Ruamm : la Cafat donne ses chiffres

Patrick Dupont, président du conseil d'administration (au centre) de la Cafat et Xavier Martin, directeur (à droite). / © A.-C.P

Le conseil d’administration a fait une mise au point sur le coût estimé de deux mesures dénoncées par Les Loyalistes et Le Rassemblement comme étant de nature à mettre le Ruamm « en faillite », lors d’une conférence de presse lundi 13 novembre.

Ce n’est pas dans leur habitude de s’exprimer publiquement. Pourtant, lundi 13 novembre, les administrateurs de la Cafat ont réagi aux propos tenus par des élus Loyalistes et Rassemblement lors d’une conférence de presse le 2 novembre. « Certains se sont permis de faire des simulations sur la base d’hypothèses qui n’ont pas été discutées avec nous, donc on s’est dit que cela paraissait logique et transparent de présenter les nôtres au public », introduit Patrick Dupont, président du conseil d’administration. Deux points ont particulièrement « surpris ».

 

 

D’abord, les attaques envers les services, qu’ils jugent « inadmissibles ». « On ne peut pas laisser dire ce genre de choses, ce n’est pas acceptable », considère Jean-Pierre Kabar, vice-président du conseil d’administration, pour qui la Cafat n’a pas à faire les frais des bagarres politiques. « Les guéguerres en tous sens, notamment sur le sujet du Ruamm, n’ont pas à atterrir ici. »

UN TRAVAIL « D’ANALYSE »

Et puis, surtout, les chiffres annoncés concernant l’estimation du surcoût engendré par la mise en place de deux mesures dans le cadre de la réforme : l’extension de la garantie prestations espèces et la réduction du délai de carence de 11 à 1 jour. Virginie Ruffenach et Gil Brial l’évaluaient entre 3 et 5 milliards de francs. Un montant bien loin de celui présenté par les administrateurs. D’après les calculs réalisés par les services, le surcoût s’élèverait plutôt entre 583 et 729 millions de francs. « Cela nécessite un vrai travail d’analyse et ne se fait pas sur un coin de table en manipulant deux ou trois chiffres », commente Patrick Dupont.

Qu’en serait-il d’éventuels effets d’aubaines mentionnés par Virginie Ruffenach ? Sonia Critg, membre du CA, imagine mal comment les indemnisations versées en cas d’arrêt maladie, c’est-à-dire 50 % des revenus journaliers, pourraient favoriser les abus. « Et puis vous avez des clients, vous savez que si vous ne répondez pas, vous ne les revoyez plus. Je ne vois pas une quelconque dérive, mais une sécurité a minima nécessaire. » Le directeur de la Cafat, Xavier Martin, rappelle que la durée moyenne d’un arrêt maladie chez les travailleurs indépendants est de 95 jours, « ce qui veut dire qu’ils s’arrêtent vraiment de travailler quand ils ne peuvent plus se lever ».

UN CHANTIER QUI NE PEUT ATTENDRE

Si les administrateurs ne peuvent donner leur avis sur la réforme, ils se retrouvent autour d’une idée commune : il est plus que temps de changer le fonctionnement du régime. « Une seule proposition ne va pas tout résoudre, mais ce n’est pas pour ça qu’il ne faut pas la faire. Il faut une addition de réformes, et celle-là en fait partie », estime Jean-Pierre Kabar.

À ses côtés, Patrick Dupont évoque d’autres pistes, comme l’augmentation de certaines cotisations, taxes et impôts, en veillant à ce que « ce soit supportable pour les acteurs économiques » et « pour les consommateurs déjà dans une situation compliquée », mais aussi des économies et des mutualisations pour contrôler l’évolution des dépenses. « Il y a un travail important à faire entre les établissements de santé, notamment la clinique et le Médipôle, afin qu’on n’ait pas l’impression, parfois, au niveau du Ruamm, de payer deux fois la même chose. »

 

690 millions de francs

D’après la Cafat, 25 700 travailleurs indépendants exercent en Nouvelle-Calédonie. 60 % d’entre eux cotisent à l’option prestations espèces, soit 15 573. Celle-ci assure des indemnités en cas de maternité, maladie, invalidité et décès. Au total, 690 millions de francs de prestations espèces ont été versées en 2022. La réforme envisage d’étendre ce dispositif à l’ensemble des patentés, c’est-à-dire aux 10 000 qui ne sont pas encore couverts.

 

Plus globalement, il s’agit, selon eux, d’une question sociétale sur le niveau de santé que les politiques souhaitent maintenir pour les Calédoniens, et son organisation. « Il n’est plus l’heure des discordes, que ce soit au travers des réseaux sociaux ou des communiqués de presse, il est temps de travailler tous ensemble », insiste Sonia Critg. Et Christophe Coulson, secrétaire du CA, de conclure : « c’est essentiel et on ne peut plus remettre à demain ».

Anne-Claire Pophillat

 

AGISSONS SOLIDAIRES RÉAGIT

Dans un communiqué, le collectif évoque des chiffres « à la fois contestables et choquants dans le contexte de déficit abyssal du Ruamm ». Agissons solidaires considère que les données de l’étude sont « parcellaires » et que l’évaluation du surcoût engendré par cette réforme est « soumis à caution ». Notamment concernant les chiffres sur les arrêts de travail de moins de 10 jours qui seraient sous-estimés. Pour le collectif, les objectifs prioritaires sont la réduction des dépenses de santé et la recherche de voies de financement soutenables pour le Ruamm. Il demande la tenue de réunions sur ces sujets et la réalisation d’une étude sur les arrêts de travail avant une modification des délais de carence.