Une Calédonie construite par Tous les Calédoniens

Depuis le mois d’avril, une quinzaine de structures se sont retrouvées pour créer le mouvement pour une Calédonie inclusive (MCI). L’idée est de porter un regard différent sur les différences et permettre l’épanouissement de chacun dans la société et en particulier les personnes en situation de handicap. Une philosophie qui se traduit aussi et surtout par des projets très concrets.

Mouvement pour une Calédonie inclusive. Le nom du mouvement résume l’ambition de ce rassemblement d’une quinzaine d’associations, de structures ainsi que d’entreprises œuvrant – mais pas nécessairement – autour du handicap. L’idée du mouvement est précisément de changer de regard, de faire en sorte que l’on ne voit plus les handicapés comme des personnes amoindries à prendre en charge mais bien comme des personnes, certes différentes, mais ayant des choses à apporter à la société au même titre que les autres.
Cette vision des choses implique un changement radical des mentalités même si le MCI ne cherche pas à brusquer, bien au contraire. Ses fondateurs ont parfaitement conscience que c’est en montrant l’aboutissement de projets bien concrets que la situation pourra évoluer. Le défi n’est pas mince tant les préjugés sont solidement ancrés et les réponses sous forme de prise en charge confortables dans le sens où elles n’impliquent aucune remise en question. C’est précisément cette remise en question que prône le mouvement et, par conséquent, l’importance de sortir du modèle actuel qui a fini par produire des effets pervers. L’obligation d’employer des personnes en situation de handicapées se traduit par le fait que les entreprises préfèrent, dans la majorité des cas, payer l’amende. Selon certaines associations, elles sont mêmes incitées à payer. De la même façon, le système des aides qui baissent en cas d’accès à l’emploi encourage les personnes handicapées à ne pas travailler. Dans certains cas, notamment avec le prix du transport, le travail coûte plus d’argent qu’il n’en rapporte.

Échec des politiques actuelles

Le mouvement fait donc le constat d’échec des politiques actuelles, c’est d’ailleurs sur cette base qu’il est né, d’une certaine forme de scission du Collectif handicap qui a principalement pour mission de gérer des dispositifs réglementaires et notamment les fonds alloués par les institutions. Cette divergence de point de vue est apparue lors des récents travaux sur le schéma sur le handicap et la dépendance. Si la loi sur le handicap adopté par le Congrès en 2009 était une nécessité défendue par l’ensemble des acteurs, deux grandes tendances se sont dessinées au début de l’année 2016. La venue au mois de juin de Charles Gardou, anthropologue, professeur à l’université de Lyon 2 et chargé d’enseignement à Sciences Po Paris, pour une conférence sur le handicap dans l’imaginaire culturel au centre culturel Tjibaou (à visionner à l’adresse suivante : https://www. youtube.com/watch?v=z_0a-ZFIcQQ) n’a fait que conforter les membres du MCI. Cette autre voie qu’ils ouvrent n’est pas révolutionnaire, comme ils le soulignent, mais s’inscrit dans une dynamique mondiale qui cherche à redonner un sens, en particulier au niveau des entreprises, que la recherche systématique du profit au détriment des salariés fait disparaître. De manière formelle, le mouvement se matérialise au travers du développement de l’économie sociale et solidaire mais aussi participative. Une fois intégré que le handicap est une différence comme une autre et ne doit pas être un frein à l’intégration d’une personne dans la société, le mouvement entend bien agir très concrètement, en agissant comme un groupe de pression auprès des élus ou autres collectivités, en particulier pour permettre une meilleure adaptation de l’environnement aux personnes en situation de handicap via des bus adaptés, par exemple. Le MCI va également intervenir auprès des entreprises privées en les sensibilisant à l’employabilité des personnes handicapées. Le mouvement a également vocation à accueillir tout le monde et notamment les porteurs de projets inclusifs. Il a pour vocation de soutenir ce type de projet et de les promouvoir. Le geste étant plus convaincant que la parole, le MCI a déjà quelques exemples à mettre en avant. C’est le cas d’un projet de compost sur Poindimié porté par l’association Handijob qui associe coutumiers et personnes en situation de handicap. Une partie du compost reviendra aux tribus, l’autre sera commercialisé afin de rémunérer les jeunes handicapés. Bien d’autres initiatives sont dans les cartons et en cours de création. Que vous soyez un particulier, une entreprise ou encore une association, avec un projet ou non, vous pouvez devenir membre du mouvement ou tout simplement obtenir davantage d’informations à l’adresse suivante : caledonie.inclusive@gmail.com.


L’obligation d’emploi de personnes en situation de handicap

Cette obligation concerne les entreprises de plus de 20 salariés. Elle les oblige à recruter 2,5 % de l’effectif global. À défaut, les structures doivent s’acquitter d’une amende. Selon le collectif, le secteur public est bien plus mauvais élève que le secteur privé. Mais d’une manière générale, 80 % des entreprises ne sont pas soumises à l’obligation. L’impact de la mesure reste donc assez limité. Pour certaines personnes, remplir les dossiers et être identifié comme une personne en situation de handicap est parfois mal vécu. Pour de nombreuses personnes comme pour les « valides », le travail est un moyen d’émancipation. Comme le soulignait le père d’un enfant pratiquant la natation à haut niveau, son fils était prêt à mettre un terme à sa carrière de sportif pour pouvoir décrocher un travail.


Une nouvelle entreprise d’aides à domicile

Assenatha et Charlotte sont sur le point de lancer leur activité d’aide à domicile pour les personnes dépendantes et en situation de handicap. La petite particularité est que les deux gérantes sont toutes les deux en fauteuil. Vilavi, fait parti de ces projets inclusif qui permettra de mélanger les personnes en utilisant leurs compétences. La force d’Assenatha et de Charlotte est de connaître parfaitement les difficultés rencontrées par les personnes qui bénéficieront de leurs services. Leur première bataille sera auprès de la Cafat qui ne conventionne pas les services de nuit après 20 heures sauf que la vie des personnes ne s’arrête pas forcément avec le journal télé… Le mouvement apportera son soutien dans les discussions.

M.Derel