Un bilan de la qualité de l’air 2018 en demi-teinte

L’association Scal’air a récemment publié son rapport sur la qualité de l’air en 2018. Un rapport consultable sur le site de l’association qui présente l’importante activité de Scal’air, ainsi que les principaux résultats de ses campagnes de mesure de la qualité de l’air. Si la situation est loin d’être catastrophique, certaines mesures posent question.

Bonne nouvelle pour Scal’air. L’association qui a pour mission de mesurer la qualité de l’air sur Nouméa et le site industriel de Vale jouit d’une bonne image et d’un sérieux auprès de la population. L’association se posait bien la question depuis plusieurs années et a pu obtenir une réponse au travers d’une enquête d’opinion réalisée en 2018. Une bonne image à laquelle, les quelque 500 personnes interrogées ont associé la crédibilité et le sérieux. Souvent critiquée dans l’espace public, l’association redoutait qu’on la taxe d’être chargée de défendre les intérêts des industriels. Les sondés ont estimé à 61 % d’entre eux que l’association est impartiale et objective.

En matière de qualité de l’air, les résultats présentés dans le rapport annuel ne sont pas franchement mauvais puisque l’indice Atmo, qui évalue la qualité de l’air sur Nouméa, est bon à très bon 94,4 % du temps. Un chiffre plutôt satisfaisant qui masque toutefois des disparités et des problèmes si l’on regarde plus dans le détail. C’est tout particulièrement le cas de la concentration en nickel enregistrée sur la plupart des stations de mesures nouméennes. Alors que le seuil (norme allemande TA Luft de 2002) est de 15 μg/m2 et par jour, l’association a pu enregistrer des valeurs telles que 134,87 μg/m2/j sur Montravel, 112,86 μg/m2/j au Faubourg-Blanchot et, pire, de 286,63 μg/m2/j à Logicoop. Même l’Anse-Vata est concernée puisque les capteurs ont permis d’estimer les retombées de ce métal lourd à 23,08 μg/m2/j. Des résultats qui ne sont pas bons si l’on considère l’impact potentiel du nickel sur la santé humaine.

Paradoxalement, le nickel et plus généralement les métaux lourds avaient été exclus du champ de l’étude épidémiologique, présentée en 2016, et qui avait conduit à l’adoption de la loi sur la qualité de l’air. Une loi qui n’est d’ailleurs toujours pas applicable, faute d’arrêté. Une consultation publique a bien été lancée en février dernier, sans qu’elle soit suivie de l’adoption des arrêtés soumis à l’avis des citoyens. Pour rappel, les arrêtés proposés couvrent uniquement les trois opérateurs industriels : KNS, la SLN et Vale NC. Ils leur imposent des dispositifs de surveillance et de mesure de la qualité de l’air. Rien, en revanche, n’est prévu pour le trafic routier, une des premières sources de pollution atmosphérique sur le Grand Nouméa.

Des études à compléter

Le sujet est loin d’être anodin et est particulièrement d’actualité. En Métropole, une mère et sa fille viennent de saisir le tribunal administratif pour faire condamner l’État à leur verser une indemnisation de 160 000 euros (20 millions de francs) pour « carence fautive ». Les deux femmes souffrent toutes les deux de pathologies respiratoires importantes et réclament une indemnisation à l’État qui n’a pas su mettre en place de dispositifs permettant de limiter les pollutions à l’origine de leurs symptômes. Sur le territoire, l’étude épidémiologique présentée en 2016 ainsi que l’étude Metexpo, financée par le CNRT nickel et son environnement, ont démontré que les Calédoniens était exposés au nickel. Les deux études n’ont, en revanche, pas examiné les conséquences sanitaires de cette exposition, autrement dit, les maladies que développent potentiellement les personnes en contact avec le nickel. Un travail d’autant plus important que le rapport montre une forte concentration en nickel dans les PM10, ces petites particules qui pénètrent facilement dans l’appareil respiratoire.

Les mesures montrent également des émissions importantes de dioxyde de soufre ou de dioxyde d’azote, particules émises lors de la combustion de matières fossiles comme le charbon ou le fuel. Si la SLN est souvent pointée du doigt comme l’une des principales sources de pollution au SO2, le trafic routier l’est en fait davantage, tout comme pour le NO2. Pour les NO2, Scal’air a enregistré au niveau du rond-point Berthelot des résultats proches de la valeur limite. L’émission de ces particules est tout particulièrement problématique sur le site de l’usine du Sud où elles ont un impact reconnu sur la flore voisine, rare et sensible. La moyenne annuelle d’émission de SO2 au niveau de l’usine et des utilités était, par exemple, deux fois supérieure au niveau d’émission critique pour la végétation. Le rapport, ainsi que les autres publications et rapports de l’association, est consultable dans son intégralité sur www.scalair.nc

M.D.