« Révolution » dans la fonction publique

Le Congrès de la Nouvelle-Calédonie s’est penché sur la réforme de la fonction publique à l’occasion de la seconde lecture d’un texte de mars 2019. Il a finalement été adopté, non sans difficulté, avec des amendements dont un qui vise à répondre à la problématique du personnel de la MIJ de la province Sud. Une disposition qui ouvre une incertitude juridique et devrait susciter de vives réactions du côté des syndicats.

Six ans. C’est le temps qui aura été nécessaire pour adopter ce texte qui n’est pourtant qu’une partie de la réforme de la fonction publique en Nouvelle- Calédonie. Six ans dont quatre de travail avec les partenaires sociaux. L’Usoenc, la Cogetra et l’USTKE, regroupées en intersyndicale, ont exprimé une vive opposition lors des travaux, notamment sur la question de leur représentativité dans le secteur public, le manque d’évaluation de l’impact financier de la réforme et, surtout, sur la possibilité de recruter des agents contractuels en CDI sans passer le concours, ce qui est contraire « au principe constitutionnel d’égal accès aux emplois publics ».

Un texte qui traduisait déjà une forte concession des syndicats. Il permet, en effet, de répondre à des dispositions inconstitutionnelles du Code du travail calédonien qui excluaient les contractuels de la fonction publique du bénéfice des dispositions des organisations représentatives du personnel. Autrement dit, les contractuels peuvent bénéficier, par exemple, des délégués du personnel. Pour répondre aux obligations légales, les employeurs publics auraient donc dû créer de nouvelles instances, entraînant un coût particulièrement lourd pour les collectivités.

Afin d’éviter cette situation, les partenaires sociaux ont accepté une autre solution permettant de faire évoluer le statut des contractuels qui sont aujourd’hui plus nombreux que les fonctionnaires, soit environ 13 000 pour près de 10 000 fonctionnaires territoriaux et communaux. Sur le fond, la réforme qui a été adoptée à 28 voix pour et 26 contre, va permettre la fusion des différentes fonctions publiques afin de traiter l’ensemble des agents de la même façon. Une disposition qui aura des conséquences budgétaires difficiles à estimer pour les collectivités, notamment en raison de l’absence de données chiffrées de 17 communes sur les 33 que compte la Nouvelle-Calédonie.

Le texte va, par exemple, proposer aux agents contractuels une évolution de carrière avec des changements de poste tout en conservant leur ancienneté. Les agents non titulaires de la fonction publique disposeront désormais des mêmes droits que les fonctionnaires (droit syndical, repos, formation), mais aussi les mêmes devoirs. De manière plus générale, le texte réforme également la représentativité des syndicats.

Un amendement qui pose question

Si les syndicats peuvent se féliciter de l’adoption du texte, toutefois simplement une étape dans la réforme plus globale de la fonction publique, un amendement pourrait bien mettre le feu aux poudres. Afin de répondre à la situation particulière liée à la dissolution de la Mission d’insertion des Jeunes (MIJ) par la province Sud, Sonia Backes a proposé que les agents en CDI puissent être intégrés directement au sein de la fonction publique, sans concours. Une proposition adoptée grâce au soutien de l’UC-FLNKS qui remet en cause le principe constitutionnel d’égalité d’accès à la fonction publique par le biais d’un concours.

La Fédération des fonctionnaires a évoqué un « assassinat » de la fonction publique qui pourrait être à l’origine d’une mobilisation. Comme il a été indiqué au Congrès, cet amendement, qui pose de sérieuses questions quant à l’intérêt des concours, ne devrait être que temporaire, le temps que le membre du gouvernement, Vaimua Muliava, présente au Congrès le nouveau plan d’intégration des non-titulaires dans la fonction publique. L’un des enjeux de l’intégration étant l’équilibre de la caisse de retraite de la fonction publique (CLR) dont les comptes sont dans le rouge, la trésorerie permettant à peine de prendre en charge trois mois de prestations. Cette loi du pays risque donc encore faire parler d’elle dans les semaines à venir.

M.D.