La précarité étudiante en hausse

Quentin et Évangelia, étudiants en master MEEF EPS, logent sur le campus de Nouville. Sans moyen de locomotion, ils s’interrogent sur la façon dont ils vont se déplacer lors de leurs périodes de stage, durant l’année. (© N.H.)

Augmentation du prix des tickets de bus, suppression de certaines bourses et diminution des aides… L’année 2025 s’annonce difficile, pour certains étudiants. Témoignages.

À l’intérieur de l’épicerie solidaire de Nouville dont elle est la présidente depuis quelques mois, Maéva présente succinctement les produits proposés aux étudiants. Riz, pâtes, œufs, café, produits d’hygiène, vêtements, livres… « Nous avons essentiellement des produits de première nécessité. Tu paies 200 francs l’année et tu peux bénéficier deux fois par semaine de cinq articles à chaque fois que tu viens. »
Un fonctionnement qui a vu son utilité grandir en 2024. À la suite du 13 mai, « le nombre d’adhérents est passé de 100 à presque 300 personnes », précise Maéva. Une période que Rosina, étudiante logeant sur le campus de Nouville, se remémore : « Au moment des émeutes, avec ma tante, on faisait des grandes marmites de nourriture qu’on proposait aux étudiants bloqués sur le campus. […] On était vraiment solidaires entre nous ».
Depuis l’augmentation du prix des tickets de bus, celle qui passe en seconde année de BTS MHR (Manage- ment en hôtellerie restauration) au lycée Escoffier rencontre davantage de difficultés. Impossible pour elle d’envisager prendre le car matin et soir, comme elle le faisait l’année précédente. Alors, pas le choix : « Je prends le taxi 1000 [nom donné aux transporteurs sans licence qui se sont créés au lendemain du 13 mai, NDLR], c’est plus facile. En plus, ils font des tarifs pour les étudiants. Ça m’aide beaucoup ».

MOINS D’INSCRIPTIONS À L’UNIVERSITÉ
Outre la problématique du transport, certains étudiants s’inquiètent de la suppression ou la diminution de leur bourse. C’est le cas d’Evangelia, étudiante en master MEEF EPS. Originaire d’Ouvéa, la jeune femme comptait jusqu’alors sur l’aide de la bourse d’État, celle de la province des Îles ‒ qui a diminué ‒, mais également sur l’aide communale, supprimée dernièrement. Si elle sait qu’elle « peut compter sur [ses] parents », l’étudiante s’interroge néanmoins pour les mois à venir. « Je sais que je vais devoir faire attention à mes dépenses. »

Maéva, étudiante en troisième année de lettres modernes, est l’actuelle présidente de l’épicerie solidaire de Nouville, créée il y a huit ans sur le campus.

Cette augmentation de la précarité, l’équipe de la Maison de l’étudiant en est témoin. Sur les 10 millions de francs versés par le CNOUS (Centre national des œuvres universitaires et scolaires) pour les aides spécifiques aux étudiants (dont l’aide au transport), trois millions ont été dépensés depuis la rentrée universitaire. « Il y a beaucoup d’étudiants dont les parents travaillaient l’année dernière et se sont retrouvés sans emploi récemment. Or, comme les bourses sont octroyées sur les revenus de l’année précédente, ils ne peuvent pas en bénéficier », pointe Yannick Lerrant, directrice de la Maison des étudiants.
Autre inquiétude : l’avenir de l’aide au logement. Celle-ci peut actuellement couvrir les loyers étudiants jusqu’à 80 %. Mais « vu la situation financière de la Nouvelle-Calédonie, est-ce que cette aide va être maintenue ? C’est un gros souci ». En conséquence, une possible diminution du nombre d’inscriptions à l’université est crainte. « Je pense qu’il y a plusieurs raisons à cela. Il y a des étudiants qui ont préféré partir faire leurs études en Métropole pour travailler dans de meilleures conditions, mais il y a aussi des familles qui n’ont plus les moyens d’assumer les études de leurs enfants et ceux-ci doivent trouver un travail », regrette Yannick Lerrant.

Nikita Hoffmann