Scal’Air a fixé son cap pour les cinq prochaines années

L’association de surveillance de la qualité de l’air à Nouméa et dans le Sud vient d’adopter son plan de surveillance de la qualité de l’air pour les cinq prochaines années. Parmi les grandes nouveautés de ce PSQA, la prévision devrait faire son apparition dès le début d’année 2019. L’association devrait par ailleurs devenir un acteur incontournable sur la qualité de l’air avec la mise en œuvre prochaine de la loi sur cette question.

Plusieurs mois de travail auront été nécessaires pour aboutir à ce nouveau PSQA. L’association Scal’Air, créée en 2006, a réuni l’ensemble de ses partenaires et administrateurs pour tirer le bilan de ces cinq dernières années afin de construire ce nouveau plan de surveillance de la qualité de l’air. Trois ateliers de concertation auront notamment permis de définir ce plan qui s’articule autour de cinq axes et fixe 17 grands objectifs pour cinquante actions.

Le nouveau PSQA, qui couvrira la période 2018-2022, s’inscrit dans la logique de l’histoire de l’association, initiée en réaction aux importants pics de pollution de l’air générés par l’industrie et le trafic routier sur Nouméa. Si les années 2014 et 2015 avaient été relativement bonnes avec seulement quatre à cinq dépassements, selon Nina Julié, la présidente du conseil d’administration, cela n’a pas été le cas de 2016 où les mesures ont mis en lumière 42 dépassements des valeurs de référence, concernant particulièrement les émissions de soufre.

Face à l’important trafic et une pollution chronique liée à l’industrie, il n’existe pourtant qu’une seule et unique étude épidémiologique commandée par les collectivités permettant d’évaluer leur impact sur la santé publique. Un impact pourtant significatif sur la santé humaine, en particulier celle des enfants. Et les choses ne vont pas s’arranger tout de suite. La centrale au fuel de Doniambo ne sera pas remplacée avant 2022, une étude dans le cadre du chantier de Néobus a montré que le trafic routier allait encore augmenter

La CCI, qui gère l’aéroport de la Tontouta depuis cinquante ans, entend montrer un autre visage. Avec plusieurs projets d’envergure, le gestionnaire a pour objectif un label international, gage du respect de l’environnement et preuve de son expertise en la matière.

de 100 000 déplacements par jour à l’horizon 2020 et le nombre de paquebots de croisière va s’accroître de manière importante dans les années à venir. Sans parler du développement industriel sur Nouméa qui génère toujours plus de poussières et de particules fines.

Asseoir la place de l’association au niveau territorial

Dans ce contexte, les missions de Scal’Air de mesurer, surveiller et informer le public prennent tout leur sens, d’autant plus que le 11 janvier dernier, le Congrès a adopté une délibération sur la qualité de l’air fixant un cadre légal introduisant l’obligation d’agrément pour les structures mesurant la qualité de l’air, ainsi que les conditions d’information de la population. L’enjeu de cette loi n’est rien de moins que la santé des Calédoniens, potentiellement exposés à des pollutions de l’air. L’association se pose naturellement comme un acteur incontournable, notamment grâce à son expertise acquise pendant sa dizaine d’années d’activités opérationnelles et son appartenance au réseau d’associations françaises Atmo.

Mais avant cela, il faut encore que le gouvernement adopte les arrêtés d’application indispensables à la mise en œuvre de cette nouvelle réglementation. La Direction de l’industrie, des mines et de l’énergie a « promis » qu’ils seraient prêts d’ici juin. Pour l’administration, il s’agit d’un gros travail puisque les arrêtés vont pour la première fois fixer des normes réglementaires calédoniennes en matière d’émissions.

Plus difficile encore, les agents de la Dimenc vont devoir réaliser un cadastre des sources d’émissions polluantes qui permettra de voir quelles sont les zones à surveiller. Si l’on s’est longtemps concentrer sur les pollutions de la métallurgie, c’est loin d’être l’unique source. Cette évolution permettra à Scal’Air d’envisager un développement sur l’ensemble du territoire, pour peu que l’association obtienne l’agrément du gouvernement. La qualité de ses mesures qui suivent la réglementation européenne et leur fiabilité laissent à penser à l’association qu’elle y parviendra.

