Les techniciens de maintenance à l’épreuve

La crise sanitaire vient confirmer le besoin de compétence dans le domaine de la maintenance. Que ce soit dans le secteur de l’aéronautique, avec l’entretien des avions d’Air Calédonie ou dans le secteur maritime, pour le carénage du Betico 2. Dans les deux cas, l’entretien des appareils se fait, cette année, localement. Preuve que la main-d’œuvre locale est présente.

« En assurant l’entretien localement l’argent se maintient dans l’économie calédonienne et cela permet d’attirer les acteurs dans la région ». Édouard Castaing, le directeur général de la compagnie Sudîles, en est convaincu. Il travaille donc depuis deux ans pour que l’entretien annuel du Betico 2, qui dessert les îles, puisse être exécuté au port autonome à Nouville. « Je trouvais hallucinant de partir quatre à cinq semaines en Australie à cause d’un problème de dimensionnement du chariot », assure le responsable. L’ancien chariot en question était donc le plus important des obstacles à franchir. Une étude a été réalisée, il a été renforcé et le navire est entretenu localement, depuis cette année.

On peut dire que le DG de la Sudîles a eu le nez creux, car avec la crise sanitaire et la fermeture des frontières australiennes, le Betico 2 n’aurait jamais pu être révisé si cette solution n’avait pas été mise en place. La main-d’œuvre formée et compétente est présente, que ce soit dans le domaine de la chaudronnerie, de la tuyauterie, de la peinture ou même pour l’installation des échafaudages. « C’est l’effet induit par le développement des entreprises minières depuis une dizaine d’années », assure-t-il.

Du côté d’Air Calédonie, c’est aussi la crise sanitaire qui a obligé les équipes à effectuer l’entretien d’un ATR72 à Magenta plutôt qu’en Nouvelle-Zélande. Cette visite technique a lieu normalement tous les deux ans, elle nécessite 2 500 heures de main-d’œuvre et six semaines d’immobilisation. Le chantier est vaste : « Mise sur vérins, installation des docks autour de l’avion, démontage de la cabine, du nez, ouverture des accès aux ailes, aux moteurs », énumère la compagnie domestique.

Cette importante opération, appelée check C, est réalisée par des techniciens spécialisés, formés parfois directement en Nouvelle- Zélande. Chef de visite, préparateur technique, techniciens, mécaniciens, chaudronniers… Au total, 19 professionnels sont à pied d’œuvre dont six en renfort externe. La compagnie, qui a déjà mené ces entretiens, est compétente pour effectuer ces travaux localement.

Généraliser la maintenance locale

La mise en place d’une maintenance locale prouve que la Nouvelle-Calédonie dispose bien d’une main-d’œuvre qualifiée et opérationnelle. L’exemple du Betico 2 pourrait-il se généraliser à l’ensemble de la flotte maritime et aérienne ? Le secteur de la mer semble avoir un cran d’avance puisque le cluster maritime travaille depuis plusieurs années au développement de Port Numbo dont l’objectif est de récupérer 100 % de l’entretien de la flotte calédonienne. Actuellement, les caboteurs (Isan, Laura III, Scorpio) et les bateaux de l’armée vont caréner à l’étranger ou en Polynésie française. Pour l’heure, les retombées économiques concernant l’entretien du Betico 2 n’ont pas été mesurées, l’expérience est trop récente. « On économise déjà deux jours aller, deux jours retour pour le voyage en Australie, le carburant qui correspond et sur place, il faut loger tout l’équipage… C’est estimé à 15 millions par an. De l’argent qu’on ne dépensera plus », se félicite la Sudîles.

Mutualisation des moyens

Du côté d’Air Calédonie, on parle également d’un projet de mutualisation des moyens permettant de s’équiper de hangars suffisamment grands et de matériel adapté pour l’entretien des appareils. Air Calédonie réfléchit depuis plusieurs années à la création d’une plateforme qui pourrait éventuellement attirer d’autres opérateurs. À cette condition et seulement à cette condition, la rentabilité du projet serait atteinte.

Dans le secteur maritime, comme dans l’aérien, la volonté est donc de développer une activité de maintenance locale. Dans les deux domaines, la stratégie consiste à créer une offre de qualité susceptible d’attirer des partenaires régionaux. On vient, cette année, de franchir un pas supplémentaire dans la démarche. Espérons que la conjoncture économique ne vienne contrarier le besoin en investissement.

V.G.

©Air calédonie