Thierry Ihage, engagé pour le Pacifique

« Une chance », « un honneur » de s’être entretenu avec Antoine Kombouaré. Thierry Ihage ne l’aurait jamais imaginé. (© Nakupa.média)

Sa passion pour l’information l’a mené de Luecila à Bordeaux. Aujourd’hui en master journalisme, Thierry Ihage vient de créer Nakupa.média et part à la rencontre de jeunes du pays partis poursuivre leur rêve. Comme lui.

« Cette flamme » l’habite depuis l’école primaire. Elle l’a porté de Luecila, à Lifou, jusqu’à Bordeaux, après un bac littéraire au lycée Lapérouse et une licence de lettres modernes à l’UNC. Ce goût prononcé pour l’information. La rechercher, puis la « transmettre à tout le monde », cette sensation de « savoir que c’est toi qui as ce devoir d’informer ».

Thierry Ihage n’a pas attendu pour s’exercer à son futur métier. Quoi de mieux que de créer son propre support ? Ce sera Nakupa.média, aux côtés de Robert Kakue, « passionné par le Pacifique », et Jean-Brice Hnacipan, photographe-vidéaste – « on est cousins ». Si les deux derniers résident à Nouméa, le premier se forme au journalisme dans l’Hexagone. « C’est mon rêve, j’ai toujours voulu faire ça. »

Il aime « analyser, décrypter ». Un rôle d’autant plus important avec les réseaux sociaux. « Il faut trier le vrai du faux. » Et puis, il y a les rencontres et les voyages. « Être présent à n’importe quel endroit à n’importe quel moment afin de recueillir l’info. Je vois vraiment la profession comme une aventure. »

VOLLEYEUSE, DANSEURS ET SAGE-FEMME

Poussé par une nature curieuse et une « âme artistique » et créative, Thierry Ihage se nourrit de ces influences. Touche-à-tout, il danse, chante, dessine, écrit des musiques, des poèmes. « J’aime bien m’exprimer. » Pour Nakupa, il utilise deux autres de ses compétences : la photographie et la vidéo. Il se lance en mars avec une visite du Salon de l’agriculture, à Paris, s’arrête pour tester les rhums antillais et dévoiler le stand calédonien.

Taïmoanna Nena est arrivée en Métropole il y a quelques mois pour poursuivre sa formation de sage-femme. Elle partage un bout de sa vie sur Nakupa. (© Thierry Ihage)

Depuis, Thierry Ihage a suivi Maëlyss Muliava, étudiante en biologie et volleyeuse de haut niveau, Taïmoanna Nena, originaire d’Ouvéa partie à Bordeaux pour des études de sage-femme, et Lahmanagoj Menango et Pascal Wadriako, deux danseurs qui ont quitté le Rex à Nouméa pour le dock de répétition de la compagnie Pokemon Crew à Lyon, « le crew de breakdance le plus titré au monde ».

Parfois, la caméra se pose en Nouvelle-Calédonie. Dans l’atelier du sculpteur Ricardo Poiwi, à La Foa. À la réalisation, cette fois, Jean-Brice Hnacipan. Ou à côté de Teva, leader du groupe de musique tahitienne Pakahua, le « portrait d’un Pasifika qui rêve d’une Océanie unifiée ». Puis elle retourne dans l’Hexagone pour recueillir le – rare – témoignage d’Antoine Kombouaré, entraîneur des Canaris, la veille de la finale (perdue) de la Coupe de France.

CAPACITÉ D’ADAPTATION

C’est l’essence même de Nakupa. « On veut mettre en avant la capacité qu’ont les Pasifika, les ressortissants des îles du Pacifique, à s’adapter dans d’autres situations à travers le monde. » Partager les parcours « de personnes atypiques » qui réussissent. « On a envie de montrer, dans les interviews, les jeunes et leurs motivations afin de donner, recevoir et transmettre aux générations futures. Ce sont les trois valeurs de Nakupa. » Et ainsi, peut-être, les aider en leur donnant des réponses sur les filières qui pourraient les intéresser.

Sûrement inspiré par son vécu. Comme ses invités, Thierry Ihage a choisi de vivre loin des siens pour réaliser son objectif. Cela donne une proximité avec les interviewés qui les incite sans doute à se livrer. Des témoignages d’amis qui l’« encouragent » et le « suivent » dans son projet.

Thierry Ihage « préfère être derrière l’objectif » plutôt que devant. Il habite à Bordeaux pour ses études. (© DR)

« TOUTE EXPÉRIENCE EST BONNE À PRENDRE »

Le futur journaliste ne compte pas s’arrêter là. « On travaille à développer le contenu, apporter de nouvelles idées, de nouveaux formats vidéo. » Preuve avec celle postée jeudi 25 mai, en mode reportage sur une mission d’études sur le transport scolaire de Ponérihouen.

Nakupa a vocation à grandir et se diversifier. « On a créé ce projet avec la volonté de devenir un média de référence dans le Pacifique. » Et si ça ne marche pas ? Peu importe. L’important, c’est de participer. « On ne sait pas si on va y arriver, mais on a qu’une seule vie : toute expérience est bonne à prendre, surtout quand on est jeunes. »

La suite, c’est les études. Étudiant en master, il prépare les concours d’entrée aux écoles de journalisme. Avant de revenir. « Je compte bien être journaliste ici après l’obtention de mon diplôme. » Mais Thierry Ihage n’est pas pressé. Même si le territoire lui « manque énormément. Il n’y a pas un seul jour où je ne pense à la famille, aux amis ».

Une image positive qui lui rappelle pourquoi il a parcouru tout ce chemin. « La chance que j’ai de vivre tout ça, d’explorer, d’apprendre, de découvrir des cultures, des paysages, des modes de vie différents. » Pour ramener au pays tout ce qu’il aura appris, fort de cette richesse.

Anne-Claire Pophillat

LE +
Nakupa signifie « nature et culture du Pacifique ». Nakupa.média (sur Facebook) est lié à Nakupa Shop, dont Robert Kakue est le cofondateur. Il s’agit d’une plateforme de vente en ligne qui met en relation les consommateurs, les créateurs et les producteurs de produits naturels et artisanaux.