L’environnement peut gravement nuire à votre santé

L’environnement, autrement dit notre cadre de vie, joue un rôle prépondérant dans la santé des êtres humains. Notre système de santé, les politiques publiques et la multiplicité des facteurs font qu’il est parfois difficile d’établir des liens clairs entre ce qui nous entoure et notre santé. Malgré certaines études sans appel, les choses mettent un certain temps à bouger.

Début février, un incendie ravageait plusieurs docks sur Ducos. D’importantes fumées étaient émises et les autorités redoutaient des rejets d’amiante dans l’air. Les services ont donc réagi promptement. Plus de quinze jours après, l’ensemble des partenaires du dossier tenait une conférence de presse pour rassurer la population et montrer que tout était sous contrôle.Plusieurs points pouvaient toutefois laisser sceptique. Sur la récupération des eaux, notamment. Les autorités ont fait savoir que 20 mètres cube d’eau de ruissellement ont été captées afin d’éviter qu’elles ne polluent le milieu naturel. C’est bien, mais où sont passés le reste des 5 000 m3 qui ont été nécessaires à éteindre l’incendie ? On peut aussi s’interroger sur la pertinence des analyses de la qualité de l’air, effectuées quinze jours après de possibles pollutions toxiques et la justification des autorités sanitaires, jurant que s’ils y avaient eu des émissions de composés toxiques lors de l’incendie, on en aurait retrouvé des traces quinze jours plus tard.

Il n’y aura probablement jamais davantage de réponse que celle du « tout est sous contrôle », mais cet épisode remet sur la table la problématique beaucoup plus vaste de la santé environnementale. Une problématique sur laquelle travaille la Direction du gouvernement des affaires sanitaires et sociales. La Dass dispose d’ailleurs d’un bureau santé environnement en charge de ces questions dont le champ est aussi vaste que transversal.

Peur et méconnaissance des dossiers

« 55 à 75 % des causes de mortalités peuvent être attribuées à notre environnement et à nos habitudes de vie, selon les différentes études », annonce d’emblée Lionel Berne, le responsable du bureau lui-même rattaché au service de santé publique. Concrètement, ce bureau est chargé de produire ou de collecter l’ensemble des données, statistiques et observations liées à la santé. En lien avec d’autres services, la Dass peut ensuite proposer des études complémentaires, en particulier épidémiologiques (études des facteurs influençant la santé et les maladies des populations), ainsi que des projets de réglementation.

Avec des dossiers comme la lutte anti-vectorielle ou l’aide aux communes pour améliorer la qualité des eaux potables, les cinq ingénieurs du bureau ont largement de quoi s’occuper. Avant les moustiques et l’eau, il a longtemps été occupé par l’amiante qui a conduit à la rédaction d’une loi sur l’amiante au travail, texte laissant d’ailleurs quelques vides juridiques sur le côté environnemental et faisant porter la responsabilité aux maires des différentes communes concernées en cas de problème.

Problèmes de transparence

Mais dans le fond, ce qui délimite le périmètre d’action du bureau, « ce sont les moyens que donne le Congrès en fonction des priorités que nous avons proposées et qui sont décidées par les élus », précise le docteur Jean-Paul Grangeon, directeur du service de la santé publique. Des élus qui sont parfois frileux à l’idée que les études commandées débouchent par la suite sur des réformes le plus souvent coûteuses. C’est peut-être ce qui a récemment guidé la décision des élus de ne pas financer une étude cherchant à étudier les impacts de l’utilisation des pesticides sur la population agricole.

Il y a d’autres dossiers inquiétants, à commencer par celui du mercure contenu dans les grands pélagiques. Contrairement à d’autres domaines comme l’eau ou l’air, il existe une réglementation encadrant les polluants toxiques dans les aliments. « Les normes interdisent la commercialisation de produit dont la concentration de mercure dépasse 1 mg par kilo de chair », pointe Martine Cornaille, la présidente d’EPLP qui se bat sans succès pour récupérer les résultats d’analyse de la Direction des affaires vétérinaires, alimentaires et rurales. D’après les sources de l’association, certains des résultats dépasseraient allègrement les 17 mg.

M.D.

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A noter

Une étude épidémiologique sur l’impact des pollutions environnementales sur la santé des Nouméens sera rendue publique à la fin du mois de mars. Le premier volet, rendu publique en 2015, mettait en évidence l’impact des émissions de la SLN sur la santé des enfants dans les écoles.

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Petite définition

On parle de santé environnementale lorsqu’une substance gazeuse, liquide ou solide est rejetée dans l’environnement (dans l’eau, dans l’air ou dans les sols) par l’action de l’homme ou non, qui n’y était pas auparavant ou dont la concentration augmente par l’intermédiaire des rejets, et qui entraîne des perturbations sur l’environnement et, par ricochet, de la santé humaine. La notion d’environnement est à prendre au sens large et pas seulement au sens de nature. Il peut donc s’agir par exemple du cadre de vie ou de l’alimentation.

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Le cas de Scal’Air

La création de Scal’Air, tout comme de l’Œil, montre l’importance de l’engagement citoyen sur les questions d’environnement. Les contestations liées aux émissions de la SLN ont conduit à la création de cette structure dont les missions sont de mesurer, d’informer et de sensibiliser. Missions dont l’association s’acquitte en toute transparence, l’information étant disponible en temps réel mais aussi transmise par SMS et par courriel en cas de dépassement des seuils. Les travaux de Scal’Air ont permis d’accélérer les prises de conscience et de mettre en évidence la part des pollutions de la SLN ce qui a conduit l’industriel à utiliser du fuel très basse teneur et très très basse teneur en soufre. Si la qualité de l’air s’est améliorée sur certains polluants, il reste un point noir important sur le nickel qui est le plus allergisant des métaux et est classé comme substance possiblement cancérigène par le Centre international de recherches sur le cancer. Scal’Air devrait bientôt disposer d’un nouvel outil permettant de modéliser les pollutions. Cela ouvrira de nouvelles perspectives dont celle d’établir des prévisions au lieu d’alerter en direct.

Retrouver plus d’information sur Scal’Air et notamment toutes les études sur le site www.scalair.nc