Viral : Quinze artistes s’expriment sur la pandémie

La crise sanitaire a fait naître en nous de vifs sentiments et des prises de position clivantes au sein de la société. Quinze artistes plasticiens, peintres et sculpteurs ont traduit ces différents points de vue. Ils exposent leurs œuvres à l’Amirauté jusqu’au 6 août dans une exposition intitulée Viral.

Les confinements, vaccins, masques et autres gestes barrières ont divisé ici comme partout. Alors que la menace sanitaire s’éloigne peu à peu, quinze artistes, réunis par l’association Vital, ont choisi de s’exprimer sur cette période très particulière. Ensemble, malgré leur sensibilité divergente et leur degré de résilience, ils exposent des créations plastiques qui témoignent de leur sentiment ou de leur regard sur cette crise.

Le projet est né en début d’année à l’initiative de quelques artistes qui ont rapidement trouvé un nom à l’exposition. « Viral fait référence au virus bien sûr, mais l’adjectif est aussi utilisé pour caractériser la vitesse de réseaux sociaux qui ont joué un rôle prépondérant durant cette période ou la viralité de l’information », témoigne Aline Mori.

Elle, qui a choisi la peinture, a vécu ce travail comme un moyen d’expulser ses émotions négatives. « Il y avait la colère d’avoir été manipulée, la colère de ne même pas pouvoir me balader librement, la colère de tous ces mensonges », précise-t-elle.

Zombie 

Dans un tout autre style, Eric Mouchonnière, connu sous le nom de Fly, propose une œuvre grandeur nature que l’on dirait tout droit sortie d’une bande dessinée. « Je n’ai pas voulu rentrer dans le débat pour ou contre. Ce qui m’a intéressé, c’est de voir comment les gens ont vrillé d’un coup avec les confinements », dit-il. Sa créature ressemble à un zombi absorbé par son téléphone portable.

« Cette période a accentué la faculté des vidéos et réseaux sociaux à nous renfermer. À cause des algorithmes, ce sont toujours les mêmes informations qui sont proposées et elles finissent par devenir des certitudes », détaille-t-il.

Un peu plus loin, Sophie Gilbert, artiste et commissaire de l’exposition, explique sa démarche. « Je viens du monde de la mode et je m’en suis inspirée. J’ai remarqué que les masques se sont rapidement transformés en outil de mode avec du noir d’abord, puis des paillettes ensuite », affirme-t-elle en montrant ses masques colorés mis sous cloche.

Elle est aussi à l’origine de l’installation mise en place dans la piscine. À première vue, on pourrait croire que le bassin est peuplé de poissons. En réalité, ce sont des masques colorés flottant entre deux eaux pour dénoncer la pollution.

Indigénat 

Plusieurs sculpteurs sur bois ou sur pierre participent également à l’exposition collective, à l’image de Jean-Jacques Poiwi connu pour ses sculptures monumentales exposées au parc de La Foa. « Cette période m’a fait penser à l’indigénat avec les attestations de déplacement lors du confinement ».

Le tailleur de pierre Mathieu Tardy, auteur notamment des quatre dauphins de la fontaine Céleste, a plutôt été interpellé par l’origine de la pandémie. « La sculpture de jade (l’une de ses quatre œuvres exposées, NDLR) est une allégorie de l’homme qui grignote la nature, les machines qui dévorent les sols », raconte le sculpteur de Farino.

Si l’exposition Viral se distingue par la richesse de ses œuvres, elle se singularise surtout par la diversité des points de vue et des interprétations sur un thème commun : la pandémie. Un thème qui divise encore mais qui, au moins, fédère des artistes.

V.G.

©E. Dell’Erba

L’œuvre d’Eric Mouchonnière, connu sous le nom de Fly, attire l’œil.


Une exposition particulièrement difficile à financer

De l’avis de la commissaire d’exposition, Sophie Gilbert, « il a été particulièrement difficile de trouver des sponsors pour cette exposition tant le sujet divise ou n’intéresse pas ». Plusieurs ont tout de même accepté de promouvoir cette initiative, comme la SLN. « Nous avons choisi de poursuivre les accompagnements artistiques, à plus forte raison quand les projets regroupent des artistes calédoniens majeurs, avec une propension à pouvoir s’exporter », précise Laurent Fogliani, chef de département communications et affaires publiques, pour justifier le choix de la SLN.