Le Sénat coutumier a enfin son président

Le congrès du Pays kanak était réuni, jeudi 29 et vendredi 30 août, au Sénat coutumier afin de faire le bilan de la dernière mandature et procéder à l’élection du nouveau président de la deuxième institution de la Nouvelle-Calédonie. Le congrès a également été l’occasion d’engager des réflexions sur l’avenir du Sénat.

S’il est peut être encore un peu tôt pour parler d’unité, une chose est sûre, la deuxième institution de la Nouvelle-Calédonie a retrouvé la sérénité. Après une élection chaotique qui avait viré au pugilat en 2018, les aires se sont retrouvées dans l’enceinte du Sénat coutumier de Nouville, jeudi 29 et vendredi 30 août. Deux jours de travail qui avaient pour objectif de rétablir et faire oublier les deux dernières années au cours desquelles le secrétaire général avait été écarté.

Plus récemment, en juin, le tribunal administratif avait annulé la désignation de Clément Grochain à la présidence du Sénat. Les représentants des aires se sont donc retrouvés la semaine dernière sous le patronage d’un président par intérim. Les veilles querelles ne sont peut-être pas totalement enterrées, mais tout le monde semble avoir mis de l’eau dans son vin et les discours prononcés lors des gestes de bienvenue ont tous souligné le besoin d’unité. Il faut dire que les enjeux pour le Sénat sont nombreux.

« Nous devons réfléchir à la place de l’institution et de l’identité kanak dans l’avenir du pays, a indiqué Luc Wéma, le porte-parole du Sénat et sénateur de l’aire Ajië-Arhö. Nous avons une lourde tâche, il y a beaucoup de sujets à traiter sous cette mandature et notamment sur la charte qui a été présentée en 2014 ou encore sur la réorganisation de l’institution. » Avant la désignation du président, les représentants des aires, les deux jours ont été l’occasion de définir les priorités à venir au travers d’ateliers de réflexion.

Meilleure prise en compte de l’identité kanak

Il a notamment été question du mode de désignation des sénateurs. Ces derniers sont aujourd’hui désignés par les aires coutumières. Il est prévu de remplacer ce mode de désignation par une élection. Un changement qui inquiète quelque peu les sénateurs coutumiers qui préfèreraient que la décision soit prise par les aires voire les chefferies. La question de la place des femmes au sein de l’institution a également été abordée. Enfin, cette problématique d’ouverture du Sénat a porté sur la possibilité d’intégrer d’autres communautés au sein de l’institution.

Le quatrième dossier, qui a occupé les participants aux débats et qui revient régulièrement, est la place du Sénat dans le schéma institutionnel de la Nouvelle- Calédonie. Il est question de voir quelle est la place de la culture kanak dans les politiques publiques, une place souvent jugée marginale. Pour Didier Poidyaliwane, le membre du gouvernement en charge des affaires coutumières, la meilleure prise en compte de l’identité kanak dans les politiques publiques passera par plus de cohésion et de stabilité au sein du Sénat.

C’est tout ce que souhaite le nouveau président, Hippolyte Wakewi Sinewami-Htamumu, l’un des sénateurs de l’aire Nengone qui vient d’entrer dans l’institution en remplacement de son père, David Buama Sinewami, disparu début mars. Le représentant de Maré, âgé de 41 ans, qui devrait être intronisé grand chef de la Roche en 2020, appelle à la cohésion et mesure pleinement sa responsabilité. « Il faut changer les mentalités des sénateurs et redéfinir l’essentiel, estime le nouveau président. Il existe un monde visible, matériel et un monde invisible. Ce monde invisible est un élément important de l’identité kanak que l’on doit affirmer. » Pour le nouveau président, la prise en compte de l’identité kanak doit être l’une des priorités de l’institution.

M.D.

©M.D. DNC