S’attaquer à de nouvelles problématiques

Scal’Air entend aussi diversifier ses activités. Elle proposera en particulier un bulletin prévisionnel à partir de janvier 2019. Contrairement à aujourd’hui où, au mieux, les Calédoniens sont informés en temps réel des dépassements, notamment grâce au site internet de l’association et un dispositif d’alerte par SMS (les inscriptions peuvent être réalisées sur le site internet de Scal’Air), un bulletin sera diffusé à la télévision et donnera les prévisions pour le lendemain et le surlendemain. Pour y parvenir la structure a eu besoin d’accumuler un grand nombre de données, mais aussi d’apprendre à maîtriser un logiciel adapté acquis en 2013. Un formateur était présent il y a encore quelques jours afin de former le personnel à son utilisation. Mais il reste encore à mettre en place certains protocoles pour récolter des données de façon routinière.

Au registre des nouvelles activités, Scal’Air va également traiter de nouvelles thématiques comme les paquebots de croisière, très gros émetteurs de pollution. Un travail a été engagé avec des associations du réseau Atmo et notamment Air Paca et Air Corse, déjà confrontée à cette question. Un protocole de mesures devrait être proposé d’ici la fin de l’année et la modélisation utilisée pour la prévision aidera à déterminer où il conviendra de mesurer.

La problématique de l’air intérieur, dont la qualité est prise très au sérieux en Métropole, sera une autre préoccupation de la structure qui a déjà commencé à sensibiliser le public autour de cette thématique. Une loi oblige notamment de surveiller la qualité de l’air des établissements recevant du public, comme les crèches, par exemple. De nouveaux appareils permettant de mesurer la qualité de l’air intérieur et accessibles aux particuliers montrent clairement l’ampleur de la problématique tout particulièrement liée à l’omniprésence de produits chimiques nocifs dans notre environnement.

Autant de dossiers qui nécessiteront de nouveaux moyens. Pour cela, l’association compte sur la mise en œuvre de la nouvelle réglementation ainsi que le développement des partenariats. Comme le souligne Alexandra Pasco, la directrice de Scal’Air, la structure est de plus en plus sollicitée, notamment par des collectivités. Mais c’est de manière très ouverte que les choses sont envisagées, qu’il s’agisse de partenaires du monde de la recherche, des collectivités, des chambres consulaires et, bien sûr, du privé. Les partenariats n’auront pas uniquement un but financier, notamment avec le monde de la recherche. L’idée est de pouvoir travailler avec d’autres spécialistes disposant de données sur des sujets connexes.


Un travail auprès du public

Scal’Air a conscience du besoin de communiquer. Parce que cela fait partie de ses missions, mais aussi afin de soigner son image. Pour certains, les productions de l’association ne sont pas sincères et servent les intérêts de la SLN. Scal’Air s’en défend énergiquement assurant que ses protocoles respectent les normes européennes et sont soumis au contrôle de son conseil d’administration composé des industriels comme la SLN, Vale ou Enercal, mais aussi des collectivités telles que le gouvernement, la province Sud ou la mairie de Nouméa, d’organismes membres d’honneur ou de droit (Œil, Ademe, Météo France) et surtout d’associations représentant les usagers comme l’UFC-Que choisir, Action Biosphère ou encore un médecin.

Après onze ans d’activité, l’association va également faire auditer de manière indépendante son réseau de surveillance. Une enquête de notoriété va être effectuée afin de savoir ce que les gens attendent de l’association, mais aussi ce qu’ils en pensent.

En matière de sensibilisation, l’association va essayer d’être davantage présente sur le terrain. Elle reçoit de plus en plus de scolaires, notamment du fait que la qualité de l’air est au programme de cinquième. La rénovation de la station de l’Anse-Vata a été l’occasion de l’agrandir afin de mieux recevoir ce public et lui expliquer les activités de l’association.

M.D.