Une aide précieuse pour les victimes au tribunal

Depuis le mois de mai, le bureau d’aide aux victimes tient une permanence au sein du tribunal de première instance de Nouméa. Géré par l’association Adavi*, il a pour objectif de renseigner, orienter et accompagner les victimes d’infractions pénales tout au long de la procédure, au cœur même du système judiciaire.

Vol, agression, harcèlement, violences conjugales… Être victime de délits ou de crimes est toujours une expérience très pénible. Et souvent, pour les victimes, s’ajoutent à ce fardeau les problèmes liés au droit, à la justice, aux procédures qui peuvent être longues et compliquées.
Pour faire face à ces difficultés et répondre au réel besoin en matière d’accompagnement, le ministère de la Justice a répondu à une demande des magistrats en créant par décret du 7 mai 2012, la possibilité d’instituer dans chaque tribunal, et par convention avec une association, un bureau d’aide aux victimes, BAV. Depuis, 160 structures de ce type ont ouvert leurs portes et le dispositif doit se généraliser d’ici fin 2017 à tous les tribunaux de métropole et d’outre-mer (168 au total). Il est même prévu d’étendre l’accompagnement des victimes en cause d’appel.
À Nouméa, au cours du premier semestre 2016, l’Adavi, Association pour l’accès au droit et l’aide aux victimes, a répondu à la sollicitation des magistrats de la cour d’appel et du tribunal de première instance pour la création d’une telle structure dans les locaux du palais de justice, dédiée donc spécifiquement aux victimes d’infractions pénales.

Un suivi personnalisé et immédiat

Le bureau offre des permanences juridiques sans rendez-vous, permettant aux victimes d’être renseignées, accompagnées et orientées gratuitement à tout moment de la procédure, depuis le dépôt de plainte jusqu’à l’exécution du jugement. « On les informe sur le fonctionnement de la justice, les droits des justiciables, l’état d’avancement de la procédure, la situation de l’auteur des faits, les modalités de recouvrement des dommages et intérêts », explique Cathia Dantu, juriste et pilote de l’activité juridique. « On leur indique leurs possibilités, les conséquences aussi de telle ou telle action. Mais on les informe vraiment, on n’est pas là pour les forcer », précise-t-elle.

Les victimes sont renseignées de façon « fiable et rapide », en toute confidentialité. Selon les situations, elles peuvent aussi être guidées vers les partenaires de l’institution judiciaire
(avocats, huissiers), les associations spécialisées, instances sociales, médicales…
Autre spécificité, les juristes de la structure ne font pas qu’accueillir les gens dans le besoin, ils vont à leur rencontre dans une « démarche proactive ». Ils épluchent les dossiers du tribunal et ciblent les personnes les plus nécessiteuses. Par exemple, celles qui n’ont pas d’avocat, (même s’ils n’ont pas vocation non plus à se substituer à eux dans leur travail de défense). En l’espace de deux mois, 88 victimes sur 183 dossiers consultés ont ainsi été directement contactées, en amont d’une audience, soit la moitié d’entre elles et 34 autres se sont présentées d’elles-mêmes. La plupart des dossiers concernaient des atteintes à la personne, les violences volontaires, puis les atteintes aux biens. Sept victimes d’une infraction à caractère sexuel ont été réorientées vers l’association SOS violences sexuelles, bien rodée à ce type d’affaires.
Au tribunal, on se félicite de ce support et de ces premiers mois d’activité. « La pratique veut que chaque victime convoquée soit informée des aides qui existent par les enquêteurs, par la justice mais, force est de constater, qu’elles réagissent peu ou trop tard dans le déroulé des procédures. Il y a de la déperdition ou elles se laissent porter par les événements, commente le procureur de la République, Alexis Bourroz. Elles ignorent par ailleurs les droits en termes de remboursement, par exemple. Or la justice n’a ni le temps, ni la vocation de s’immiscer dans les dossiers. D’où l’appel à une association extérieure qui permet d’être beaucoup plus réactif. »

Sentiment de justice

Outre cette aide juridique précieuse, la structure propose des permanences psychologiques depuis début août. « Un réel besoin, selon Gwenola Jingand, psychologue clinicienne en charge des permanences. Les victimes de cambriolages, de conflits familiaux ou de séparation sont souvent psychiquement atteintes et la prise en charge qui peut être proposée par ce binôme soin- justice est globale et cohérente. »
Pour Janie Malia-Buso, responsable du bureau, le retour est de manière générale très positif : « Le fait de travailler au sein même de l’institution judiciaire rassure et facilite les démarches. Considérer la victime dans son aspect psychique participe aussi au fait que la victime se reconstruise au plus vite avec un sentiment d’être reconnue comme telle et d’une justice, au sens large du terme. »
Aujourd’hui, la plupart des personnes ayant eu accès au BAV étaient résidentes en province Sud (91 %), dont une majorité de Nouméa (81 %), et, dans une moindre mesure, des communes de l’agglomération (13 %). 6 % des victimes suivies résidaient en province Nord. Il n’est pas prévu d’instaurer un tel dispositif qui demande « des moyens financiers et de la place » dans le Nord, mais les conseils peuvent être donnés par mail ou par téléphone quand les personnes ne peuvent pas se déplacer. Par ailleurs, à terme, les greffiers pourraient voir leurs missions élargies à ce type de soutien, dans une moindre mesure, au sein des SAUJ, services d’accueil unique des justiciables, qui doivent s’étendre sur le territoire national dans le cadre de la réforme lancée par l’ancienne garde des Sceaux, Christiane Taubira.
On sait bien que l’institution judiciaire est naturellement complexe, parce que la justice et le droit sont tels, mais aussi parce que les moyens manquent. Et il semble que les besoins d’accompagnement ont longtemps été « insuffisamment pris en compte », comme le concède le procureur Bourroz. Mais le travail consiste maintenant à faire en sorte que cette complexité soit de moins en moins reportée sur les citoyens. Et ici, le bureau d’accueil aux victimes fait véritablement la différence.


Informations pratiques

Le bureau d’aide aux victimes se situe dans le hall du bâtiment principal du palais de justice. Les victimes sont reçues sans rendez- vous.

Permanences juridiques

• Lundi et mercredi de 13 h à 17 h
• 1er et3e vendredis du mois de 7 h 30 à 8 h 30
• 2e,4e et5e vendredis du mois de 7 h 30 à 11 h 30

Permanences psychologiques

• 1er et3e vendredis du mois de 8 h 30 à 11 h 30.

Tél. 27 76 08 accueil@adavi.nc

 


L’Adavi

L’Association pour l’accès au droit et l’aide aux victimes a pour mission d’accueillir toutes les victimes. Son bureau se situe au Faubourg-Blanchot mais elle reçoit aussi les personnes dans les maisons de quartier à Nouméa et dans les communes de l’agglomération. Partout, ce sont les victimes qui viennent pour être informées. Au tribunal, la structure ne s’adresse qu’aux victimes d’infractions pénales. Et ses membres vont chercher à contacter elles-mêmes les victimes depuis le tribunal pour leur apporter leur aide.

C.M.