COP26 : l’appel du Pacifique pour limiter le réchauffement à 1,5 °C

TO GO WITH AFP STORY BY CLAUDINE WERY - An undated handout picture released by the secretariat of the Pacific community (SPC) shows inhabitants of Kiritimati coral atoll building a stone seawall to struggle against sea level rise cause by global warming. AFP PHOTO/SPC (Photo by SPC / AFP)

À la veille de la COP26 à Glasgow (Écosse), les leaders du Pacifique – peu représentés en raison de la crise sanitaire – ont imploré les grands pays à limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C afin d’assurer l’avenir de l’humanité.

 

Les leaders du Pacifique de la zone ACP (*) ont adressé une déclaration à la veille de l’ouverture de la 26e conférence des parties de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

Ce rendez-vous, jugent-ils, est la « meilleure chance de sauver la Planète bleue ». Les pays du G20, responsables de 80 % des émissions de gaz à effet de serre, sont en particulier appelés à faire en sorte que la conférence puisse « une fois pour toutes » entériner la limite du réchauffement climatique à 1,5 degré au-dessus du niveau de l’ère préindustrielle pour la fin du siècle, comme le mentionnait l’accord de Paris. « Nous n’avons pas le luxe d’attendre et devons joindre nos forces d’urgence pour répondre aux ambitions de la COP26 et sauvegarder le futur de l’humanité et de la planète », selon Henry Puna, ancien Premier ministre des Cook et secrétaire général du Forum des îles du Pacifique.

Une question de survie

Les nations du Pacifique réaffirment que le changement climatique est la plus grande menace pour la région et s’engagent pour leur part à mettre en œuvre les obligations de l’accord de Paris. Ils exhortent les leaders du G20 à prendre des actions fortes et immédiates pour faire de même. « Nous avons besoin d’actions concrètes maintenant. Nous ne pouvons pas attendre 2050. C’est une question de survie », a déclaré à Reuters Anote Tong, ancien président de Kiribati, archipel qui pourrait devenir inhabitable dans 30 à 60 ans en raison des inondations et de la contamination des approvisionnements en eau douce.

Concrètement, les leaders du G20 sont invités à revoir leurs engagements à la hausse pour 2030 et viser la neutralité carbone à l’horizon 2050. Les pays du Pacifique réclament aussi la fin des centrales à charbon, de tous les investissements et subventions sur les énergies fossiles et que soient enfin versés les 100 milliards de dollars promis par an pour les mesures d’adaptation et d’atténuation des pays du sud qui polluent peu, mais qui sont les plus touchés (il manque 20 milliards annuellement et les fonds sont fournis pour l’instant sous forme de prêts, donc à rembourser).

À Rome, les pays du G20 ont effectivement affirmé vouloir viser ce seuil de 1,5 °C, porter la finance climat à 100 milliards de dollars par an à partir de 2023 (avec trois ans de retard), sortir le charbon de leur économie (mais sans objectifs nationaux) avec, notamment, la fin du financement international des centrales à charbon dès cette année. Ils n’ont pas indiqué de date précise pour la neutralité carbone. Reste donc à voir si et comment ces ambitions vont se croncrétiser.

Une petite délégation

À Glasgow en tout cas, les îliens de la région auront moins de poids que d’habitude. En raison des restrictions de voyage liées au Covid dans le Pacifique, touché sur le tard par la crise, mais aussi de la quarantaine stricte imposée en Grande-Bretagne et de l’augmentation des tarifs, seul un tiers des États et territoires insulaires du Pacifique assiste à la COP26 en Écosse. On trouve les représentants de Cook, Marshall, Fidji, Tuvalu et Palau.

Il en est de même pour les représentants de la société civile qui sont habituellement nombreux à faire le déplacement. La participation à la COP26 est devenue « presque impossible », a affirmé dans le Guardian Lavetanalagi Seru, un représentant fidjien du réseau pour l’action pour le climat des îles du Pacifique (Pican). Le Premier ministre des Cook, Mark Brow, a regretté l’hypocrisie de ne pas pouvoir voter virtuellement alors que cela fait deux ans que les meetings internationaux sont organisés de cette façon.

Les ONG, qui estimaient que le rendez-vous n’était pas à même d’offrir des conditions équitables de participation, avaient d’ailleurs formulé une demande de report.

Cette absence est d’autant plus regrettable que le principe des COP repose sur le fait qu’un État – quelle que soit sa taille – compte pour une voix. Tuvalu, Fidji ou Kiribati ont le même poids que les États-Unis ou la France.

Les îles du Pacifique, qui sont en première ligne des effets du changement climatique, ont aussi une longueur d’avance en termes de politique environnementale (ex : l’inter- diction, en 2016, par 14 États de l’exploita- tion d’énergies fossiles) et sont souvent les premières à mettre en garde les principaux pollueurs. Durant la COP21, la contribution des dirigeants du Pacifique avait ainsi pesé lourd pour mentionner le seuil des 1,5°C, un

des points majeurs de l’accord de Paris. Les émissaires du Pacifique auront néanmoins à coeur de porter les messages des Océaniens.

 

(*) La zone ACP désigne un groupement de 79 États d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique avec lequel l’Union européenne entretient des relations particulières.

 

 


Quels engagements pour la Nouvelle-Calédonie ?

En 2019, le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a adopté un vœu déclarant l’archipel en état d’urgence climatique et environnemental. Avec les autres territoires du Pacifique, le territoire a aussi reconnu l’urgence climatique au travers de la Déclaration de Vemööre (2020). Un certain nombre d’actions de lutte contre le changement climatique ont été déployées notamment au travers du schéma pour la transition énergétique (STENC – 2016), la création du Parc naturel de la mer de Corail et le projet Clipssa (avec l’AFD et l’IRD) qui doit permettre de recueillir des données précises pour mieux anticiper les dérèglements climatiques et permettre une stratégie d’adaptation.

Le Stenc doit être révisé d’ici début 2022. Il a fait l’objet de discussions et d’une concertation au mois de juin. Il porte notamment d’ici 2030 sur l’inclusion d’un minimum de 30 % d’énergies renouvelables dans le mix énergétique de la métallurgie ou encore le développement de la mobilité décarbonée avec une ambition de 18 000 véhicules électriques en circulation. Pour la première fois le gouvernement s’est aussi doté d’un membre chargé du plan d’atténuation et d’adaptation aux effets du changement climatique, Joseph Manauté.

Dans une lettre adressée au haut-commissaire le 13 octobre, le président du gouvernement Louis Mapou, jugeait que la Nouvelle-Calédonie ne pouvait pas être absente de la COP26 et demandait que Joseph Manauté puisse représenter le territoire et intégrer la délégation française. Mais celui-ci n’a finalement pas pu participer à la réunion internationale.

 


Quels engagements pour l’Australie et la Nouvelle-Zélande ?

En Nouvelle-Zélande, Jacinda Ardern a annoncé que le pays visait désormais une réduction de 50 % de ses émissions de gaz à effet de serre (par rapport à 2005) à l’horizon 2030 contre un ancien objectif à 30 %. Le pays s’est également engagé à porter les aides de son pays à 930 millions de dollars sur quatre ans.

En Australie, Scott Morisson a évoqué la neutralité carbone d’ici 2050 et une projection de 30-35 % de réduction des émissions (par rapport à 2005) d’ici 2030. Mais on lui reproche de n’avoir aucun programme pour parvenir à ces objectifs. Les deux pays sont membres du Forum des îles du Pacifique.

 

Chloé Maingourd (© AFP Photo/SPC et Sophie Ramis, Gal Roma/AFP)