Lancement de la campagne pour le référendum

Après le tremplin promis ou pas des municipales, la campagne du deuxième référendum est lancée. Si les indépendantistes organisent des rendez-vous depuis déjà quelques semaines, les loyalistes ont dévoilé, mercredi, leur stratégie. Le 4 octobre est dorénavant au cœur du débat et Édouard Philippe, lors de son discours de passation, l’a rappelé.

Fait rare et notable, l’ex-Premier ministre, Édouard Philippe, a donc évoqué le dossier calédonien lors de son discours de passation à Matignon avant de donner le flambeau à Jean Castex. Il a d’abord tenu à saluer les forces politiques du Caillou avant de parler du processus : « Le processus extraordinaire qui a été engagé en Nouvelle-Calédonie, bien avant ce gouvernement et poursuivi par beaucoup de Premiers ministres depuis Michel Rocard, est un processus fascinant, difficile, complexe, incertain encore. Mais il faut rendre hommage à nos concitoyens du Pacifique qui œuvrent pour essayer de trouver les bonnes solutions pour cette île incroyablement attachante. »

Les groupes politiques locaux ont, bien entendu, réagi à ce message. À l’Avenir en confiance, Sonia Backes a souligné l’implication d’Édouard Philippe dans le dossier calédonien. « Il a passé des heures et des heures avec nous. Il nous téléphonait et nous voyait le plus souvent possible. Ça lui permettait d’avoir une connaissance très fine de la Nouvelle-Calédonie. Quand il fallait trancher, il tranchait. On l’a vu sur la dernière décision, sur l’autorisation du bleu, blanc, rouge pour la campagne officielle du référendum. C’était, en tout cas, un très bon interlocuteur pour le territoire », a-t-elle dit.

Côté indépendantiste, Louis Mapou, de l’UNI, a indiqué qu’il regrettait « ce changement d’interlocuteur en cette période d’instabilité. Nous avons là un nouveau Premier ministre, dont on ne sait pas trop l’état d’esprit dans lequel il va s’inscrire, à trois mois du second référendum, alors que nous avons de nombreux chantiers qui n’ont pas été poursuivis ». Victor Tutugoro (UPM) regrette lui aussi cette démission, car « Édouard Philippe avait vraiment pris à cœur le sujet calédonien qu’il aurait pu accompagner de manière positive ». Pour Roch Wamytan, « on sentait qu’il marchait dans le sillage de Michel Rocard », enfin pour Louis Kotra Uregei, du Parti travailliste, « cela ne change rien au combat indépendantiste. »

Le tremplin des municipales

Si l’intervention d’Édouard Philippe a mis en exergue le processus calédonien à Paris, elle signe en même temps le lancement de la campagne pour le deuxième référendum, à peine les municipales terminées. Des communales qui ont, par la même occasion, fait ressortir une certaine radicalisation des partis du camp indépendantiste. Car comme annoncé par les composantes du FLNKS entre les deux tours, les municipales leur ont servi de tremplin à l’élection référendaire. Le positionnement récent de Daniel Goa et son durcissement de ton dans sa dernière lettre ouverte a fonctionné, permettant à l’UC de prendre le pas sur l’UNI. En même temps, les indépendantistes ont recueilli plus de sièges dans le Grand Nouméa les rendant plus optimistes que jamais. Et même si le taux de participation aux municipales n’a pas atteint des sommets, on remarque que l’électorat indépendantiste s’est un peu plus mobilisé, une mobilisation provenant donc de la ligne politique définie par le président de l’UC et dont l’objectif, le 4 octobre, si ce n’est de remporter le scrutin, est de faire simplement mieux que le 4 novembre 2018.

Mwâ Kââ contre publicité

Le bureau politique du FLNKS a organisé, samedi, une journée de mobilisation au Mwâ Kââ dans le cadre de sa campagne pour le oui à l’indépendance. Ce rassemblement avait pour objectif d’inciter les gens des îles Loyauté résidant à Nouméa à s’inscrire dans les bureaux de vote délocalisés (lire plus bas). Selon le FLNKS, 8 000 personnes seraient concernées. Le Front, qui s’approvisionne également en autocollants et drapeaux identitaires afin de de se démarquer visuellement.

Du côté des non-indépendantistes, la campagne pour le non a été officiellement lancée, ce mercredi après-midi, par l’Avenir en confiance, à l’initiative de l’union des loyalistes. Les détails ont été expliqués lors d’une conférence de presse organisée au 1881, à Nouville, avec les représentants de tous les partis présents dans cette union, à savoir Générations NC, le Rassemblement-LR, les Républicains calédoniens, le Mouvement populaire calédonien, le Rassemblement national et Tous calédoniens, et pour dire : « Ensemble, nous serons plus forts pour dire non à l’indépendance. Notre but est de construire la Calédonie de demain, de construire une société forte où chacun doit pouvoir se reconnaître et construire son avenir sereinement dans la France ».

Cette campagne, qui a débuté la semaine dernière par des affichages 4 x 3 avec des « J’aime » sur des illustrations représentatives de la Nouvelle-Calédonie, a pu susciter des questions auprès du grand public qui trouve généralement le message « trop timide », compte tenu de l’échéance et des enjeux. Des éclaircissements ont ainsi pu être développés, ce mercredi, devant la presse par les interessés, nous y reviendrons plus en détail dans notre prochaine édition. En bref, cette opération de communication va se décomposer en une campagne d’affichage et de messages et la présence d’ambassadeurs. Elle pourrait être accompagnée d’autres opérations de communication plus fortes et purement identitaire bleu, blanc, rouge d’ici le référendum.

Quoi qu’il en soit, la campagne pour le 4 octobre est lancée avec l’objectif, dans chaque camp, d’améliorer son score par rapport au référendum de 2018. Un score qui déterminera le sens des négociations qui suivront et le poids de chaque camp à Paris et, accessoirement, devant l’ONU.


Le Parti travailliste appelle à voter « oui »

Le parti indépendantiste, qui avait appelé ses sympathisants à s’abstenir au premier référendum, a décidé de changer son fusil d’épaule pour la consultation d’octobre. Si le Parti travailliste considère toujours que ce scrutin n’est pas un référendum d’autodétermination, ses cadres et représentants ont décidé d’appeler au vote pour le oui. Ce retour, après une « absence justifiée », comme l’explique Louis Kotra Uregei, est aujourd’hui nécessaire pour « affirmer le nationalisme kanak pour l’indépendance kanak socialiste ». « Nous appelons nos gens à se mobiliser pour affirmer la revendication d’indépendance dans le vote du oui à ce référendum. » Le Parti travailliste précise que pour cette campagne, il est hors de question de s’associer à d’autres partis et d’intégrer les comités nationalistes citoyens du FLNKS.

D.P.

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