L’économie maritime prête à larguer les amarres

Le cluster maritime de Nouvelle-Calédonie organisait, mardi et mercredi 5 et 6 juillet, les premiers états généraux de la mer. L’occasion de regrouper l’ensemble des acteurs, privés comme publics, et de travailler pour faire émerger l’économie maritime. Les potentiels de croissance sont réels mais des prises de conscience et la mise en place d’outils seront indispensables.

Les îliens sont des peuples généralement tournés vers la mer. Généralement mais pas systématiquement. La Nouvelle- Calédonie est un de ces exemples un peu étrange. Le constat que la mer n’est pas reconnue, du moins pas suffisamment, est très largement partagé. C’est d’ailleurs sur cette base que le cluster maritime de Nouvelle-Calédonie a organisé ces premiers états généraux maritimes, les 5 et 6 juillet derniers.

L’idée de ses promoteurs : donner à la mer toute la place qui lui revient. Tous les acteurs, institutionnels, privés, de la recherche, mais aussi de Polynésie ou encore de métropole ont répondu à l’appel. Si l’économie bleue n’existe pas vraiment, la prise de conscience semble assez générale. Reste à mettre ces volontés en mouvement. Organisés autour de présentations et d’ateliers, les états généraux ont été ouverts par un résumé du rapport sur les enjeux maritimes de la Nouvelle-Calédonie (*), travail réalisé par des membres du cluster maritime calédonien.

Une forte mobilisation

Ce document, de près de 300 pages, est un état des lieux plutôt exhaustif et une base idéale pour construire la ou les stratégies de développement de l’économie bleue. Le cluster a notamment passé en revue l’ensemble des secteurs d’activité concernés par la mer. Ils sont au nombre de 26 et si certains comme la pêche ou le nautisme, peuvent paraître évidents, d’autres sont plus surprenants. C’est notamment le cas du droit, des assurances ou encore du financement. Mais de manière plus large, « pratiquement toutes les problématiques comportent une dimension maritime » comme le souligne le rapport.

Cela explique probablement la forte mobilisation aux six ateliers proposés par le cluster sur des questions aussi diverses que la gouvernance, le besoin en infrastructures, la gestion intégrée des espaces maritimes, la croisière sous ses différentes formes, la politique de valorisation des ressources naturelles marines et l’encadrement de la progression du nautisme. Les 183 participants issus du monde économique, des collectivités, de la recherche ou des institutions coutumières ont dû plancher sur ces thèmes afin d’apporter des réponses concrètes permettant le développement de l’économie bleue. Ces idées d’actions seront ensuite regroupées de manière à servir de base de travail.

Sur la question de la gouvernance, le besoin d’une plus grande concertation a largement fait consensus, notamment grâce à la création d’une instance qui pourrait prendre la forme d’un comité intercollectivité ou d’un secrétariat général à la mer. Si le privé a su se structurer au sein d’un cluster, c’est loin d’être le cas pour les collectivités. Dans les différentes administrations, le cluster a identifié pas mois de 145 équivalents temps pleins au sein du gouvernement ou encore des provinces. Au total, ce sont près de 20 directions qui sont concernées par les « choses » de la mer. Le fait qu’il n’existe aucune coordination entre ces directions complique grandement les choses.

Un observatoire de l’économie maritime

En attendant de trouver des solutions de ce côté-là, la CCI a avancé de son côté en lançant un observatoire économique maritime, en partenariat avec le cluster. L’idée de cet observatoire, à l’instar de ceux que la CCI a déjà mis en place sur l’immobilier ou encore le commerce, est de mieux cerner les pratiques et les impacts économiques.

Le rapport de synthèse du cluster estime le nombre de personnes travaillant dans le secteur à 3 200, bien d’autres données restent à agréger, comme la part du maritime dans le PIB. Le manque de visibilité sur l’impact économique des croisiéristes est également un handicap à la prise de décision. Les acteurs demandent notamment la création d’un point d’entrée unique qui pourrait simplifier les démarches, tant du côté des promoteurs que des institutions.

La métropole et nos voisins polynésiens disposent déjà de ce type d’outil. En métropole, le poids de l’économie maritime est estimé à quelque 69 milliards d’euros (plus de 8 200 milliards de francs), soit plus que le secteur automobile. Chez nos voisins, dont le représentant du cluster indiquait que le développement avait manqué de dynamisme ces vingt dernières années, l’économie bleue représente 39 milliards de francs hors tourisme. Avec le tourisme, on passe à 53 milliards de francs, soit 40 % des ressources propres de l’ensemble du territoire. Un poids qui a justifié la création d’un portefeuille de l’économie bleue au sein du ministère de l’économie.

*Le cluster a mis en ligne une partie du rapport sur www.clustermaritime.nc.

————————————

C’est quoi un Cluster ? 

Un cluster est un regroupement d’acteurs ayant des intérêts dans un même secteur d’activité. Les clusters regroupent des professionnels mais aussi des fédérations professionnelles ou des syndicats,

l’idée étant de mettre tout le monde en réseau afin de trouver des solutions aux problèmes dans l’intérêt général, au-delà de la concurrence qui peut s’exercer entre les acteurs. Cette mise en relation permet un meilleur partage des informations mais aussi de créer les dynamiques nécessaires pour porter des actions d’envergure.

M.D.