Petit ou gros mâchouilleur, il en a pour tous les crocs

Olivier Chantepie est lauréat de l’appel à projets sur l’économie circulaire lancé par la province Sud. « Ça m’a bien aidé financièrement. J’ai acheté le dock et j’ai commandé tout mon matériel », précise-t-il.

Depuis près d’un an, Olivier Chantepie commercialise des friandises pour animaux confectionnées grâce aux déchets de viande et de poisson qu’il récupère dans les abattoirs.

Dans le réfrigérateur d’Olivier Chantepie, on trouve : du poumon ou de la trachée de bœuf, des pattes ou des têtes de poulet, de la langue ou du foie de cerf. Parfois des bouts de thon. Les parties un peu rouges avec des lignes de sang au niveau de la tête. De quoi soulever le cœur des estomacs sensibles… Mais pas des principaux concernés. Eux, s’en lèchent les babines rien que de les humer.

Ces morceaux que se procure Olivier Chantepie sont les déchets des abattoirs et des ateliers de découpe qui finissent normalement à la poubelle. Il les récupère depuis plus d’un an et les transforme en friandises pour chiens. On les retrouve sous le nom de « Croc bon » dans les animaleries. Un terme que nos compagnons à quatre pattes ne risquent pas de contredire. Les siens en premier. Dans son dock à Païta, Pilou et Tao ne perdent pas une miette des portions qui tombent par inadvertance sur le sol.

C’est pour eux que le frigoriste s’est lancé dans cette aventure. « Depuis plusieurs années, je cherchais à faire autre chose. Jusqu’au jour où j’ai eu un chien : Pilou. Comme il était tout rachitique, il sortait de nulle part, je voulais lui donner une bonne alimentation ». Il se rend alors dans les commerces animaliers et tombe nez à nez avec des friandises importées. « Je me suis dit : mais avec tout ce qu’on jette ici, autant les faire. »

LES DÉCHETS CARNÉS VALORISÉS

Sa connaissance du milieu industriel l’aide à se lancer. « C’est mon métier, le froid. J’ai travaillé dans les boucheries, les abattoirs. Je sais qu’il y a du déchet. » Il va taper à quelques portes pour acheter les restes carnés non utilisés. Puis s’essaye à plusieurs recettes en fonction de ses matières premières. « J’ai regardé sur internet tous les produits qui pouvaient être utilisés. Il a fallu maîtriser le séchage. Au début, je coupais gros, fin, ça collait, ça ne séchait pas. » Il réussit à sortir ses petites douceurs séchées qu’il met en vente en juin 2022. Les chiens peuvent aujourd’hui varier les plaisirs. Pattes de poulet broyées, poumons coupés en fines tranches… Il y en a pour toutes les mâchoires. « C’est bourré de vitamines et de protéines. Je les utilise comme complément alimentaire. »

Ses clients peuvent directement se rendre à son dock situé dans la zone industrielle de Païta pour faire le plein. Ses petites douceurs se conservent un an. (© E.B.)

Dans son laboratoire, Olivier Chantepie travaille dur afin de satisfaire les papilles des canidés. Il coupe des becs, des ongles, des gros morceaux de viande. « Je congèle une partie. J’ai une petite zone de cuisson qui me permet de blanchir certains produits, une chambre froide pour stocker ceux en attente. J’ai aussi des moules pour faire des os, des poissons. »

Le frigoriste passe désormais ses journées à hacher, scier, découper. « Des fois, c’est assez gore », avoue- t-il. Avant, Olivier Chantepie cherchait directement le porc à l’abattoir, il mettait dans une glacière le foie, le cœur… le tout encore sanguinolent. « Vous ouvrez, vous avez l’odeur, le sang… » Sans oublier les éclaboussures partout sur le t-shirt. « Ma femme, quand je rentre le soir, elle me dit que je sens mauvais », sourit-il. Olivier Chantepie ne s’en rend même plus compte. Regarder le poil soyeux de ses deux compagnons suffit à le rendre heureux.

Avec tout ce qu’il a sous la main, il prépare régulièrement les gamelles de ses chiens en leur cuisinant du steak haché de poulet et en ajoutant d’autres mélanges. « Dans les ateliers de découpe, il y a, à peu près, plus de deux tonnes par jour de déchets de thon », souligne-t-il. Olivier Chantepie exploite environ 400 kg de déchets par mois. Son objectif ? Traiter au moins une tonne. Il ne s’inquiète pas. « Il y a de quoi faire. »

Edwige Blanchon (© E.B.)