Un séminaire sur les terres coutumières

Le Sénat coutumier a organisé, les 16 et 17 juillet, dans ses locaux de Nouville, un séminaire sur le foncier coutumier. L’occasion de dresser un état des lieux du développement sur terres coutumières, à la veille de la sortie de l’Accord de Nouméa.

Coutumiers, GDPL et politiques ont participé à la réflexion qui doit aboutir à la rédaction d’une loi du pays, probablement présentée au Congrès avant la fin de l’année. L’enjeu autour du foncier coutumier est important puisqu’il représente 500 000 hectares, soit 33 % de la surface totale de la Nouvelle-Calédonie. Des chiffres à prendre avec précaution, car si l’on retire les îles Loyauté, ce pourcentage chute à 18 %, les îles étant composées quasi exclusivement de terres coutumières qui n’ont jamais été confisquées au cours de la période coloniale.

La problématique du foncier coutumier a déjà fait l’objet de nombreux travaux et les derniers remontent à 2017. En effet, les sénateurs s’étaient penchés sur la réforme foncière et avait déjà émis plusieurs critiques. C’était notamment le cas sur la qualité des terres. Selon les chiffres de la fédération des groupements de droit particulier local (GDPL), près de la moitié du foncier coutumier de la Grande Terre présente un coefficient de pente supérieur à 30 %. Seules 27 % de ces terres affichent un coefficient compris entre 0 et 10 %.

Une réforme foncière complètement achevée ?

Pour les sénateurs, la réforme foncière est loin d’être totalement achevée, certaines revendications n’ayant pas encore été satisfaites ou examinées. Un travail rendu aujourd’hui difficile par la mauvaise conservation voire la destruction volontaire de documents ayant trait aux Kanak aux Archives de la Nouvelle-Calédonie, comme l’a expliqué la responsable du service, lors d’une conférence sur le rapatriement du tirailleur Kalepo, en 2017. Elle l’est d’autant moins que de récents travaux de juristes laissent à penser que les droits des Kanak sur une grande partie du foncier perdurent aujourd’hui encore, au moins du point de vue du droit international.

Une équipe de l’université pourrait d’ailleurs avoir trouvé le moyen d’établir l’historique des dépossessions sur la Grande Terre. Ce type de réflexion est loin d’être propre à la Nouvelle-Calédonie. Comme l’ont souligné les sénateurs, des travaux similaires sont conduits en Nouvelle-Zélande, par exemple. Un travail qui vise à reconnaître l’identité du peuple autochtone tout autant qu’à sécuriser la propriété foncière des autres communautés.

Au-delà de la propriété ou de la reconnaissance de la première occupation, l’idée est également de revoir le dispositif du GDPL, créé en 1982, dont le fonctionnement constitue parfois un frein. De nombreuses questions se posent autour de la représentation des clans au sein de ces structures, du mandataire ou encore du manque de cadre pour sécuriser les GDPL. Autant de questions qui devraient trouver des réponses dans le futur projet de loi du pays. Ce dernier devrait préciser le rôle de chacun, à savoir des acteurs économiques, des clans et des chefferies.

L’autre question, qui se pose maintenant depuis plus de cinq ans, est le transfert de l’Agence de développement rural et d’aménagement foncier (Adraf ). Cette agence d’État, mise en place en 1986, a pris le relais d’une réforme foncière engagée en 1978 par le secrétaire d’État aux Dom-Tom, Paul Dijoud. Une réforme tout d’abord conduite par la Nouvelle-Calédonie de manière peu probante et reprise en main par l’État en 1982. Le transfert de l’Adraf était prévu en 2014, mais faute de consensus politique, le dossier n’a pas avancé.

Tout l’enjeu est de redéfinir les missions de l’agence pour en faire un outil de développement des terres coutumières. Le cadastre coutumier est un autre dossier en souffrance qui a été évoqué lors des deux journées. Prévu par l’Accord de Nouméa, le relevé des terres coutumières n’a toujours pas été mis en œuvre et les quelques tentatives se sont soldées par des échecs voire des drames. Le cadastre est pourtant un élément essentiel pour pouvoir définir des schémas directeurs de développement des terres coutumières.

M.D. ©Sénat coutumier