La Calédonie majoritaire à la SLN ?

À l’occasion d’une rencontre avec les adhérents du Medef NC, André Dang à la tête de la société territoriale calédonienne de participation industrielle (STCPI) a confié que le Premier ministre avait réaffirmé l’engagement de l’État pour que la Nouvelle- Calédonie devienne l’actionnaire majoritaire de la SLN. Une petite bombe tempérée par Philippe Gomès qui a annoncé l’intention de la STCPI d’utiliser son prêt pour une avance de trésorerie.

A ndré Dang est en pleine révolution. Le président du conseil d’administration de la STCPI ne mâche pas ses mots à l’encontre d’Eramet, la société mère de la SLN. Le sulfureux patron de la SMSP, à l’occasion d’un petit-déjeuner de présentation de sa société aux membres du Medef-NC mardi matin, a insisté sur le fait que le temps où Eramet dictait sa loi à la SLN était terminé. Pour l’homme de l’usine du Nord, c’est la gestion calamiteuse d’Eramet, entre autres la transformation des près 100 milliards de francs de trésorerie de la SLN en dividendes, qui a conduit le Nickel dans la situation critique où elle se trouve aujourd’hui.

L’annonce de Manuel Valls d’un prêt à la STCPI pouvant atteindre les 200 millions d’euros, a suscité de nombreuses questions sur lesquelles les actionnaires calédoniens se sont penchés, mercredi soir, lors d’un conseil d’administration. Deux options s’offraient à la STCPI : se servir de l’enveloppe pour effectuer une avance de trésorerie à la SLN ou l’employer à une recapitalisation. À l’issue de la réunion, c’est Philippe Gomès, en tant que président délégué de la STCPI, qui a pris la parole pour annoncer que la société territoriale était d’accord pour un prêt qui, a priori, servirait d’avance de trésorerie. Un oui, donc, qui comporte toutefois un « mais ». Car les Calédoniens veulent tout négocier. L’annonce de Manuel Valls, aussi généreuse soit-elle, manque de précisions, notamment sur la durée du prêt comme sur le taux.

Un prêt pour monter au capital

Si rien n’est encore définitivement acté, la STCPI semble privilégier l’avance de trésorerie au détriment de la recapitalisation. Une décision étonnante quand on connaît les positions de Philippe Gomès et d’André Dang sur le sujet, d’autant plus que la veille, le patron de la SMSP avait défendu la recapitalisation. L’avance de trésorerie étant selon lui un frein au cas où la SLN aurait à lever des fonds, notamment si la conjoncture défavorable devait perdurer. Ce qui est certain, c’est qu’il n’est pas question d’emprunter 200 millions d’euros ou 24 milliards de francs. Les représentants de la SCTPI entendent apporter leur contribution à hauteur de leur participation au capital (34 %) et pas davantage.

À quelques jours du conseil d’administration d’Eramet prévu le 9 mai, le message est clair et pas seulement pour Eramet. André Dang renvoie notamment à ses responsabilités le Japonais Nisshin Steel qui détient 10 % du capital de la SLN. Le président de la STCPI estime que l’actionnaire japonais doit assumer ses responsabilités en apportant lui-même des fonds à hauteur de ses participations. Peut-être un peu revanchard, André Dang avait glissé mardi, d’un ton badin, que les conseillers du Premier ministre s’étaient entendus avec Paul Néaoutyine sur la rédaction d’un courrier censé rappeler la volonté de l’État que se réalise la montée de la STCPI au capital de la SLN, comme le prévoit le pacte d’actionnaires. Lors de l’entrée de la STCPI au capital de la SLN et d’Eramet, le 13 septembre 2000, le pacte d’actionnaires stipulait que les 4 % de participation de la STCPI au capital d’Eramet pouvaient être échangés contre des actions SLN à raison de trois actions Eramet contre cinq SLN.

Un courrier du Premier ministre d’ici la fin du mois

En plein sauvetage de la SLN, André Dang vient rappeler les vieilles querelles politiques, probablement en réponse à Patrick Buffet, le P-DG d’Eramet peu disposé à voir sortir le Nickel du giron de sa société. Vincent Bouvier, le haut-commissaire, a rédigé dès le lendemain un courrier à propos des « discussions sur l’avenir de la SLN » dans le but de désamorcer cette petite bombe lâchée dans la foulée de la visite ministérielle. Selon Vincent Bouvier, le Premier ministre enverra bien un courrier au président de la province Nord mais simplement pour confirmer la « stricte dissociation entre l’indispensable plan de soutien conjoncturel à la SLN et les accords conclus en 1999 et 2000.» Le haut-commissaire profite également de l’occasion pour souligner que l’État ne gagera pas son prêt sur les actions de la STCPI.

Ce n’est donc peut-être pas un hasard si c’est Philippe Gomès qui a pris la parole à la fin du conseil d’administration de la STCPI, pour rappeler une nouvelle fois que la priorité était le soutien à la SLN. La montée au capital est un autre dossier. Le leader de Calédonie ensemble souhaite peut-être temporiser dans un contexte où les équilibres politiques sont fragiles.

M.D.