Le soutien aux plus démunis se structure

Les fragilités des personnes vulnérables, qu’elles soient physiques, psychologiques, sociales, peuvent être renforcées en cette période de confinement. Les institutions, les associations, les personnes de bon cœur se mobilisent et font un travail formidable.

Vendredi dernier, le gouvernement s’est exprimé sur le sujet par la voix d’Isabelle Champmoreau, membre de l’exécutif, en charge notamment de la famille et de la lutte contre les violences intrafamiliales. Avec un message clair : les personnes vulnérables ne sont pas laissées de côté. L’ensemble des partenaires intervenant auprès des publics les plus fragiles s’active en coulisses pour que tous les Calédoniens dans le besoin puissent obtenir un soutien en cette période de crise. Une réunion, organisée lundi, avec les associations et services sociaux a permis d’affiner le dispositif.

Prise en charge des SDF

Les journalistes interrogeaient les autorités sur le sort des sans domicile fixe depuis le début du confinement. Ils sont à la fois plus isolés et exposés en cas de propagation du virus. Il faut donc organiser leur confinement. Les centres d’hébergement habituels restent ouverts. Un centre supplémentaire, géré par l’association L’Accueil, qui est déjà en charge du centre de Doniambo (24 places), a ouvert au foyer Jean-Calvin, à l’Artillerie. Une vingtaine de personnes y sont reçues et le centre se serait rempli en quelques heures. Le foyer de la Rapsa (association de réintégration des anciens prisonniers), à la Vallée-du-Tir, en accueille 16.  Les demandes affluent encore et les réponses seront adaptées au fur et à mesure selon les possibilités d’hébergement. L’Accueil poursuit ses maraudes dans les rues de Nouméa auprès des sans-abri. Une centaine de repas sont distribués par jour. La banque alimentaire Dorcas délivre également des repas le dimanche soir.

Aide alimentaire

L’aide alimentaire est de fait une préoccupation majeure. Les besoins devraient se faire sentir de manière plus pressante et pour un public plus large, compte tenu de l’absence de revenus pour certains, de diminution pour d’autres. Les associations évoquent même un risque grandissant de vols dans les commerces par les gens devant nourrir leur famille. Certains étudiants pourraient aussi se retrouver en situation délicate.

Le gouvernement a cherché à structurer les réponses des services provinciaux, communaux et associatifs.
Un dispositif s’organise ainsi : les services provinciaux et communaux dressent actuellement des listes de personnes dans le besoin. Des bons alimentaires sont distribués à domicile.

Ensuite, Zero Waste Pacific collecte les invendus de la grande distribution. Les produits sont déposés auprès de la banque alimentaire Dorcas, installée dans les locaux de l’église évangélique de Pentecôte, à Normandie, qui les répartit à son tour en lots pour les associations caritatives (Croix-Rouge, Saint-Vincent-de-Paul, Secours catholique…), structures d’accueil (foyer Béthanie, Macadam, les Manguiers…), centres communaux d’action sociale (CCAS), squats, épiceries solidaires… Cette distribution est ouverte à toutes les structures et certaines viennent de loin. La province Nord serait en train de mettre en place une organisation similaire, de proximité. Des contributions privées peuvent aussi être faites à la Croix-Rouge, Saint-Vincent-de-Paul et au Secours catholique. Les familles s’organisent par ailleurs dans les districts, un peu partout sur le territoire.

Jean Saussay, collaborateur d’Isabelle Champmoreau au gouvernement pour le handicap, la famille
et la solidarité, Olivier Bouissou, gérant de Zero Waste Pacific, et Louis Levant, le pasteur de l’église évangélique de Pentecôte, et responsable de la banque alimentaire Dorcas.

Réorganisation de l’accueil des personnes handicapées

Les centres d’hébergement pour personnes en situation de handicap ou de dépendance restent ouverts avec des règles strictes de confinement. Les structures d’accueil de jour, à l’instar de la maison Gabriel-Poédi, à Nouville, accueillent désormais leurs pensionnaires également la nuit, pour qu’ils évitent de trop circuler. Pour les autres, un service de prise en charge à domicile est mis en place. Le gouvernement a par ailleurs recensé 13 travailleurs indépendants handicapés qui ne sont plus en activité et ne bénéficient pas du minimum handicap. L’apport d’une aide minimum est en préparation.

Prise en charge des personnes âgées

Les CCAS, centres communaux d’action sociale, sont en première ligne pour recenser et suivre les personnes âgées dans le besoin. La Croix-Rouge est également sur le terrain. Elles peuvent bénéficier de bons alimentaires, de livraison de courses et d’un soutien psychologique.

Dès la mi-mars, les établissements accueillant les personnes âgées, sur les recommandations de leur fédération (FEAPA), se sont soumis à un confinement strict avec l’arrêt des visites familiales, l’arrêt des intervenants paramédicaux et autres intervenants extérieurs. Les mesures d’hygiène et de protection ont été renforcées. Puis les équipes ont également été placées en confinement. Pour l’instant, cette règle n’est pas obligatoire, mais elle pourrait le devenir.

