L’histoire du bagne accessible en un clic

L’association Témoignage d’un passé (Atup) propose un parcours à Nouville sur les forçats et leurs surveillants, commenté depuis son téléphone grâce à l’application Grall.

Les stigmates de la pénitentiaire n’ont jamais disparu à Nouville. Dans l’agencement des bâtiments, au détour d’une rue, à la vision d’un mur de pierre, le passé bagnard de la presqu’île de Nouméa ressurgit. En dehors des horaires d’ouverture du site historique de l’île Nou, ses traces peuvent paraître difficilement accessibles.

L’application Grall, téléchargeable sur smartphone, permet maintenant de les révéler grâce à un système de géolocalisation. « À chaque bâtiment intéressant, nous retrouvons une balise. D’autres points mentionnent des grandes thématiques du bagne, comme l’évasion, indique Adèle Simon, directrice du site historique et coordinatrice de l’association Témoignage d’un passé (Atup). L’application peut être utilisée même lors de la fermeture des bâtiments. Il y a beaucoup de choses à faire et à découvrir, c’est une alternative. »

La balade d’une heure reprend les grandes lignes de la visite guidée proposée par l’association militant pour la préservation des vestiges du passé. Elle présente le pénitencier-dépôt, par lequel transitaient tous les condamnés avant d’être répartis dans les différents camps de la Grande Terre. « On cherche à déconstruire l’imaginaire autour du bagne, par exemple l’idée que tous les forçats étaient des assassins ou des violeurs. Il y a des catégories très différentes, une bonne partie des condamnés étaient des vagabonds ou des voleurs de pain », explique Adèle Simon.

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En suivant l’itinéraire, les visiteurs s’arrêtent au débarcadère, s’attardent devant la demeure du commandant et son jardin anglais, découvrent la chapelle ou s’aventurent jusqu’au « boulevard du Crime », aujourd’hui occupé par le Centre de rencontres et d’échanges internationaux du Pacifique (Creipac). Chaque lieu possède une description, des témoignages, des photos ou parfois une vidéo explicative retraçant la vie des condamnés aux travaux forcés et de leurs surveillants au plus proche de la réalité historique. « C’est un peu un avant-goût de ce que propose l’association : on donne d’autres anecdotes, d’autres photos. Si on veut en apprendre plus, il faut faire nos visites guidées. »

© Captures d’écran de Grall

Les documents sont principalement extraits de l’incontournable Mémorial du bagne calédonien de l’historien Louis-José Barbançon et de la bande dessinée Louis, fils de surveillant au bagne de l’île Nou, à laquelle l’ancienne directrice du site historique, Emmanuelle Eriale, a participé. Les Archives de la Nouvelle-Calédonie ont aussi fourni plusieurs illustrations. « On se donne énormément pour rendre cette histoire plus visible. Encore aujourd’hui, des Calédoniens découvrent le site historique. Il y a beaucoup de choses à faire, de nouveaux canaux à utiliser. »

Des promenades supplémentaires peuvent être ajoutées au fur et à mesure sur l’application pour proposer de nouvelles thématiques. « On a des endroits sans vestige, mais avec des photos qui témoignent de l’histoire ancienne. On peut aller jusqu’au Camp-Est qui était une annexe du bagne, nommée ainsi parce qu’il se trouvait à l’est du pénitencier, liste Adèle Simon. Plusieurs chemins sont possibles pour raconter le bagne. » Autant d’opportunités réunies dans un téléphone pour s’approprier autrement cette période marquante.

Brice Bacquet

Photo : « Il y a de nombreuses choses à découvrir autour de Nouville : à la briqueterie, à la ferme nord ou au Kuendu Beach », détaille Adèle Simon, directrice du site historique de l’île Nou et coordinatrice de l’association Témoignage d’un passé. / B.B.

Grall, une application polynésienne

L’application a été développée en 2021 par une petite entreprise de Polynésie française, Glorytech. Elle permet de découvrir l’histoire
d’un lieu ou d’obtenir des informations pratiques lors d’un événement grâce à la géolocalisation.

À Nouméa, la municipalité l’a déployée en septembre 2022, à l’occasion du Mois du patrimoine, pour découvrir les bâtiments du centre-ville.

L’application est disponible sur App Store et Google play.