La formation continue, une des réponses à la crise économique et sociale

Les élèves en formation continue ont fait leur rentrée administrative mercredi 5 mars, suivie de leur premier cours. © F.D.

L’insurrection du 13 mai 2024 a provoqué un effondrement du marché de l’emploi et le départ de nombreux salariés qualifiés. Face au chômage massif, la formation continue constitue un des leviers pour former les travailleurs et apporter des réponses aux entreprises.

En moins d’un an, 11 600 emplois ont été détruits, portant le chômage à un niveau critique, alors que le secteur privé totalisait quelque 68 000 personnes avant la crise. En parallèle, la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) estime entre 10 000 et 11 000 le nombre de Calédoniens ayant quitté le territoire, entraînant une « perte de compétences », en particulier dans les métiers techniques et spécialisés. Avant même l’insurrection, l’économie calédonienne connaissait déjà d’importantes difficultés, et de nombreux secteurs, comme celui de la santé, peinaient à recruter des profils qualifiés.
L’Institut de la statistique et des études économiques (Isee) souligne également que les habitudes de consommation pourraient avoir changé, ce qui à son tour modifierait les besoins en compétence des entreprises. Face à ces bouleversements, l’Université de la Nouvelle-Calédonie (UNC) renforce son offre de formation continue, en lien étroit avec le monde socio-économique.

UN LEVIER POUR L’AVENIR
« Il y a un vrai besoin de monter en compétence. On a des professionnels qui veulent évoluer, des entreprises qui identifient des axes à renforcer et des demandeurs d’emploi qui doivent se reconvertir », explique Laurence Levert, directrice du pôle formation continue et alternance de l’Université.
Elle souligne cependant que les entreprises ne sont pas encore dans une démarche proactive de formation, étant pour l’instant surtout concentrées sur leur survie. « Notre rôle, c’est d’anticiper et de structurer une offre qui leur sera essentielle pour l’après, parce qu’il y aura un après. »
Si l’UNC reste encore méconnue pour son offre de formation continue, elle entend aujourd’hui changer cette image, en facilitant notamment l’accès aux demandeurs d’emploi grâce à des tarifs aménagés. Cette refonte passe aussi par une meilleure articulation avec les formations initiales, qui représentent près de 1 000 cours accessibles.

UNE FORMATION SUR MESURE ET ACCESSIBLE SANS LE BAC
Une des grandes forces de la formation continue est d’être extrêmement modulable, en s’adaptant aux besoins des stagiaires, mais aussi à ceux du marché de l’emploi. Cela a été le cas pour la création du diplôme universitaire (DU) Handicap, inclusion et management, initié à la demande du collectif Handicap. Cette démarche se poursuit avec l’ouverture du DU Ethnomédecine et DU Droit coutumier kanak, qui sont en cours de recrutement.
« Dans mon quotidien, cette formation me permet de ne pas commettre d’impair en ce qui concerne les questions commerciales sur le domaine du foncier coutumier […]. C’est également un outil qui permet de comprendre le mode de fonctionnement de la société kanak, notamment dans les relations avec les tiers, comme dans le cadre de contrats commerciaux », témoigne Florent Tavernier, un juriste d’un cabinet de conseil juridique qui a suivi le DU Droit coutumier kanak pour acquérir de nouvelles compétences. Kimberley a, quant à elle, souhaiter évoluer dans sa carrière en obtenant le DU de professions immobilières. « Je suis établie et épanouie sur un poste de commercial [vente-location] en Polynésie française, dans lequel j’ai été promue sur un poste 50 % commercial et 50 % chargée de communication », explique la jeune femme diplômée depuis un an qui occupait initialement un poste d’agent administratif.
Pour plus de flexibilité, ces diplômes peuvent être découpés en certificats universitaires permettant une formation progressive de façon à la rendre accessible à tous.
L’UNC propose aussi des alternatives pour les personnes qui ne disposent pas du bacca- lauréat, mais souhaitent tout de même valider un diplôme. La validation des acquis de l’expérience (VAE) permet ainsi aux professionnels de faire reconnaître leur expertise et leur professionnalisme pour obtenir une certification universitaire. Autre dispositif clé, la capacité en droit, ouverte aux non-bacheliers, offre la possibilité d’acquérir des bases solides en droit et, pour ceux qui le souhaitent, de poursuivre vers une licence de droit. Un service dédié accom- pagne les stagiaires dans la construction d’un parcours de formation adapté à leur profil et à leurs objectifs professionnels. « On est là pour accompagner tous les parcours, tous les individus. Même si le besoin n’est pas encore clair, il faut venir nous voir », insiste Laurence Levert.

UN ENJEU STRATÉGIQUE POUR L’UNC ET LE TERRITOIRE
Alors que le marché de l’emploi peine à se stabiliser, la formation continue apparaît comme un outil stratégique pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie. Dans un contexte économique fragile, l’UNC veut se positionner comme un partenaire majeur pour les professionnels et les demandeurs d’emploi en quête de reconversion.
« Dans un contexte économique fortement dégradé en attente de reprise, l’UNC affirme son rôle important pour le développement des compétences en Nouvelle-Calédonie », précise l’Université. Reste à ce que travail- leurs et employeurs s’approprient cette offre pour en faire un levier de reconstruction économique.

M.D.

L’UNC forme chaque année près de 500 personnes en formation continue et délivre en moyenne plus de 200 diplômes : DAEU, DU, licences professionnelles, licences et masters, etc.