Rester positif en attendant des jours meilleurs

Nos métallurgistes vont mal. Pour faire face à la crise, la SLN et Vale NC doivent réduire drastiquement leurs coûts. Si la SLN en est à négocier un prêt pour lui permettre de passer l’orage, l’usine du Sud a fait de gros progrès en matière d’économies. Reste à savoir si cela est suffisant pour la direction brésilienne qui est au bout de sa patience.

Optimisme. Mardi matin, dans le cadre de sa consultation des métallurgistes et des mineurs, le Medef-NC recevait la direction de Vale NC. Après avoir lancé un plan d’économies drastiques, les responsables de l’usine du Sud affichent un certain optimisme. En début d’année, Daryush Khoshneviss, le directeur général de Vale Nouvelle-Calédonie, indiquait que le coût cash (coût de production hors amortissement des investissements) était de l’ordre de 18 000 dollars la tonne fin 2015.

Après plus de quatre mois de discussions, près de 80 % des principaux contrats de sous-traitance ont été renégociés. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les efforts ont porté leurs fruits puisque le coût cash de l’usine se situe, pour le premier trimestre 2016, à 12 700 dollars la tonne. Une performance en dessous de l’objectif de 13 000 dollars. Reste que Vale NC perd moins d’argent,mais continue d’en perdre (au quatrième trimestre 2015, 107 millions de dollars contre 48 millions au premier trimestre 2016). Au cours actuel, à 12 700 dollars, l’industriel perd 4 000 dollars par tonne produite.

Si cela représente une lueur au bout du tunnel, Vale NC n’est toutefois pas encore tiré d’affaire. La situation du groupe Vale au Brésil est préoccupante et il n’a plus les moyens de financer les pertes de l’usine de Goro, la dernière à perdre de l’argent. La responsable de la branche nickel, Jennifer Maki, a récemment annoncé que le groupe était arrivé au bout de sa patience. Ce qui est vrai, comme le précise le service communication de VNC, même si dans le même temps, Jennifer Maki et Murilo Ferreira, le P-DG de Vale, ont salué les efforts importants des Calédoniens.

VNC doit s’assumer financièrement

Malgré tout, la catastrophe écologique de San Marco, au Brésil, dont Vale est actionnaire pour moitié avec BHP Billiton, pourrait coûter quelques milliards au groupe. Dans ce contexte, la direction a donc de quoi se montrer prudente. Daryush Khoshneviss n’en fait pas de mystère, toutes les options sont sur la table. Vente, fermeture, arrivée d’un nouvel actionnaire… Aucune deadline n’est fixée, en revanche, aucun dérapage ne devrait être toléré.

Le directeur de VNC l’a répété à plusieurs reprises, il faut changer de mentalité, il y va de la survie du projet. Mais quand le directeur parle de changer de mentalité, cela ne signifie pas nécessairement de changer les habitudes des travailleurs, mais bien de modifier la manière de faire des affaires. Autrement dit, les sous-traitants doivent comprendre qu’une entreprise peut être plus profitable avec un chiffre d’affaires moins important. Mais les sous-traitants ne seront pas les seuls à assumer la réduction de la voilure.

Sur les dix milliards de francs de réduction des coûts de fonctionnement, trois seront trouvés en interne. Pour le patron de VNC, ce plan marque la fin du « confort », illustrant son propos avec une métaphore autour de la climatisation. « J’ai un climatiseur dans mon bureau, note Daryush Khoshneviss. Mais a-t-on besoin de l’air conditionné tous les jours ? Et à partir de là, a-t-on besoin de maintenance tous les jours ? L’idée est de trouver l’optimum. »

Pour le Medef-NC qui compte de nombreux adhérents sous-traitants, le rendez-vous était l’occasion de faire le point sur les efforts réalisés et, surtout, de poser de nombreuses questions. L’idée étant de se rassurer et de se donner un peu de visibilité malgré les perspectives plutôt sombres. Selon Daniel Ochida, un des coprésidents de l’organisation patronale, il existe trois options. Soit les cours du nickel remontent d’ici un à deux ans, ce qui représente l’hypothèse positive, soit ils restent au plus bas au moins jusqu’en 2020, ce qui dans ce cas, aurait des conséquences très lourdes pour l’économie calédonienne et probablement sur l’endettement des institutions. La troisième option étant une option prudente selon laquelle les cours repartiraient doucement à la hausse avant 2020.

Le scénario le plus optimiste n’a rien de sûr, bien au contraire. Ils sont bon nombre d’analystes à miser sur une reprise lente, pas seulement du nickel mais de l’ensemble des marchés des métaux. Pour la SLN, la situation ne sera pas simple, en dépit des soutiens déjà affichés de ses actionnaires que sont la STCPI, avec l’aide de l’État, et Eramet. Ne manque plus que le partenaire japonais qui semble peu enclin à mettre la main au porte-monnaie.

Un prêt pour tenir deux ans et après ?

Lors de son conseil d’administration du lundi 9 mai, la direction d’Eramet a validé le déblocage d’un nouveau soutien à hauteur de 40 millions d’euros (4,7 milliards de francs), afin de compléter le prêt de l’État aux trois provinces, selon André Dang, le président de la STCPI. Si les taux et l’échéance du prêt, qui seront âprement négociés, n’ont pas encore été précisés par l’État, la société de portage industriel des provinces pourrait se contenter de 15 milliards sur les 24 proposés par le Premier ministre, Manuel Valls.

Une somme suffisante ? Tout dépendra de l’évolution des cours, mais selon les estimations retenues par la SLN, il lui faudrait 45 milliards pour tenir deux années (les 15 milliards de la STCPI représentent 34 % du montant, soit le niveau participation de la STCPI au capital de la SLN). Une chose est sûre, la situation de l’industriel deviendrait critique si le contexte délétère devait perdurer et encore faudrait-il également que le chantier de la centrale électrique, condition de la survie du Nickel, soit lancé au plus vite.

Au-delà du petit coup de bluff du patron de la SMSP, qui évoquait un courrier du Premier ministre à propos des 51 %, la question de la participation majoritaire au capital de la SLN par les Calédoniens apparaît plutôt déplacée pour le moment. La question étant plutôt de savoir si le plus vieil outil industriel et ses plus de 2 000 emplois survivront à la crise. Nul doute, en revanche, que la gouvernance de la SLN sera au cœur des prochaines discussions sur la stratégie minière entre les élus du Congrès. En dehors d’un outil vieillissant, le Nickel, est, et de loin, le premier domaine minier.

M.D.