Magenta ouvert à la concurrence, la CCI dit son « incompréhension »

Aux commandes de l’aéroport de Magenta depuis 2013, la Chambre de commerce et d’industrie espérait être reconduite pour une longue durée, potentiellement sept ans. Le Congrès en a décidé autrement, vendredi 22 avril. Un appel d’offres sera lancé.

Écartée en 2020 par ce même Congrès, l’idée a fait son chemin. La mise en concurrence de la Chambre de commerce et d’industrie a été approuvée par une majorité d’élus réunis en petit comité (la commission permanente), vendredi 22 avril. Virginie Ruffenach s’est opposée, en vain, au texte voulu par le gouvernement.

Parce qu’« on ne change pas une équipe qui gagne », l’élue Avenir en confiance a défendu le bilan « satisfaisant » de la CCI. D’un point de vue financier, la chambre consulaire a redressé la situation, souligne-t-elle. Ce bilan, Gilbert Tyuienon, membre du gouvernement chargé du transport, s’empresse de le « tempérer ». « On peut mieux faire », assure celui qui aurait voulu « que l’on revoie les tarifs du snack de Magenta » où « le prix du café est excessivement cher ». Deuxième insatisfaction : le manque de souplesse dans les contrôles des passagers à l’embarquement. « Il faut moduler. On ne peut pas être sévère à Magenta et qu’il n’y ait pas de contrôle au retour. »

« Lobby »

« Est-ce que le prix du café est suffisant pour virer la CCI de Magenta ? », questionne Virginie Ruffenach. « La Chambre ne pourra pas concurrencer les multinationales, qui disposent d’autres moyens. Elle ne pourra pas lutter », prédit-elle. « Moi, je ne défends ici aucun lobby. Quand quelque chose fonctionne, je ne vois pas pourquoi on changerait. »

Philippe Michel (Calédonie ensemble) n’est pas du même avis. « J’ai l’impression d’être pris en otage par le lobbying qui est fait dans cette affaire, lance-t-il. La règle, c’est la mise en concurrence pour vérifier que les offres sont compétitives. C’est un principe sain que l’on a appliqué jusqu’ici sans difficulté dans toutes les délégations de service public. » Il s’abstiendra au moment du vote, « pour ne pas être instrumentalisé par les uns et les autres ».

Sylvain Pabouty (UC-FLNKS), « très méfiant vis-à-vis des multinationales », est cependant favorable à la mise en concurrence, lui aussi.

« On a du mal à comprendre »

Face à de potentiels candidats comme Engie Pacific Airport, la CCI pourrait tout de même l’emporter. Mais Charles Roger, son directeur général, est dans l’« incompréhension ». « Le Cese* avait émis un avis défavorable, le Congrès s’était montré réticent par le passé. On est un établissement public performant qui, pour réaliser des économies, a besoin de mutualiser les moyens avec La Tontouta », dont la CCI espère conserver l’exploitation au-delà de 2024. « On a du mal à comprendre pourquoi on nous met en concurrence. »

Faut-il y voir des raisons politiques ? La CCI paye-t-elle son engagement au sein de NC Éco, à l’approche du référendum ou sa position sur la réforme fiscale portée par le gouvernement indépendantiste ?

 

*Conseil économique, social et environnemental.

 


470 millions de francs

C’est le chiffre d’affaires de l’aéroport de Nouméa-Magenta en 2019, pour un bénéfice de 20 millions de francs.

 


Enjeux 

L’exploitation de l’aéroport comprend la gestion des parkings, de la restauration, des pompiers, des hangars, etc. La CCI veut bénéficier d’une délégation de service public de longue durée, afin de réaliser les investissements nécessaires « dont la Nouvelle-Calédonie n’a plus les moyens ».

 

Gilles Caprais (© Archives G.C.)