La vaccination, une course contre la montre

La mobilisation est totale. Depuis une semaine, les vaccinodromes se déploient à travers le pays et 300 volontaires ont répondu à l’appel du gouvernement pour participer à l’organisation. Malgré une cadence soutenue, la couverture vaccinale progresse très lentement.

 

« Vacciner vous, s’il vous plait, massivement« , implore le docteur Thierry de Greslan, président de la commission médicale d’établissement du CHT, lors du point presse du mardi 14 septembre. Ce message est aussi martelé jour après jour par l’ensemble de la classe politique, indépendantiste ou non. Il y a deux mois, le président, Louis Mapou, affirmait que la « vaccination est la seule clé pour rouvrir les frontières ». Aujourd’hui, c’est peut-être la seule alternative pour éviter la situation dramatique vécue en Polynésie. L’enjeu n’est plus tout à fait le même. La vaccination est devenue « l’arme principale contre la crise », selon Yannick Slamet, le porte-parole du gouvernement, qui brandit l’étendard à chaque intervention.

Une dizaine de jours après la détection des premiers cas, les centres de vaccination se sont multipliés dans les trois provinces. À Nouméa, le centre Cafat du Receiving et le Médipôle reçoivent sur rendez-vous, contrairement à Ko We Kara et à hôtel de ville de la mairie de Nouméa. Des vaccinodromes éphémères ont été organisés au centre culturel de Boulari et à La Foa. D’autres vont être mis en place, samedi 18 septembre à Nouville, au foyer wallisien et au Congrès. En province Nord, les centres hospitaliers de Koumac, Koné et Poindimié s’organisent pour accueillir les volontaires à la vaccination. À Poya, Houaïlou, Koumac, Hienghène, les dispensaires vaccinent non- stop de 8 à 16 heures jusqu’au samedi. En province des Îles, on vaccine aussi à tour de bras à La Roche, à Maré et Hulup et Saint- Joseph, à Ouvéa et dans la capitale Drehu, We ainsi que dans les « vacci’tribs ».

28 % de vaccinés

Le gouvernement annonçait avoir dépassé, au cours du week-end, le cap des 100 000 primo injections. « C’est un résultat encourageant qui illustre la prise de conscience de la population et la forte mobilisation des provinces et des communes », estime le Dr Sébastien Mabon, de la Dass. Le taux de vaccination complète est passé de 26,61% à 28 % en une semaine. « Il ne faut pas relâcher, on a senti un frémissement au début de la crise, mais il y a un tout petit ralentissement », observait Yannick Slamet. Pour assurer les injections, plus de 200 dentistes, vétérinaires, manipulateurs radio, pharmaciens, laborantins, sages-femmes ont été réquisitionnés. Ils ont tous reçu une courte formation à l’Institut de formation des professions sanitaires et sociales pour se familiariser avec les gestes techniques, notamment.

Mais cela ne suffit pas. L’ensemble des pouvoirs publics a donc lancé un appel aux volontaires auquel 300 personnes ont répondu. Cette réserve sanitaire locale est constituée de professionnels du secteur médical et paramédical, de libéraux et de retraités. Des élus ont aussi repris leur casquette professionnelle pour contribuer à l’effort, comme le Dr Luc Brun, anesthésiste, Tristan Derycke, chirurgien, tous deux élus à la mairie de Nouméa, ou Maurice Tillewa, le maire d’Ouvéa, infirmier de profession. Reste à savoir combien de temps cette mobilisation va tenir. D’ici quelques jours, la fatigue va s’installer et les relais seront indispensables. Une mission nationale de sept experts est donc sur le terrain depuis mercredi pour évaluer les besoins des renforts, car la venue d’une réserve nationale a été sollicitée. Le gouvernement vient d’autoriser les médecins libéraux et les pharmaciens à vacciner dans leur cabinets et officines. La course a commencé sur les chapeaux de roues, mais les experts estiment qu’une couverture vaccinale d’au moins 70 % sera nécessaire pour que notre système hospitalier puisse prendre en charge les personnes malades. On en est encore loin du compte.

 

Virginie Grizon

 


347 personnes ont reçu la troisième dose

Alors que les experts de l’Organisation mondiale de la santé ont récemment fait part de leur doute concernant l’intérêt de la troisième dose de vaccin, particulièrement injuste pour les pays pauvres, le gouvernement de la Nouvelle- Calédonie a annoncé, vendredi 10 septembre, la mise en place du dispositif de rappel. En clair, une troisième dose de Moderna peut être injectée aux plus de 65 ans et personnes prioritaires (personnel médical, navigant…) qui ont reçu leur deuxième injection il y a plus de six mois. Dès lundi, plus de 200 personnes avaient effectué la piqûre de rappel à Ko We Kara et 120 à la mairie de Nouméa, à l’image de Liliane Tonazzi qui a plus de 65 ans. « C’était une évidence pour moi, j’ai eu un cancer du sein il y a 16 ans et depuis, je fais l’objet d’une surveillance particulière », précise- t-elle. Mardi, 347 personnes avaient reçu leur dose de rappel. Si les Ehpad n’ont pas encore franchi le pas, ils ne devraient plus tarder. « J’attends l’accord de la Dass et nous avons besoin de nous organiser, mais ça va se faire très rapidement », confirme le docteur Nicolas Toga, directeur de La Palmeraie à Païta, qui précise que les 27 salariés et les 39 résidents de l’établissement ont tous été vaccinés.


Les Loyauté rattrapent leur retard

Avec moins de 10 % de la population vaccinée en début d’épidémie, les îles Loyauté rattrapent peu à peu leur retard. « Mais il y a du boulot », reconnaît Yves-Marie Ducros, médecin référent Covid, qui précise qu’à Lifou, une partie de la population s’est laissée convaincre par les antivax avant le début de crise. Peu à peu, devant l’urgence de la situation, les Loyaltiens réticents changent d’avis. « Dimanche 12 septembre, nous avions vacciné avec une première dose 36 % de la population et 10 % avaient reçu leur deuxième injection sur Maré, Lifou et Ouvéa », précise-t-il. Quant à Tiga, une équipe a vacciné, le même jour, 64 % de la population éligible, ce qui représente 46 % de la population totale. « On avance bien sur Lifou. Un peu moins sur Maré et Ouvéa où nous mobiliserons les renforts en termes de personnel si cela se présente », affirme Yves-Marie Ducros. Plusieurs pharmacies des îles Loyauté se préparent à vacciner en officine. Les médecins libéraux sont aussi habilités à le faire.


Les médecins et pharmaciens autorisés à vacciner

Les médecins, infirmiers et pharmaciens sont autorisés à prescrire et à administrer le vaccin dans leurs cabinets et officines. D’autres professionnels, préparateurs en pharmacie, sapeurs-pompiers, kinésithérapeutes et étudiants en santé, sont autorisés à vacciner dans les centres de vaccination sous la responsabilité d’un médecin, sous condition d’une formation préalable. Concernant les tests rapides d’orientation diagnostic de type antigéniques, ils peuvent désormais être réalisés en pharmacie et chez les professionnels de santé libéraux pour les personnes qui présentent des symptômes.