Nicolas Brignone : « Une année aussi importante qu’étrange »

Alors qu’il avait manqué de peu sa sélection pour les Jeux de Tokyo, l’an dernier, à cause de la crise sanitaire, Nicolas Brignone entame une nouvelle saison avec la même ambition : celle d’être au départ des courses en fauteuil au Japon.

DNC : Comment appréhendez-vous cette nouvelle année, et donc les Jeux paralympiques (du 24 août au 5 septembre) ?

Nicolas Brignone : C’est forcément une année importante, mais elle s’annonce très étrange. C’est encore une fois une année olympique, mais pas tout à fait. Habituellement, on réunit toutes les conditions pour se qualifier, et donc on enchaîne les compétitions pour trouver de l’adversité et ainsi arriver à des performances. Là, le souci, c’est qu’on est coincé sur le territoire. Cela va faire plus d’un an que je n’ai pas pu participer à une compétition internationale. Je risque de n’avoir qu’une seule compétition avant les Jeux : les France en juin.

De quelle manière devez-vous vous qualifier pour ces Jeux de Tokyo ?

Il faut que je reste dans le top 6 mondial d’ici le 1er avril. Cela permettrait, en fait, d’ouvrir une place pour la France et, logiquement, elle me serait attribuée. (Cette règle n’est pas officielle, mais l’an dernier, c’est ainsi que la Fédération française avait procédé pour les premiers qualifiés, dont Pierre Fairbank, NDLR). Donc en fait, ce qu’il s’est passé l’an dernier, c’est que j’étais dans les clous fin mars quand les Jeux ont été repoussés. J’ai manqué d’assurer ma place pour quelques jours seulement. Et puis si je ne suis pas dans le top 6 à la date prévue, il restera des places à attribuer, mais je préférerais être qualifié avant.

Pourquoi ?

Parce que cela me permettrait d’être fixé plusieurs mois avant d’aller au Japon, ce qui est plus confortable pour une préparation. Et aussi parce que les dernières sélections se font par un comité qui regarde beaucoup de critères pour prendre sa décision et pas uniquement la performance. Cela peut être l’âge, l’état de forme du moment ou d’autres choses.

Après cette année si particulière, sans compétition d’envergure, pensez-vous être toujours au même niveau qu’avant ?

J’ignore complètement où je me situe par rapport aux autres. Mais je sais que je me suis bien entraîné. On a de nouveaux appareils d’entraînement, de nouveaux protocoles, donc je pense que je me suis amélioré. Mais sans compétition, je n’ai pas encore vu mon évolution chronométrique, dans des conditions réelles, après tout ce travail.

Tous les athlètes qui visent les Jeux sont-ils logés à la même enseigne ?

Non. Je sais, par exemple, que les Japonais sont partout. Il y avait une grosse compétition en Suisse, il y a quelques mois, ils y étaient. Ils font aussi beaucoup de stages un peu partout dans le monde. Ils ont des restrictions, mais sur le peu de compétitions maintenues, ils sont présents. En équipe de France aussi, certains ont pu aller en Suisse. (La piste d’Arbon est considérée comme celle des records et, de ce fait, très prisée pour la préparation des athlètes, NDLR). Donc nous, Calédoniens, nous sommes bien lotis au niveau sanitaire, et c’est très important, mais sportivement, c’est plus compliqué. En fait, l’enchaînement des compétitions permet de trouver des automatismes, de gérer le stress. Un an sans compétition, je ne sais vraiment pas comment je vais réagir.


Les Cagous entament leur chemin vers les JO

Au pôle France de Nouméa, seul Pierre Fairbank est tranquille. Avec une quatrième place au 100 mètres fauteuil des Mondiaux de Dubaï, en décembre 2019, il avait acquis sa place pour les Jeux et ne l’a pas perdue. Nicolas Brignone, lui, est en ballottage favorable pour une qualification en avril, pour participer aux 100, 400 et 800 mètres, comme Fairbank. D’autres devraient aussi être du voyage. C’est le cas de Marcelin Walico, 7e mondial au lancer de poids fauteuil, Thierry Cibone, 8e mondial en javelot fauteuil, et Rose Vendégou, 8e mondiale en lancer de poids ambulant. Tous les trois ont de grandes chances d’être sélectionnés en équipe de France, mais dans la dernière vague.

Et puis, il y a aussi Sylvain Bova, dans les meilleurs coureurs malvoyants. Il partirait alors avec son guide, Germain Haewegene. Enfin, deux nouveaux venus sur les pas de lancer pourraient créer la surprise : Feliciano Siapo et Vitolio Kawa Kawa. S’ils visaient d’abord Paris-2024, le contexte sanitaire et les places qui pourraient se libérer en fonction des défections en font des prétendants crédibles, d’autant plus qu’ils font déjà partie des meilleurs tricolores et ont atteint les minima demandés par le comité paralympique.

A.B.