physique, le « trucage » et la « grinta » (hargne, mordant) font partie intégrante du jeu de la sélection uruguayenne.

Guy Stephan, l’adjoint de Didier Deschamps, est encore plus prudent. « C’est une équipe qui ne prend pas de but, qui a beaucoup de caractère dans les duels, mais qui ne prend pas de carton jaune pour autant : un seul en quatre matches ! Elle défend donc très bien. C’est une équipe très compacte, avec une grosse solidarité. Il faudra être patient face à elle pour trouver les espaces. ». Didier Deschamps a gardé son groupe sous pression. Dès samedi soir, il leur a rappelé qu’ils n’avaient encore « rien fait dans cette Coupe du monde » et qu’ils devraient répondre présent, samedi à Nijni, contre Suarez, Godin, Cavani… qui poseront effectivement d’autres problèmes.

Un vrai feuilleton se déroule quant à l’état de ce dernier, blessé face au Portugal. Edinson Cavani souffre finalement d’une « lésion œdémateuse » au mollet gauche, « sans déchirure de fibres musculaires », selon un communiqué de la fédération uruguayenne (AUF), lundi soir, qui ne précise pas s’il sera rétabli pour affronter la France. On sait simplement qu’il a toujours mal et qu’il reçoit « un travail différencié et une réadaptation physiologique ».


Ça chambre !

Antoine Griezmann répète qu’il aime l’Uruguay ? Il devrait peut-être arrêter. Il « ne connaît pas le sentiment d’être uruguayen, lui a rétorqué Luis Suarez, attaquant vedette de la Celeste, en conférence de presse. Il ne connaît pas le dévouement et les efforts que les Uruguayens font depuis leur plus jeune âge pour pouvoir réussir dans le football, malgré le peu de gens que nous sommes. » On est déjà dans le match.


80 sélections pour DD

Dimanche, Didier Deschamps s’est vu remettre un maillot de l’équipe de France floqué du chiffre 80, pour honorer le record de sélections comme entraîneur des Bleus. Selon son entourage, le sélectionneur se porte bien. Il aurait gagné en sérénité, malgré les critiques relatives aux phases de poules. Il aurait fait de très bons speechs après les rencontres contre l’Australie et l’Argentine.

Malédiction pour les grands

Les Italiens restés à la maison, les Argentins presque pas qualifiés, les Allemands éliminés au premier tour, les Espagnols et les Portugais en huitièmes… Cette Coupe du monde est décidément compliquée pour les grandes équipes.
Le fait est que toutes les équipes moyennes se soient nettement améliorées sur le plan de l’organisation défensive, a expliqué Guy Stephan, adjoint de Didier Deschamps. « Elles sont capables de jouer en bloc bas, de coulisser et de poser des problèmes à n’importe qui. L’Allemagne a eu des problèmes, le Portugal, l’Espagne, l’Uruguay, le Brésil aussi. Ça devient de plus en plus difficile de jouer contre eux. Le Danemark a fait plus que résister contre la Croatie… Et pas pendant 90 minutes, 120 minutes. C’est quand même une Coupe du monde spéciale : les deux finalistes de 2014 sont déjà éliminés, l’Espagne dite favorite, aussi. » De là à miser sur un outsider…


Les autres Quarts

Belgique-Brésil

C’est l’affiche de rêve avant l’heure, le quart que tout le monde attendait. La Seleçao avec ses 5 étoiles n’a pas succombé à la malédiction des grandes équipes et affrontera une Belgique brillante et surgalvanisée par sa victoire obtenue à l’arrachée face au Japon. Un match forcément à suivre puisque le vainqueur de cette rencontre affrontera la France ou l’Uruguay.
Les Diables rouges ont frôlé une terrible désillusion en huitièmes. Partis plus que doucement en première mi-temps, ils ont été menés 2-0 jusqu’à la 70e minute après un but de Genki Haraguchi (48e), suivi par une superbe frappe de l’extérieur par Takashi Inui (52e). Mais c’était sans compter une fin de match renversante et trois buts, une tête lobée chanceuse de Vertonghen (69e), une autre tête de Fellaini (74e) et un tir final de Chadli (90+4’), les deux derniers étant rentrés à la 65e minute en remplacement de Mertens et Carrasco. Un coaching totalement payant pour Roberto Martinez dont les hommes seront donc opposés au Brésil, samedi à Kazan, pour une place dans le dernier carré.

