Manuel Valls : « Oser un nouveau cadre politique »

« Je suis convaincu qu’un accord est possible en alliant les aspirations contradictoires », a insisté le ministre, Manuel Valls, à l’Assemblée nationale. Photo : Thomas SAMSON / AFP

Le ministre des Outre-mer Manuel Valls vient de préciser sa réflexion dans la presse nationale en vue de l’élaboration d’un accord sur l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. 

Après l’échec du « conclave » de Deva début mai et la colère des partis Loyalistes et Rassemblement-LR, certains ont cru voir une reprise en main du dossier calédonien par l’Élysée. Le président de la République, Emmanuel Macron, a invité les « parties prenantes » à Paris pour une concertation dans les prochaines semaines.

Un revirement ? Difficile à imaginer. Le ministre des Outre-mer, Manuel Valls, a présenté le projet fondé sur une souveraineté avec la France aux côtés d’Éric Thiers, conseiller spécial du Premier ministre, François Bayrou. Le chef de l’État n’a pas contredit le membre du gouvernement.

Sur LCI, dimanche 25 mai, le numéro 3 de l’exécutif s’est montré ferme : « Celui qui s’occupe (…) du dossier de la Nouvelle-Calédonie, c’est le ministre des Outre-mer. C’est moi. Il n’y en a pas d’autre ». Manuel Valls a enfoncé le clou, dimanche 1er juin, dans un texte relayé par le journal économique et financier La Tribune.

« DÉCOLONISER, CE N’EST PAS ROMPRE »

Sa ligne ne bouge pas d’un iota et s’appuie tout d’abord sur les actes de référence. « Les accords de Matignon et de Nouméa, grâce à Michel Rocard et à Lionel Jospin, ne sont pas des vestiges du passé. Ils sont des piliers vivants de notre responsabilité collective », écrit le ministre d’État. Les trois consultations d’autodétermination tenues entre 2018 et 2021 ont toutes « rejeté l’indépendance ». Mais ces référendums « n’ont pas permis de clore la question de la décolonisation et de l’autodétermination ». Pour le locataire de la rue Oudinot d’ailleurs, « décoloniser, ce n’est pas rompre : c’est permettre de choisir. C’est offrir à un peuple la possibilité d’inventer une voie qui conjugue dignité, identité et protection ».

Après avoir une nouvelle fois condamné des « violences inacceptables » à partir du 13 mai 2024 qui sont à ses yeux le symptôme de diverses crises, Manuel Valls estime que la première des responsabilités est « d’oser un nouveau cadre politique. Ce projet doit concilier deux aspirations : celle, forte, d’une souveraineté pleine et entière, et celle, non moins légitime, d’un ancrage dans la Répu-blique. Il doit permettre aux Néo-Calédoniens de vivre en paix, dans un monde incertain, et de prendre toute leur place dans la stratégie indopacifique portée par le président de la République ».  Le ministre croit toujours possible « une solution politique durable, équilibrée et reconnue ».

En ce temps charnière, les flottements favorisent toutes les inquiétudes. D’autant que des élections provinciales doivent se tenir, normalement au plus tard le 30 novembre. Les députés calédoniens ont pris le micro, mardi 3 mai, à l’Assemblée nationale.

Pour le Loyaliste Nicolas Metzdorf, du groupe Ensemble pour la République, « nous méritons mieux que l’abandon. Nous ne voulons pas de reconnaissance. Nous voulons simplement de l’ambition et la fierté de pouvoir nous dire que nous sommes des Français ». L’élu pense déceler le risque d’une démission de la France dans ses outre-mer. Le message est ainsi martelé pour la Nouvelle-Calédonie, à l’aube de négociations sur l’avenir institutionnel : le « nouvel accord devra être fait dans le choix des Calédoniens, celui de la France ».

MÉTHODE

La crainte est ailleurs chez Emmanuel Tjibaou. Le député de la Gauche démocrate et républicaine s’interroge sur la forme de la proche convocation signée du président de la République et sur le devenir du projet de souveraineté avec la France, « un projet d’État confédéré », soutenu par quatre des six forces politiques présentes à Deva.

Dès lors, selon le leader de l’Union calédonienne, « comment capitaliser le passif de cette méthode qui nous a ramenés sur le chemin de la concorde et faire aboutir un accord politique si une fois encore la méthode et le format de discussion changent à nouveau ? » La réponse de Manuel Valls n’a pas tardé. « La méthode n’a pas changé. » D’ailleurs, le ministre des Outre-mer a annoncé que, prochainement, avec le président de la République, « des propositions de dialogue » seront formulées à Paris.

Yann Mainguet

Vie chère

Le député Emmanuel Tjibaou et le sénateur Georges Naturel y ont participé. Une réunion de travail s’est tenue mercredi 4 juin entre le ministre d’État, Manuel Valls, et les parlementaires ultramarins sur les mesures envisagées par le gouvernement central pour lutter contre la vie chère dans les outre-mer. Le projet de loi s’articulera autour de cinq principes, selon le ministre : concurrence, transparence, exigences, renaissance et bon sens. Si bon nombre de compétences sont calédoniennes, des clés peuvent inspirer.