Les trésors méconnus de nos jardins

(Ré)apprendre les vertus de certaines « mauvaises herbes », tel est le credo du dernier livre du botaniste Bernard Suprin, Plantes marginales comestibles en Nouvelle-Calédonie. Au fil des pages, on découvre les véritables utilités de ces fruits, plantes et feuilles : nourrir, fortifier et soigner.

Elles sont consommées crues en salade, cuites à la vapeur, sautées au wok ou à la poêle, comme herbe aromatique ou épice, en boisson (tisane, liqueur, sirop), en confiture, en gelée… et sont au nombre de 250, pour « les plus pertinentes ». Toutes ces plantes résistantes, considérées comme des mauvaises herbes, révèlent tout leur potentiel (même pour le bétail, lapins, poules, oiseaux frugivores) dans un livre intitulé Plantes marginales comestibles en Nouvelle-Calédonie.

Pour l’auteur, Bernard Suprin, « elles poussent facilement et ne réclament aucun entretien particulier, puisqu’elles sont présentes dans les jardins à l’état spontané, sans qu’on ait choisi de les planter. D’où leur réputation, à tort, d’être de mauvaises herbes. La plupart de ces plantes, excepté quelques-unes, disposent de vertus alimentaires, ornementales ou thérapeutiques ». Bien sûr, il faut respecter scrupuleusement les modes de préparation et de consommation recommandés par les experts.

Plantes connues et à connaître

Notre connaissance sur le sujet mérite donc, d’être revue, améliorée et enrichie. En feuilletant les fiches du livre, de nombreux Calédoniens vont certainement se souvenir avoir déjà mangé des mûres sauvages, le pacaï, la fleur de flamboyant, le jamelon et peut-être même le poc poc, baie jaune qui produit un bruit sec lorsqu’on l’écrase et que l’on disait toxique.

Parmi ces centaines de plantes, se trouvent le liseron d’eau, les pousses de chouchoute ou citrouille, le chou kalé, qui de temps à autre sont disponibles sur les étals de certains marchés, magasins de quartier ou supermarchés. Les connaisseurs y verront aussi le pahatr (ou fougère nid d’oiseau), le chou kanak, les feuilles de taro ou l’ambrevade, également retenus sur la liste et que l’on peut apercevoir sur les petits marchés communaux, chez la famille ou les amis qui possèdent un jardin. En tournant une autre page, les fleurs du régime de banane dont vous avez déjà entendu dire qu’elles se mangeaient, mais sans jamais essayer, ont aussi leur fiche.

Plus loin, ce sera au tour des pousses de bambou et du cœur de palmier, plus connus et qu’on achète le plus souvent en conserve… Enfin, l’aloès que l’on ne présente plus pour les vertus de sa pulpe (contre les brûlures ou comme embellisseur de cheveux) qui, mélangé à du yaourt, est apprécié des amateurs, a aussi sa place. Toutefois, il faut se rendre à l’évidence, « la consommation de ces plantes marginales se résume, aujourd’hui, à quelques espèces », ajoute l’auteur.

« Perception subjective »

Les fleurs ont aussi leur place à table. Tombées du frangipanier, elles se dégustent et décorent les plats. De même que toutes les fleurs d’hibiscus fraîches, qui accompagneront salades et entrées froides, même celles du bourao (espèce tiliaceus) dont les fibres de l’écorce de certaines espèces sont utilisées pour des confections artisanales traditionnelles. C’est de tout cela dont nous parle Bernard Suprin afin que nous prenions conscience qu’une partie de notre alimentation se trouve sous nos yeux. À ce propos, l’auteur raconte aussi de tristes situations, à cause d’une pure méconnaissance. Des drames auraient pu être évités. Alors, gardons à l’esprit que « la perception que nous avons de ces plantes est subjective ».

Marie-Hélène Merlini

Photo : Bernard Suprin participe à notre éducation sur les plantes pour la diversification et l’autonomie alimentaire. / Marie-Hélène Merlini

 

Des plantes pouvant séduire

Le moringa

Il est renommé pour ses multiples vertus nutritives et médicinales. En Inde, il est surnommé l’arbre aux miracles. Feuilles, jeunes pousses, jeunes fruits consommés crus ou cuits ont un goût de cresson ou de raifort. Étant chargés en éléments minéraux et en protéines, il faut en manger avec modération à cause de leur effet laxatif. Les graines mûres peuvent être consommées grillées. Les fleurs peuvent être cuites et mélangées aux autres plats, enrobées dans une pâte à frire, puis frites ou encore préparées en tisane.

La célosie ou Épinard du Lagos

Les feuilles de la célosie plumeuse, seule plante ornementale poussant apparemment à l’état spontané ici, se consomment habituellement cuites et peuvent être incorporées en petite quantité dans une salade. Pour la cueillette, il est donc nécessaire de surveiller la plante et de couper les boutons dès qu’ils apparaissent.

Faux trèfle rouge

Surtout visible en saison fraîche, ses feuilles de couleur pourpre et ses fleurs délicates
de couleur lilas cueillies en même temps s’intègrent dans une salade et ont une saveur acide agréable. Leur consommation doit être modérée et occasionnelle, car l’acide oxalique que renferme le faux trèfle rouge s’avère toxique à haute dose, surtout en cas d’insuffisance rénal

Photos Marie-Hélène Merlini