Un chantier naval à Numbo

La zone qui accueille une vingtaine d’entreprises navales devrait être agrémentée de nouvelles infrastructures pour accroître ses activités. Il s’agit du premier volet du futur « pôle maritime », prévu en plusieurs lieux de Nouméa pour développer l’économie bleue.

La Nouvelle-Calédonie va-t-elle faire de la mer une véritable richesse, au même titre que le nickel ? C’est en substance l’ambition portée par le Cluster maritime, regroupant une centaine de structures et représentant 3 000 emplois.

Après un long travail de sensibilisation auprès des autorités, six Journées de la mer et la réalisation du Livre bleu (2020), le secteur semble avoir convaincu les autorités de tout son potentiel. Lundi 19 septembre, le gouvernement, le haut-commissariat, la province Sud et les représentants de la profession ont dévoilé leur projet de « pôle maritime » reposant sur un partenariat public-privé.

Dépolluer Numbo

La baie de Numbo, moins engorgée que Nouville, devrait accueillir les infrastructures portuaires qui font défaut pour la maintenance des plus gros navires, minéraliers ou militaires par exemple (comme les nouveaux P400) : une aire de carénage à flot, des moyens de levage, une zone d’amarrage à flot, de stockage pour l’hivernage cyclonique. Un quai et un terre-plein seront construits sur du foncier public.

La maîtrise d’ouvrage pour les premiers travaux a été confiée à la Secal. Il s’agira de la dépollution de la baie avec l’enlèvement de 21 épaves et de 45 corps-morts ou objets encombrants. La ville de Nouméa retirera aussi tous les véhicules hors d’usage à terre et des opérations de valorisation et de signalétique sont programmées.

Cette phase se fera en 2022-2023. Les travaux d’aménagement (réfection de la mise à l’eau, quai de levage et de travail, organisation du mouillage) sont prévus pour 2023-2024.

Grande et petite rade

Outre la revalorisation de Port Numbo, les partenaires ont des ambitions pour d’autres zones. Nouville, qui accueille l’Université, l’École des métiers de la mer et la Station N, deviendrait le pôle « formation » avec une Cité de la connaissance (2025).

Quant à la petite rade, elle accueillerait du côté de l’actuelle cale de halage de Nouville, un Port Cook (2025), une zone dédiée à l’activité de grande plaisance et un Quai des scientifiques (2026) pour les navires de recherche.

On trouverait en face à Port-Moselle, une autre base de grande plaisance et au nord un plus grand terminal de croisière (2025), tout cela formant un pôle « tourisme » qui comprendrait aussi le village océanien (2023).

Chloé Maingourd

Photo : Le projet de Numbo est évalué pour l’heure à 325 millions de francs sur trois ans, financés par l’État et la Nouvelle-Calédonie. Il comprend la dépollution de la baie et les études de faisabilité des infrastructures. / C.M.

 

CE QU’ILS EN DISENT

Philippe Darasson, président du Cluster maritime

« La mutualisation des moyens pour s’assurer une rentabilité était une recommandation forte. Pour l’heure, l’activité de maintenance concerne la plaisance avec des bateaux jusqu’à 40, 50 tonnes sur Nouville ou Numbo : là, on parle de moyens beaucoup plus importants. »

Luc Sorlain, responsable du groupe synergie Numbo

« Ce qui est vraiment rageant, c’est de voir des bateaux qui partent à l’étranger se faire caréner alors que ce sont des travaux tout à fait simples à réaliser. On a les moyens, on a les fournisseurs et on n’est même pas plus chers qu’en Australie, par exemple. »

Lionel Loubersac, co-fondateur du Cluster maritime

« La connaissance du Pacifique va devenir une nécessité. Un pôle technologique permettrait d’attirer les navires scientifiques. Nous avons récemment eu un navire allemand avec cette question : où est-ce qu’on le met ? Et l’Océanos- cope permettrait de faire connaître la mer et ses métiers, notamment aux enfants. »

Christopher Gygès, membre du gouvernement chargé de l’économie de la mer

« C’est potentiellement une vraie ressource pour l’économie, intéressante en cette période. Je
vais rencontrer le ministre de la Mer à Paris et le président du Cluster maritime France pour trouver des sources de financement complémen- taires, nationales ou européennes. L’idée est de mettre en place une planification de finance- ment pour 10 ans avec les quatre collectivités. »

Patrice Faure, haut-commissaire

« Tout a été conçu pour qu’il y ait une cohérence entre les besoins et les moyens. Cela peut être la déconstruction des patrouilleurs P400, l’accueil de nouveaux navires, le développement de formations pour le territoire et les pays voisins de Papouasie-Nouvelle-Guinée, du Vanuatu, de la Micronésie, des Fidji. »

Françoise Suve, province Sud

« Il y a 27 000 bateaux de plaisance et 6000 en fin de vie. Il faut s’en occuper. La province a lancé un chantier test de démantèlement de 16 bateaux avec six emplois à la clé. 60 tonnes de matériau ont été récupérées dont la plus grande partie a été recyclée. La collectivité s’est engagée à réglementer cette filière l’année prochaine. »