Quelle campagne pour les non-indépendantistes ?

L’État devrait confirmer la semaine prochaine la tenue ou non du référendum au 12 décembre en fonction des indicateurs sanitaires. L’échéance, pour l’instant, est maintenue, et préparée par ses services. Si les indépendantistes ont indiqué qu’ils n’y participeraient pas, les formations non indépendantistes s’adaptent à la crise pour mener campagne ou attendent une confirmation de la date.

 

L’État devrait se prononcer très prochainement sur la tenue ou non du référendum en se basant sur les indicateurs sanitaires. Un délai d’un mois avant l’échéance du 12 décembre pour entériner cette décision avait été jugé satisfaisant lors des réunions à Nouméa.

En attendant, ses services de sécurité, intérieure et extérieure, s’appliquent à déployer un large dispositif de maintien de l’ordre. Les services administratifs font également leur travail normalement. La commission de contrôle s’est notamment penchée la semaine dernière sur la conformité des professions de foi (grammage, logos, drapeaux) des partis habilités à participer à la campagne référendaire.

Mais les difficultés se confirment néanmoins. Suite à l’appel du FLNKS à ne pas participer à la consultation si elle devait se dérouler le 12 décembre, les groupes indépendantistes (UNI, UC-FLNKS et Nationalistes, Parti travailliste) ont informé, jeudi dernier, ne pas avoir transmis ces documents. On peut supposer qu’ils vont rester sur cette position et ne pas rendre physiquement non plus les exemplaires des professions de foi attendus le 8 novembre pour la mise sous pli.

Les non-indépendantistes, de leur côté, ne pouvaient pas attendre le feu vert de l’État pour avancer sur ces démarches. En revanche, on trouve très peu de monde sur le terrain. Si certains ont repris leur campagne en petit comité, d’autres l’imaginent en attendant une confirmation de Paris.

Format restreint pour les Voix du Non

La crise du Covid a totalement bouleversé l’agenda politique. Ces dernières semaines, élus et responsables se sont surtout attelés à faire campagne en faveur de la vaccination et sont restés concentrés sur la gestion de l’urgence sanitaire et sociale. « Plusieurs grosses réunions ont logiquement été annulées », commente Christopher Gygès, directeur de campagne des Voix du Non, qui regroupent l’Avenir en confiance, le Rassemblement LR et Générations NC. Mais, dès à la fin du confinement strict, la campagne des Voix du Non a repris dans le respect des règles sanitaires.

Au programme pour ce groupe, des réunions en format réduit à 15 personnes maximum. Cette semaine, elles se déroulent dans le Grand Nouméa, notamment avec les jeunes, et dans le Nord. « Ces rencontres sont principalement organisées par les comités locaux à la demande. » Par la suite, les Voix du Non s’adapteront à l’évolution des consignes en vigueur avec éventuellement une augmentation de la jauge pour le nombre de personnes.

« Mais au final, explique Christopher Gygès, ce format réduit nous va bien. Notre idée dès le départ était d’organiser des réunions ciblées sur le terrain plutôt que des grands meetings politiques. » Les Voix du Non ont aussi lancé leur campagne digitale sur Facebook avec des illustrations et dessins animés sur les conséquences du Oui et du Non. Et à partir de la semaine prochaine, ils diffuseront des témoignages et des clips par thématique.

Réunion de campagne à Nouméa. (© Les Voix du Non)

 

Des modes de campagne différents

Calédonie ensemble n’a pas lancé sa campagne. Le parti envisage, lui aussi, des modes de communication différents, plus virtuels. « La jauge de 15 personnes interdit pour nous de fait que des réunions classiques se tiennent, juge Philippe Dunoyer. Notre objectif était en particulier de toucher les personnes qui votent Oui dans les tribus, en province Nord, mais les conditions sanitaires rendent impossibles ces rencontres de terrain. »

Le parti va donc revoir à la fois son calendrier et les moyens à mettre en œuvre. « Il faut que l’on trouve des façons de relayer nos arguments initiaux et d’apporter aussi les éléments nouveaux intervenus avec le document du Oui et du Non et le référendum de projet auquel on tient et qui changent la donne. À nous, donc, de voir comment faire campagne sachant qu’il n’y aura pas, de ce que l’on a compris, les indépendantistes, et que ce sera donc une campagne très particulière. »

Pour sa part, l’Éveil océanien, habilité pour la première fois à faire campagne, est dans l’attente d’une annonce de l’État sur le maintien ou non de l’échéance. Pour l’instant, le parti a priorisé la situation sanitaire. En revanche, si le référendum est maintenu, ses responsables prévoient de s’exprimer à la fois sur leur participation et leur positionnement pour l’avenir (ils n’avaient pas donné de consigne de vote en 2020).

Il s’agit également pour eux d’imaginer une nouvelle façon de faire campagne si la situation était acceptable. « Nous sommes plutôt habitués à organiser d’importants meetings et il sera difficile vu le contexte d’organiser de petites réunions chez les habitants, explique Veylma Falaeo. Il faut aussi respecter les familles qui sont en deuil et donc trouver un juste milieu. »

On l’aura compris, pour tous ces partis, la campagne, si elle se confirme, ne ressemblera à aucune autre et se passera probablement davantage sur les réseaux sociaux que sur le terrain, voire éventuellement sans adversaires politiques…

Au sein même des partis, des réunions mensuelles sont déjà organisées virtuellement, comme ici au Rassemblement. (Capture d’écran)

 


Une confirmation attendue la semaine prochaine

(© Fabien Dubessay/AFP)

Interrogé sur France Info jeudi 28 octobre, le ministre des Outre-mer, Sébastien Lecornu, a indiqué qu’il était encore trop tôt pour avoir une projection de la situation sanitaire pour le référendum. « Depuis quelques jours, il y a un plateau sur le taux d’incidence. Il a considérablement diminué ces quinze derniers jours. Mais il est trop tôt, malheureusement, pour avoir une projection sanitaire fine qui nous permette d’établir si le référendum du 12 décembre peut être maintenu ou pas », a-t-il déclaré.

Le gouvernement devrait prendre sa décision « d’ici 10 à 15 jours », a-t-il précisé, c’est-à-dire la semaine prochaine. Nous en saurons probablement plus en sortie du Conseil des ministres mercredi.

Sébastien Lecornu a redit, en tout cas, que seule l’urgence sanitaire pourrait motiver un report de l’échéance et « que le principe est qu’il ait lieu et l’exception qu’il soit reporté », car dans une démocratie « on tient ses élections à l’heure ». Exactement ce qu’il avait indiqué à Nouméa. Il a aussi appelé « les familles indépendantistes à ne pas s’écarter de ce seul baromètre sanitaire ». Depuis, le taux d’incidence a encore fortement baissé : mercredi, il était à 128 pour 100 000 habitants sur sept jours cumulés.

 

Chloé Maingourd

©Les Voix du Non