Stopper l’alcoolisme : Et si c’était une question de neurones ?

Alors que l’on s’apprête à célébrer la Journée de la bière, le 5 août, des chercheurs avancent que sept cancers seraient directement liés à la consommation d’alcool. Pendant ce temps, des scientifiques redonnent espoir à tous ceux qui cherchent à s’en sortir. Ils viennent de découvrir que notre organisme possède des neurones de la sobriété. Explications.

Ce n’est pas un secret : la consommation d’alcool à haute dose a des effets dramatiques sur la santé et pas uniquement sur le foie. Une récente étude, publiée dans la revue scientifique Addiction, dévoile que la consommation d’alcool augmente les risques de cancer du foie, bien sûr, mais aussi du sein, du colon, de l’œsophage, du larynx, de l’oropharynx et du rectum. Jennie Connor, auteure de l’étude, a compilé plus de 10 ans de données pour en venir à cette grave conclusion. « Tout le monde est concerné, que l’on soit un homme ou une femme, que l’on consomme de l’alcool régulièrement ou de façon modérée. Même si bien sûr, plus la consommation est importante, plus les conséquences le seront également », précise-t-elle.

Tout le corps est touché

Selon cette étude, d’autres parties du corps humain peuvent être touchées par un cancer, même dans une moindre mesure : la peau, la prostate ou le pancréas. Ainsi, sur un panel de 500 000 personnes, les consommateurs modérés, voire faibles, doivent également rester très attentifs. Les femmes qui ne boivent qu’un à deux verres par semaine sont tout de même 5 % plus à risque de cancer que les abstinentes. Cette menace est toutefois réversible, Jennie Connor avance « qu’arrêter de boire réduit de 15 % la probabilité de développer un cancer à cinq ans. Après 30 ans de sevrage, le surrisque disparaît. Un mécanisme de ce lien qui reste à déterminer », précise tout de même la chercheuse. En effet, l’alcool n’est pas directement cancérigène. Des études chez l’être humain ont suggéré qu’il pouvait provoquer des mutations. Mais ces preuves sont assez peu solides. S’agirait-il alors d’une question de neurones ? On y vient.

Les neurones de la sobriété

Pour aller dans ce sens, une équipe de chercheurs américains vient justement d’identifier des neurones qui poussent à l’excès d’alcool et d’autres qui, au contraire, découragent de prendre un autre verre. « En activant certains neurones, nous pouvons influer sur la consommation d’alcool », résument des scientifiques de l’université du Texas. Ils ont démontré, avec des expériences menées sur des souris, qu’une zone du cerveau appelée striatum dorsal (faisant partie du circuit de la prise de décision), était directement liée dans la consommation de l’alcool. En allant plus loin, ils ont confirmé que des neurones D1 étaient directement impliqués dans la consommation excessive d’alcool, et que leurs antagonistes, les neurones D2, la stoppent.

« Du point de vue de la dépendance et de la toxicomanie, les neurones D2 ont une action positive, explique le Dr Jun Wang, auteur principal de l’étude. Quand ils sont activés, ils inhibent le comportement de consommation répétée et jouent ainsi un rôle de prévention de l’abus d’alcool. » Partant de cette découverte et si le mécanisme est identique chez l’homme, les neurones D2 pourraient encourager les personnes alcooliques à stopper leur consommation. Une belle découverte même si l’on est encore loin des tests chez l’homme. Les auteurs de cette étude restent convaincus qu’il sera un jour possible de stimuler les neurones D2, soit par médicament, soit par stimulation électrique, afin de traiter l’alcoolisme. Une belle avancée…


L’alcool et les Calédoniens

Selon les services de santé, plus d’une personne sur quatre a une consommation nocive d’alcool responsable de complications sociales et sanitaires. La moitié des consommateurs sont réguliers. 12 % sont ivres dans la semaine, 18 % dans l’année avec une moyenne de 22 « cuites » par an. La consommation moyenne pour les buveurs du week-end qui conduisent est de 6,5 verres standard, soit trois fois la dose tolérée par la loi. Seuls 30 % limitent leur consommation pour conduire. Quatre buveurs sur dix consomment également du cannabis et du kava. Concernant les jeunes, 10 % déclarent avoir vécu leur première « cuite » avant 13 ans. 52 jeunes sur 100 interrogés déclarent avoir été ivres au cours des 30 derniers jours.


Les dangers de l’alcool

On estime que l’alcool est responsable chaque année de 40 000 décès en France. L’alcool n’est pas digéré, il passe directement du tube digestif aux vaisseaux sanguins et, en quelques minutes, se transporte dans toutes les parties de l’organisme. Il provoque, à des doses importantes, un état d’ivresse, entraîne des troubles digestifs, des nausées, des vomissements. À long terme, la consommation excessive et régulière (au-delà de deux à trois verres par jour) augmente le risque de pathologies comme les cancers (bouche, gorge, œsophage, maladies du foie et du pancréas, troubles cardiovasculaires, hypertension, maladies du système nerveux et troubles psychologiques (anxiété, dépression, troubles du comportement).

C.S. 

Crédit AFP