Présidentielle : quelles conséquences économiques ?

Les finalistes à l’élection présidentielle ont tous deux présenté des programmes économiques pour les outre-mer. Si les candidats ont des visions très différentes, cela ne devrait pas véritablement concerner la Nouvelle-Calédonie.

Les électeurs calédoniens ont montré le peu d’intérêt qu’ils accordaient à cette élection présidentielle au travers de l’importante abstention. Les élections nationales ne passionnent généralement pas, et celle-là n’a pas fait exception. La plupart des candidats avaient pourtant présenté des programmes pour les outre-mer, même si la Nouvelle-Calédonie n’était pas particulièrement visible, d’autant plus que l’actualité était davantage du côté de la Guyane.

Ce grand rendez-vous de la vie politique française intéresse peu car les enjeux pour la Nouvelle-Calédonie sont plutôt indirects, sans compter que les pouvoirs d’un président sont relativement limités s’il ne dispose pas de majorité parlementaire. Toutes les grandes promesses des candidats ne concernent pas, à proprement parler, le territoire qui est désormais compétent économiquement et fiscalement. La réforme du Code du travail par ordonnance voulue par Emmanuel Macron n’aura, par exemple, pas d’impact sur le Code du travail calédonien.

La Nouvelle-Calédonie peu concernée

Pour ce qui est du ressort de l’État, du côté d’En Marche, c’est le statu quo. Pas de remise en cause de l’indexation dont une grande partie, selon le candidat, est injectée dans l’économie calédonienne et permet de générer une activité importante. Emmanuel Macron souhaite également maintenir les engagements de l’État tels qu’ils ont été définis dans le cadre des contrats de développement et des compensations financières des transferts de compétences. Cette position est en cohérence avec celle du candidat vis-à-vis du processus institutionnel. Pour lui, il faut aller au bout de l’Accord de Nouméa et l’État doit être un partenaire relativement neutre.

Dans son programme pour les outre-mer, le mouvement En Marche propose toutefois quelques mesures qui pourraient intéresser les Calédoniens. C’est le cas de la continuité territoriale. L’objectif est de proposer 200 000 billets d’avion aidés chaque année pour la France, mais également pour améliorer la mobilité des ultramarins dans leur environnement régional. Si la mesure est intéressante, François Hollande s’y est cassé les dents avant lui et Emmanuel Macron le sait bien puisqu’il était encore ministre de l’Économie lorsque le gouvernement a commencé à travailler le projet de loi sur l’égalité réelle des outre-mer. En Nouvelle-Calédonie, l’article de la loi qui vise à aider la continuité territoriale n’a qu’une portée symbolique. Pour le reste, le programme s’adresse aux régions et départements d’outre-mer. Emmanuel Macron rappelle toutefois qu’il était à l’origine du plan de sauvetage des métallurgistes proposé en 2016. Son coordinateur outre- mer, de passage en Nouvelle-Calédonie début mars, assurait qu’Emmanuel Macron répondrait présent si le territoire devait traverser une nouvelle crise.

Emmanuel Macron et Marine Le Pen ont des visions très différentes, mais partagent au moins la volonté d’affirmer l’économie maritime française et tout particulièrement dans les outre-mer. Sur la question de l’économie bleue, Marine Le Pen est d’ailleurs une des seules candidates à proposer un programme solide. De manière plus générale, Marine Le Pen a un programme un peu plus concret que le candidat d’En Marche. Elle propose notamment de regrouper tous les dispositifs existants tels que les lois Girardin ou Pons. La candidate propose la création de zones ultramarines françaises d’investissement prioritaire dans lesquelles seraient proposés des outils fiscaux simples, des allégements de charges sur les entreprises et des crédits d’impôt-recherche.

Une radicalisation potentiellement néfaste

Plus concrètement sur la Nouvelle-Calédonie, le programme de Marine Le Pen souligne l’importance de respecter l’Accord de Nouméa. Accord qui doit être « pleinement appliqué, dans toutes ses dispositions, et jusqu’à son terme ». Le document précise encore que « l’État doit continuer de jouer son rôle d’arbitre impartial (…) et donc veiller à ne pas favoriser une solution plutôt qu’une autre ». Une position très consensuelle qui tranche quelque peu avec celle plus radicale de ses relais locaux.

Du point de vue programmatique, Marine Le Pen diffère peu de son concurrent, dans le sens où elle ne propose pas non plus de grand soir pour la Nouvelle-Calédonie, qui est déjà très largement autonome. Mais entre son programme et sa campagne sur le terrain, on a toutefois pu noter quelques différences de taille, notamment sur le fait que le vote Le Pen était le seul à pouvoir garantir une Nouvelle-Calédonie française. Cette position traduit une insécurité de cet électorat, non négligeable, quant à l’avenir institutionnel. La radicalisation de part et d’autre de l’échiquier politique calédonien est de nature à pouvoir inquiéter les investisseurs potentiels. Cette perspective de tensions, voire davantage, pourrait conduire à un ralentissement économique probablement plus marqué encore que pour les élections précédentes, d’autant plus si l’on considère le contexte déjà morose.

M.D.