Un documentaire consacré à Roch Pidjot

NC La 1ère a présenté, en avant-première mardi soir, un documentaire consacré à Roch Pidjot, trente ans après sa disparition. Roch Pidjot, le souffle de la dignité ouvre la saison 2021 des magazines Itinéraires. Il sera diffusé sur la chaîne mardi prochain, 2 mars, à 20 heures.

Après un passage remarqué en début de mois au Fifo, (Festival du film océanien) et une projection à la tribu de la Conception samedi, le documentaire dédié à Roch Pidjot, père fondateur de l’Union calédonienne et premier député kanak, a été diffusé, mardi, au centre culturel Tjibaou, devant un parterre de personnalités et de proches de l’ancien homme politique disparu en novembre 1990. Le magazine Itinéraires présente ici un nouveau portrait d’une personnalité marquante de l’histoire calédonienne, comme cela avait déjà été fait pour Jacques Lafleur ou Niddoïsh Naisseline, pour ne citer qu’eux. « Nous avons souhaité que l’émission commence cette année à la Conception par une histoire de confluence, a sobrement commenté Walles Kotra, le directeur de la chaîne, une histoire forte mais simple, d’un homme qui parlait peu, mais qui a fait beaucoup. »

« Premier en tout »

Le film de 52 minutes retrace le parcours singulier de ce métis né en 1907, d’un père kanak issu d’une lignée de chefs de Pouébo et d’une mère blanche, orpheline. Les Pidjot fondent, sous la houlette des pères maristes, une mission à la Conception. Roch Pidjot en deviendra le chef. Un homme métis originaire du Nord qui devient chef dans le Sud ? Un début d’histoire qui interpelle déjà, à l’heure où « chacun se recroqueville » sur sa tribu, sa couleur, comme l’a justement relevé Walles Kotra.

On suit, ici, l’histoire des premières familles kanak qui ont pris leur place en politique et l’héritage qu’elles ont laissé : les Pidjot sont à l’origine d’une véritable dynastie politique (Roch Wamytan, Raphaël et Charly Pidjot, Michael Forrest, etc.) et de cadres kanak. Chef sous le Code de l’indigénat, éduqué et formé par les missions catholiques maristes, en partie protégé des violences de l’administration coloniale, Roch Pidjot construit peu à peu son engagement social et politique. Sa femme, Scholastique Togna, fille du chef Wamytan de la tribu de Saint-Louis, dont la famille a beaucoup souffert, contribue à cet engagement qui dura un demi-siècle.

Il deviendra « premier en tout », selon les mots de son ancien assistant parlementaire, le père Jean-Claude Bonnevie : l’un des premiers Kanak à conduire, le premier président de l’Uicalo (l’organisation catholique fondée pour exiger la reconnaissance des droits indigènes), de l’Union calédonienne, l’un des deux premiers ministres kanak du gouvernement territorial et, finalement, le premier député kanak de la nation.

Une histoire dans la grande

La contextualisation de ce parcours dans l’histoire calédonienne – l’indigénat, l’arrivée des Américains, l’ouverture du droit de vote, l’engagement pour l’égalité des salaires et la création de l’Union calédonienne avec des Européens, l’évolution du parti modéré vers un engagement de plus en plus marqué en faveur de l’indépendance par une impulsion de la jeunesse – est nourrie d’images d’archives très intéressantes et d’interviews de ceux qui l’ont côtoyé (Roch Wamytan et d’autres descendants, Jean-Claude Bonnevie, Jean- Pierre Aïfa…)

Ce film est le premier à être consacré à cet homme et c’est en soit important, même trente ans après. L’histoire et ses hommes doivent être connus des plus jeunes. Il offre, en outre, un contraste saisissant avec la période que nous vivons aujourd’hui : les divisions n’ont jamais semblé aussi profondes. On peut regretter cependant que Roch Pidjot reste assez lointain, inaccessible. On ne l’entend pas ou peu. On sait simplement que c’était un homme discret qui « écoutait beaucoup » et qui a profondément marqué son entourage par son « charisme », sa « droiture », et sa « dignité ». Par ailleurs, le documentaire n’offre qu’une vision parcellaire du contexte politique de l’époque et survole carrément son parcours de député. Au final, à notre sens, il s’agit plutôt d’un résumé pédagogique, plutôt qu’une œuvre accomplie et profonde. Mais il doit être bien compliqué de condenser 50 ans d’engagement politique en 50 minutes.

C.M.

©DR/NC 1ere