Violences intrafamiliales

C’est l’une des principales hantises des autorités : le risque accru de voir se produire des violences conjugales et intrafamiliales. Le confinement constitue un terreau propice, les interventions relatives à ces violences ont augmenté de 30 % en Métropole.

Les dispositifs d’urgence restent opérationnels : les témoins, comme les victimes, peuvent contacter le 17 (police ou gendarmerie), le 15 (Samu) ou le 18 (pompiers). Les associations du secteur maintiennent, par ailleurs, des permanences téléphoniques comme SOS écoute (05 30 30). Pour plus de discrétion, le gouvernement a mis en place avec l’OPT un numéro, le 50 00 67, sur lequel on peut envoyer un SMS en laissant son nom et son adresse. Une réflexion est par ailleurs en cours avec l’ordre des pharmaciens pour pouvoir rendre possible le signalement des victimes dans les officines.

Les personnes peuvent toujours contacter le dispositif d’accueil des victimes du Médipôle, la Dpass, le centre d’accueil des femmes en difficulté à Koné, la Dacass dans les îles. L’association Béthanie (27 37 75) propose un accueil d’urgence à Trianon et au centre-ville pour une soixantaine de femmes nécessitant un retrait immédiat de leur domicile. Six places leur sont réservées au foyer Jean-Calvin.

L’État, représenté par Florence Ghilbert- Bezard, commissaire déléguée à la province Sud, a ajouté que les forces de l’ordre, police et gendarmerie nationale, sont particulièrement attentives à ces questions et que l’accueil et le soutien du public en la matière sont assurés. Le procureur de la République, Yves Dupas, a précisé sur les ondes de RRB, lundi, que le sujet était aussi une priorité absolue de la justice.


« Croix-Rouge chez vous »

La délégation territoriale de la Croix-Rouge française, déjà mobilisée sur l’accueil et l’animation du centre de quarantaine de Koutio, a instauré l’opération « Croix-Rouge chez vous » qui fonctionne dans 80 départements en Métropole. Le dispositif d’écoute et de livraison solidaire est destiné aux personnes vulnérables, isolées et non accompagnées du Grand Nouméa. Elles peuvent appeler le 23 26 99, du lundi au vendredi, de 8 h à 12 h, pour bénéficier d’un soutien psychologique. Elles ont aussi la possibilité commander des produits alimentaires, qui sont livrés à domicile le mardi et le vendredi. Les Calédoniens qui souhaiteraient apporter leur aide à cette opération en tant que bénévoles peuvent contacter le même numéro.


Mesures provinciales

Les élus de l’assemblée de la province Sud ont voté, jeudi dernier, une modification de la réglementation sanitaire pour donner la possibilité aux résidents du Sud bénéficiaires de la carte A de l’aide médicale de consulter, durant cette période exceptionnelle, tous les professionnels de santé et non plus seulement ceux relevant du secteur public ou conventionnés avec la province Sud. Il a aussi été décidé de proroger automatiquement les cartes d’aide médicale Sud. Par ailleurs, dans un souci de réactivité accrue, la collectivité a décidé d’exonérer d’entente préalable le transfert des patients de l’aide médicale des établissements publics de soins vers les établissements privés.

De son côté, la province Nord a fait savoir que les allocations minimum-vieillesse ont été mandatées et que les droits des bénéficiaires de l’aide médicale gratuite, qui arrivent à expiration, seront reconduits et prolongés jusqu’au 30 avril. Un numéro gratuit a été mis en place pour répondre aux questions en matière de santé et de social : le 05 00 70.


Des créneaux dédiés dans les magasins et marchés

Des créneaux d’ouverture réservés aux personnes vulnérables sont en train de se mettre en place dans les hyper et supermarchés et marchés volontaires comme Géant ou le marché de Boulari. Ces créneaux sont réservés aux personnes âgées, handicapées, aux femmes enceintes… Ils sont aussi ouverts au personnel prioritaire, sanitaire, aux forces de l’ordre, etc.


Des consignes traduites dans toutes les langues

Afin que toutes les communautés puissent comprendre parfaitement l’ensemble des mesures de confinement, le gouvernement travaille sur la traduction. Un appel a été lancé auprès des locuteurs afin de traduire les différents messages des autorités de santé. L’Académie des langues kanak est pleinement mobilisée sur cette mission pour rendre les messages compréhensibles dans les 28 langues, sans compter le wallisien et le futunien. Le Covid-19 peut potentiellement se répandre sur tout le territoire, d’où l’importance que les mesures barrières soient pleinement appliquées partout, tout comme le respect du confinement, y compris dans les tribus.


Des attestations inclusives ?

Le gouvernement réfléchit avec le collectif Handicaps à la mise en œuvre d’une attestation de déplacement inclusive ou imagée pour tous ceux pour qui ont des difficultés avec la lecture et la compréhension des écrits.

C.M.