Questions à Hervé Mariton, Député de la Drôme et ancien ministre des Outre-mer.

DNC : Vous vous êtes dit frappé par la situation économique et inquiet quant à son évolution. Expliquez-nous… 

Hervé Mariton : Nous savions que la situation politique et institutionnelle était complexe. Mais nous avons le sentiment que finalement chacun accepte de se parler et qu’en réalité la situation est moins tendue que nous ne l’anticipions. Et ce qui m’a probablement le plus surpris dans cette mission, c’est que la situation économique est beaucoup plus tendue. Je ne parle pas principalement du conflit des rouleurs mais de la situation économique globalement. 

La Nouvelle-Calédonie, au fond historiquement, c’est une situation politique compliquée et une économie prospère. Aujourd’hui, c’est une situation politique un peu moins lourde en apparence mais un contexte économique, qui lui, est beaucoup plus lourd et moins prospère. Avec des habitants plus inquiets quant au contexte économique. Et on ne peut pas être indifférent à cela. 

DNC : Quelle analyse portez-vous concrètement sur la situation ? 

Hervé Mariton : D’abord il y a une question nationale : il est important que l’état joue son rôle. Il faut que l’on ait une stratégie industrielle, parce que l’état est actionnaire d’éramet et il doit assumer cela. J’ai été ministre des Outre-mer et j’avais donné un certain nombre de directions à l’époque où Areva était actionnaire d’éramet et portait les intérêts de l’état. Il n’y a pas aujourd’hui de stratégie de la part du gouvernement et ça, c’est grave. 

Et puis deuxième point, tout comme je considère que c’est aux habitants de la Nouvelle-Calédonie de définir leur destin, c’est aussi aux habitants de la Nouvelle-Calédonie de définir leur politique économique. Mais je dis simplement gaffe ! Parce que nous sommes dans un monde ouvert que ce soit en Europe ou dans le Pacifique. Ce monde ouvert est un monde fait d’échanges internationaux, de commerce. Il est fait d’une certaine ouverture. La Nouvelle-Calédonie a raison de défendre ses forces, ses richesses, de chercher à affronter de la manière la plus féconde le monde d’aujourd’hui. Mais cela ne se fait pas par la fermeture. Or, on constate qu’il y a aujourd’hui plutôt des reflexes de fermeture et aussi un vrai risque de confusion entre la sphère politique, la sphère économique et les rôles qui sont joués de manière un peu complexe par les institutions.

Je ne me mêle pas de cette politique intérieure mais pour des raisons de bon sens, en tant qu’observateur, il y a une forme d’alerte sur le risque que la Nouvelle-Calédonie, demain, ne s’abîme si les mauvais choix politiques sont faits. 

Donc, moi je dis : faites vos choix politiques librement et décidez de faire ce que vous voulez de votre richesse, mais faites-le dans des conditions qui ne l’abîme pas. Et si vous vous enfermez dans une économie trop administrée, si vous imaginez que la sur-administration des choses peut aider à l’essor de la Nouvelle-Calédonie, je crains que vous vous trompiez.