Transformer le gaz des déchets en électricité

Un système de drains inséré dans le massif de déchets permet de capter le gaz et de l’acheminer vers la centrale. / © A.-C.P.

Le gaz émis par les déchets enfouis à l’installation de stockage des déchets (ISD) de Gadji, à Païta, va être converti en énergie grâce à la mise en service de la première centrale biogaz de Nouvelle-Calédonie, prévue en mai prochain.

Aujourd’hui, le gaz naturellement issu de la fermentation des déchets organiques enfouis à l’ISD de Gadji est rejeté dans l’air. Cela sera bientôt du passé, avec le lancement de la centrale biogaz prévu en mai 2024. Une première en Nouvelle-Calédonie. L’électricité produite viendra alimenter le réseau de distribution publique.

Ce projet d’énergie renouvelable, autorisé en 2019, est porté par trois partenaires : Enercal Énergies Nouvelles (EEN), filiale d’Enercal, la société Winéo et Katchii 2, qui représente les quatre tribus de Païta (Bangou, Saint-Laurent, Naniouni et N’Dé). Après trois années d’études, la construction de Gadji Énergie doit commencer dans les jours à venir.

Le procédé

Le gaz émis lors de la fermentation des déchets est actuellement brûlé avant d’être évacué dans l’air. Or, il
se compose de méthane et de dioxyde de carbone, des gaz à effet de serre.

Avec la centrale biogaz, le gaz collecté sera filtré et déshumidifié puis dirigé vers un moteur. Ce dernier entraînera un alternateur qui convertira l’énergie mécanique en électricité.

 

Elle participera à valoriser les 150 000 tonnes de déchets non dangereux reçus à l’ISD chaque année. Même après la fin de l’exploitation du site, annoncée en 2037, la centrale pourra continuer de fonctionner. « Le gisement a un potentiel de durée de 25 ans, parce que la fermentation se poursuit au-delà de l’enfouissement du dernier kilo de déchets », explique Jean-Gabriel Faget, directeur général d’Enercal.

Nicolas Cazé, directeur d’Enercal Énergies Nouvelles, et Philippe Scornet, gérant de Winéo, ont posé la première pierre symbolique de la future centrale biogaz de Gadji, mardi 1er août. Son exploitation
va générer la création de deux ou trois emplois. / © A.-C.P.

UNE PRODUCTION GARANTIE

La centrale permettra de créer de l’électricité en continu, jour et nuit, et de limiter les émissions de gaz à effet de serre. Il s’agit de « valoriser au mieux les déchets qu’on continue de produire », souligne Emmanuel Récamier, directeur du Syndicat intercom- munal du Grand Nouméa (SIGN). « Il y a beaucoup de solaire, un peu d’éolien, et là du biogaz, cela favorise la diversification des sources d’énergie », souligne Christopher Gygès, membre du gouvernement en charge de la transition énergétique.

Pourrait-on en voir apparaître d’autres ? Pas pour l’instant. Gadji Énergie risque de rester la seule du genre, en raison de la taille du territoire. « La population du Grand Nouméa ne génèrera pas, et heureusement, de déchets ménagers susceptibles d’imaginer une deuxième installation comme celle-là, affirme Jean-Gabriel Faget. Son dimensionnement correspond aux perspectives. »

14 FRANCS LE KWH

Le prix estimé du kilowattheure devrait être de 14 francs. Plus élevé que celui du photovoltaïque, autour de 6 francs. « Le revers de la médaille, avec le photovoltaïque, poursuit le directeur général d’Enercal, c’est que la période de production est limitée à l’ensoleillement, ce qui nécessite des installations de stockage. En considérant l’ensemble, on arrive à peu près au même niveau, aux alentours de 16 francs. »

En chiffres

La production estimée de la centrale biogaz est de 8 millions de kilowattheures, ce qui équivaut à la consommation de 2 400 foyers. Cela correspond à + 3 % d’énergie renouvelable pour la distribution publique et permettra d’éviter le rejet d’environ 6 000 tonnes de CO2 par an. Le projet représente un investissement de 350 millions de francs.

Jean-Gabriel Faget est clair. Qui dit énergie renouvelable ne dit pas forcément moins cher. « Le bénéfice, c’est une dépendance moindre aux importations et un risque moindre par rapport à la volatilité des prix. » Les conséquences de la guerre en Ukraine ont renchéri le système électrique calédonien d’à peu près 9 milliards de francs. « C’est une vraie difficulté. » Jean-Gabriel Faget en appelle à un usage modéré de l’énergie en général. « On doit orienter les politiques publiques vers le renouvelable, mais surtout vers les économies d’énergie. »

Anne-Claire Pophillat