Une première estimation du coût économique de la crise

Les comptes économiques de l’outre-mer viennent de publier la première estimation des conséquences de la crise du Covid-19 et du confinement en Nouvelle-Calédonie et Polynésie française. 2020 devrait être marquée par des récessions de l’ordre de 3,6 % et de 3 %.

Cela ne surprendra personne, la première évaluation économique des conséquences de la crise du Covid-19 en Nouvelle-Calédonie table sur une contraction du PIB de 3,6 % pour l’année, en comptabilisant uniquement les pertes, ou manques à gagner, enregistrée pendant le mois de confinement. Pour être plus précis, les experts de l’IEOM, de l’AFD et de l’Isee, qui travaillent en commun sur les comptes économiques rapides pour l’outre-mer (Cerom), estiment les pertes entre 2,9 et 4,5 % du PIB annuel.

À cet effet immédiat, il conviendra certainement d’ajouter des effets induits à plus long terme. Comme le souligne l’analyse des experts, « le retour à la normale sera probablement progressif du fait de l’interconnexion entre secteurs et filières, au niveau local mais aussi sur le plan international ». La résilience des économies ou leur capacité à encaisser les chocs sera le principal facteur modulant la vitesse de ce retour à la normale.

Le Cerom relève le caractère inédit de cette crise qui touche à la fois l’offre et la demande. Mais son autre particularité est d’être brutale et soudaine. La baisse de la demande des consommateurs est immédiate avec l’instauration du confinement. En Nouvelle- Calédonie, cette crise intervient à un moment bien particulier, après des années d’euphorie, le dynamisme a fait place à une atonie marquée, que ce soit pour les entreprises, les ménages ainsi que les finances publiques.

Activité en baisse et trésorerie plombée

En parallèle de la demande, l’offre a subi de plein fouet l’arrivée du Covid-19 et plus particulièrement pour les activités tertiaires. Tourisme, hôtellerie, restauration, transports, loisirs… ont tout simplement dû cesser. Pour les autres activités, comme le BTP, l’industrie ou le commerce, la période de confinement a imposé un fonctionnement particulièrement dégradé. Comme le souligne encore le Cerom, ce choc brutal plombe la trésorerie des entreprises et touche négativement leur masse salariale.

Plus dans le détail, les analystes estiment la baisse de l’activité durant le confinement à environ 44 %. Une baisse qui pourrait engendrer une perte sèche de l’ordre de 27,6 milliards de francs à 41,9 milliards de francs. C’est sans surprise que les administrations et les services non marchands les moins touchés arrivent en tête, avec un taux d’activité de l’ordre de 91 %, suivis par l’agriculture avec un taux d’activité de 78 %. La baisse la plus marquée concerne le BTP pour qui le taux d’activité a chuté à 35 %.

Amortisseurs ?

Le fait que les administrations aient été relativement épargnées pourrait jouer un rôle d’amortisseur, d’autant que l’administration a un poids non négligeable en Nouvelle- Calédonie (les administrations publiques et les services non marchands représentent 24 % de la valeur ajoutée). Ces personnes relativement peu touchées peuvent être un élément positif dans la reprise, en particulier au niveau de la consommation. Comparativement aux autres territoires d’outre-mer, la Nouvelle-Calédonie présente un poids de l’administration moins élevé (24 % contre 38 % dans les autres territoires). La mine peut également être un facteur de reprise, mais aussi être un « vecteur d’aggravation » de la crise, note le Cerom. Le document relève que la baisse des cours aura « un e et négatif sur la situation financière des métallurgistes déjà particulièrement dégradée depuis des années. Toutefois, les cours ne se sont pas effondrés au regard des autres matières premières comme le pétrole ». Les analystes estiment que le redémarrage de l’économie chinoise, désormais premier client du minerai calédonien, pourrait relancer la demande et donc l’activité sur mine.

Pour les collectivités, le choc risque d’être rude. « Elles vont devoir faire face à un triple choc : chute des recettes liée au choc conjoncturel immédiat précédemment décrit (baisse des taxes liées à la production, à la consommation…), recouvrement des recettes décalé dans le cadre des reports de cotisation (impact sur la trésorerie), et d’importantes dépenses supplémentaires directes (dispositifs de chômage partiel, coûts liés aux mises en quatorzaine et aux rapatriements des ressortissants calédoniens…) et indirectes (hausse de l’endettement notamment à travers le prêt de l’État, soutiens financiers des participations publiques dans l’économie). Alors que les marges de manœuvre d’avant crise étaient très faibles, cela impactera donc vraisemblablement durablement les déséquilibres financiers publics, avec un probable effet négatif sur le potentiel de l’économie des prochaines années ».

Mais de manière plus générale, le Cerom souligne que les effets induits à plus long terme restent encore difficiles à évaluer et ces premiers éléments seront réévalués et ne dépendent pas uniquement du comportement des Calédoniens, mais aussi des agents hors du territoire.