Natation : Emma Terebo, le roman d’une renaissance

Son doublé aux championnats de France de Limoges sur 100 et 200 m dos est avant tout la consécration d’une surdouée qu’on a voulu voir trop haut, trop tôt. Elle est finalement arrivée à l’heure au sommet, à 23 ans.

♦ Mulhouse, 19 avril 2014 : la promesse

Pour la première fois depuis ses débuts, Emma Terebo, l’un des espoirs du CNC, ne participe pas au meeting Qantas. Dix jours plus tôt, dans la piscine de l’Odyssée à Chartres, celle qui accumule les médailles nationales depuis 2012 a plongé vers un nouveau titre de championne de France jeunes. Elle n’a pas encore 16 ans et s’affirme comme la future reine du 100 m dos. Les entraîneurs nationaux ne s’y trompent pas et lui donnent sa première convocation pour un stage international à Mulhouse. Son nom : « Objectif Tokyo ».

♦ Nanjing (Chine), 20 août 2014 : premières déceptions

Les quatre derniers mois d’Emma Terebo sont passés à toute vitesse. Depuis Chartres, la jeune étoile est devenue une valeur sûre. On l’imagine déjà prendre l’avion pour les JO de Rio 2016. Au regard de ses chronos et de son talent, tout le monde pense qu’elle va entamer une collection de médailles dès l’Euro juniors de Dordrecht aux Pays-Bas, en juillet.

La dossiste de 16 ans se qualifie pour la finale du 100 m mais, fatiguée, elle passe à côté de sa course et termine huitième. Un petit accroc qu’elle espère effacer en août dès les Jeux olympiques de la jeunesse en Chine. Cette fois, rattrapée par l’événement, elle ne rentre pas en finale. « Les sensations sont moins bonnes que d’habitude », confie- t-elle. Ce n’était pas un accident. Aux France d’avril 2015, Emma coule encore dans le bassin de Limoges et ne se qualifie que pour la finale B du 100 m dos. « Je me suis mis trop de pression sur les épaules. »

♦ Port Moresby (Papouasie Nouvelle-Guinée), 12 juillet 2015 : le sursaut d’une prodige

Pour ses premiers Jeux du Pacifique, Emma Terebo est transfigurée. Elle partage les médailles d’or avec une autre reine, Lara Grangeon. Huit au total pour la plus jeune. La voilà de retour au plus haut niveau. En décembre de la même année, les sélectionneurs de l’équipe de France lui offrent même sa première sélection chez les seniors à l’Euro en petit bassin de Netanya (Israël). Hélas, elle passe une nouvelle fois à travers en sortant dès les séries du 100 m dos, à plus d’une seconde de son record.

Aux France de Montpellier en 2016, elle ne prend que la cinquième place sur sa distance fétiche. Elle n’ira pas à Rio.

La toute jeune Emma, 14 ans, remporte ses premiers titres nationaux chez les minimes.

 

♦ Florida state university (États-Unis), 1er septembre 2017 : goodbye !

Peut-on passer par Tallahassee pour aller à Tokyo ? Emma Terebo, 18 ans, pense que oui et s’engage pour un bail de quatre ans avec l’université de Floride. Surtout utilisée en crawl dans des bassins de 25 yards, elle ne travaille pas spécifiquement le dos et ne participe qu’en 2018 aux championnats de France, sans préparation particulière. Et sans résultat particulier. Qu’importe, elle vit son rêve américain et se concentre sur ses études.

♦ Chartres, 15 juin 2021 : Emma is back

Personne ne s’en doute à l’époque, mais ce devait être ses adieux et le dernier 100 m dos de sa carrière, sept ans après s’être révélée dans cette même Odyssée de Chartres. Sans travail spécifique, Emma Terebo atteint tout de même la finale. Loin des minima olympiques pour Tokyo. Mais ce n’est pas fini. Michel Chrétien, l’homme qui a fait Jeremy Stravius et Maxime Grousset, lui propose ce jour-là un dernier défi. Devenir son élève à l’Insep et viser les Monde.

Moins d’un an plus tard, en avril 2022, à Limoges, elle devient, à 23 ans, championne de France élite du 100 m dos, explose son record en 59″64 et se qualifie pour les championnats du monde. « C’est le bonheur, l’excitation, la joie que le travail paye. C’est incroyable ! » Le début d’une troisième carrière qui pourrait enfin être olympique et faire étape à Paris 2024.

 


La relève est là

Alors qu’Emma Terebo et Maxime Grousset, triplement titré à Limoges (50 et 100 nage libre, 50 m papillon), disputeront les Mondiaux élite (Budapest du 18 au 25 juin), le Caillou se
montre aussi performant chez les plus jeunes. Ainsi, Ethan Dumesnil, qui a réalisé la meilleure performance française chez les moins de 16 ans sur le 100 m papillon, et John-William Dabin, qualifié sur le 4 x 200 m, participeront à l’Euro juniors de Bucarest en juillet.

 

M.M. (© M.M.)