La Seleçao, de son côté, s’est imposée 2 à 0 contre le Mexique. Neymar a refait parler de lui pour ses excès. « Perdre autant de temps sur le terrain à cause d’un joueur est une honte pour le football », a même déclaré Juan Carlos Osorio, le sélectionneur du Mexique. D’autant que le Brésilien monte en puissance. En difficulté face à la Suisse, à moitié malchanceux face au Costa Rica, pas très influent contre Serbie, le numéro 10 est sorti de sa torpeur contre le Mexique en portant son équipe. À noter que si Neymar énerve, il est aussi le joueur le plus attaqué de cette Coupe du monde, avec 22 fautes à son encontre.

Le Mexique, pourtant séduisant, perd pour la 7e fois consécutive en huitièmes de finale. Le Japon n’est encore jamais parvenu à les passer, malgré de véritables progrès : Avec six buts, cette sélection aura été la plus prolifique de l’histoire.

Russie-Croatie

Cette fois, c’est l’affiche qu’on attendait pas. Les Croates étaient attendus, ils ont impressionné en phase de groupe et se posaient en favoris, mais ils se sont néanmoins fait très peur face aux Danois. Le début de cette rencontre est entré dans l’histoire avec deux buts en moins de quatre minutes : à 57 secondes pour le Danemark (Jörgensen), le suivant à 3 minutes 37 pour la Croatie (Mandzukic). Il n’y aura plus eu grand-chose jusqu’aux dernières minutes de prolongation et un penalty arrêté par le Danemark. Aux tirs au but, Schmeichel a poursuivi sur sa lancée en détournant deux tirs, mais Subasic a fait mieux avec trois tirs déjoués. Les Croates ont finalement pu remporter un match de compétition internationale aux tirs au but !

Contre toute attente, en revanche, la Russie a sorti l’Espagne, invaincue depuis 23 matchs. La Roja s’est confrontée au bloc russe, tout en défense pour jouer les contre, et a eu toutes les peines à trouver des ouvertures. Ignachevitch a marqué contre son camp à la 11e, mais les Russes ont égalisé sur un penalty (41e), sifflé après une main de Piqué. Et puis il aura finalement fallu attendre la loterie finale des tirs au but lors de laquelle Akinfeev a stoppé les tentatives de Koke et Lago Aspas. Score final : 3-2 pour les Russes. L’horreur pour l’Espagne, l’impensable pour le pays hôte. La Russie est en quarts de son Mondial.

Angleterre – Suède 

Depuis 12 ans, l’Angleterre ne s’était pas qualifiée en quarts de finale de la Coupe du monde. C’est désormais chose faite aprés une victoire arrachée à la Colombie. La rencontre aura  été laborieuse et marquée par huit cartons jaunes ! Sans leur chef, James Rodriguez, Los Cafeteros ont bien résisté. En deuxième période, Harry Kane a transformé un penalty logique. Les Colombiens ont eu bien du mal à revenir jusqu’à un corner dans le temps additionnel et la tête piquée du grand défenseur, Yerry Mina. L’Angleterre s’est finalement imposée aux tirs au but.

Dans l’autre huitième, plus tôt dans la journée, la Suède a éliminé la Suisse s’offrant pour la première fois depuis 1994 un ticket pour les quarts. Malgré une plus faible possession de balle et un rythme imposé par les Suisses, les hommes de Janne Andersson se sont procuré les meilleures occasions. Mais il aura finalement fallu attendre la 71e minute pour qu’ils concrétisent leur domination sous l’impulsion de Forsberg.

La Suisse, capable d’accrocher le Brésil (1-1), doit nourrir quelques regrets sur ce match dans lequel elle n’est pas vraiment parvenue à rentrer. Elle n’a pas atteint les quarts depuis 64 ans.
Le duel Suède-Angleterre s’annonce intéressant. Après avoir eu raison des Pays-Bas en éliminatoires, de l’Italie en barrages et de l’Allemagne, tenante du titre, en phase de groupes, la Suède poursuit sa belle histoire, le tout sans Zlatan, (ce qui visiblement est porteur) et pourrait aller très loin ! L’Angleterre continue de susciter des frustrations, mais se permet d’espérer avec sa nouvelle génération au beau potentiel menée par Gareth Southgate. La chanson I’m coming home a même refait surface dans les tribunes…

C.M.