Reprise de Vale : Sébastien Lecornu propose une plus forte participation de l’Etat

Le ministre des Outre-mer s’est adressé, lundi soir, aux Calédoniens dans une allocution sur NC La 1ère. Usine du Sud, crise sanitaire, échéances institutionnelles, Sébastien Lecornu a défini avec fermeté la position de l’État et fait des annonces.

L’allocution de Sébastien Lecornu a été ferme, directe et sans ambiguïté. Sur l’usine du Sud tout d’abord, le ministre a immédiatement coupé court aux doutes que pouvaient avoir les Calédoniens après la sollicitation de certains politiques. « La nationalisation de l’usine du Sud n’est pas la solution (…) On ne peut pas brûler une usine, puis demander à l’État de la reprendre. On ne peut pas asphyxier aussi la SLN parce que l’État en est actionnaire, puis demander à l’État de reprendre l’usine du Sud », a-t-il déclaré. Sur la SLN, justement, et sa prise en otage, il s’est voulu très clair : « L’État ne discute pas sous la menace. Ceux qui bloquent la SLN devront répondre des conséquences de leurs actes. »

Message ferme et pourtant, Sébastien Lecornu a poursuivi son allocution en annonçant que l’État était prêt à faire un geste d’ouverture, à « discuter d’une implication plus forte » pour « désormais sortir par le haut de ce conflit ». À deux conditions toutefois, a souligné le ministre des outre-mer : le retour des indépendantistes à la table des négociations et l’instauration d’une clause résolutoire de désengagement de la France de l’usine du Sud si la Nouvelle-Calédonie devenait indépendante. L’État définit donc les règles du jeu, le ministre en profitant pour rappeler que « les responsables politiques qui le souhaitent peuvent toujours venir à Paris, à tout moment, pour échanger directement avec le gouvernement. »

Avenir institutionnel

Sébastien Lecornu s’est aussi rapidement exprimé sur la crise sanitaire liée à la Covid. Rappelant l’arrivée, vendredi sur le territoire, des premiers vaccins, il a confirmé que « l’État accompagnera le gouvernement de la Nouvelle- Calédonie dans la prise en charge du coût de la quatorzaine », selon des modalités qui seront définies ensemble.

Le ministre s’est ensuite attardé sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie et le possible troisième référendum. Pour lui, pas question de faire machine arrière : « Nous ne pouvons plus repousser : l’Accord de Nouméa arrive à son terme en 2022. Le moment des décisions approche. Dans moins de trois mois, le Congrès pourra décider de déclencher le troisième et dernier référendum. » C’est en ce sens que le ministre a fait une annonce. Il s’est engagé à transmettre aux représentants calédoniens un document inédit et complet sur les implications du oui et du non. « Les questions sont nombreuses et vous méritez de savoir : dans l’hypothèse de l’indépendance. Pourrez-vous conserver la nationalité française ? Quelle sera votre monnaie ? Quel serait le modèle économique ? Le modèle fiscal ? Qui remplacera les gendarmes ? Qui rendra les décisions de justice ? Quels seront les droits des minorités, les droits des femmes, les droits des homosexuels ? Avec quels pays de la zone formerez-vous des alliances ? Dans quels pays pourrez-vous étudier demain ? Est-ce que le droit de vote sera ouvert à ceux qui en sont aujourd’hui exclus ? »

Et si la Nouvelle-Calédonie choisit de rester française, « Est-ce qu’il sera possible de choisir l’indépendance dans quelques années ? Qu’est-ce qui doit changer par rapport à aujourd’hui, dans le partage des compétences, dans le partage des richesses ? Que pouvons-nous faire de mieux pour le rééquilibrage ? Pour sauver l’industrie du nickel ? Qu’est-ce que la France peut apporter à la Nouvelle-Calédonie dans cette zone du Pacifique où les tensions montent ? », a-t-il mentionné. Nationalité, monnaie, droits, justice, sécurité, économie, représentativité : tout sera détaillé dans ce document auquel les partis politiques seront appelés à réagir formellement, histoire de ne pas ensuite reprocher à l’État une quelconque manipulation.

Des consultations

Parallèlement à la transmission de ce document, Sébastien Lecornu a indiqué que l’État déclenchera prochainement une grande consultation de la société civile calédonienne. Le haut-commissaire, Laurent Prévost, en dévoilera les modalités « dans les prochains jours ». De son côté, le ministre engagera un cycle de consultations avec les forces politiques nationales pour évoquer l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, mais aussi avec l’ONU, histoire que toute la scène nationale et internationale soit bien au courant de la situation et des suites que pourrait donner l’État en fonction des agissements des indépendantistes dans certains dossiers, notamment celui de l’usine du Sud et de la mine.

Après cette allocution, les Calédoniens sont désormais conscients qu’une nouvelle étape a été franchie. L’étape d’un État qui apporte son soutien au territoire, prône l’ouverture, mais qui confirme dorénavant la fermeté s’il est mené en bateau. La dernière conciliation possible est donc lancée à ceux qui pratiquent la politique de la chaise vide. Vont-ils l’accepter ? Les prochaines semaines nous le diront.

D.P.

©capture d’écran NC La 1ere


Le Ministre visé par une enquête

Dans son édition de mercredi, Le Canard enchaîné révèle que le parquet national financier a ouvert il y a quelques semaines une enquête préliminaire pour prise illégale d’intérêts visant le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu. L’affaire concerne ses anciennes fonctions lorsqu’il était président du département de l’Eure.

Il lui serait reproché d’avoir siégé en 2016 et 2017 en tant qu’administrateur de la société des autoroutes Paris- Normandie (SAPN) et d’avoir touché plus de 900 000 francs de jetons de présence, ce qui figure bien dans sa déclaration à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Durant cette période, la collectivité aurait financé au moins quatre ouvrages de cette société dont « un échangeur de l’A13 pour lequel le département a allongé un million d’euros ». La SAPN a expliqué que dans le conseil d’administration, une place était traditionnellement réservée aux présidents des départements traversés par les autoroutes. Le cabinet du ministre a indiqué au Canard enchaîné que Sébastien Lecornu « se sent à l’aise et assume complètement ».