La Calédonie affronte à son tour une catastrophe sanitaire

The Ko We Kara Vaccine Centre in Noumea, where 200 injections per hour are given, is very busy. New Caledonia, Noumea, September 8, 2021. Photograph by Delphine Mayeur / Hans Lucas. Forte affluence au vaccinodrome installe a Ko We Kara a Noumea, ou sont dispenses 200 injections par heure. Nouvelle-Caledonie, Noumea, 8 septembre 2021. Photographie par Delphine Mayeur / Hans Lucas. (Photo by Delphine Mayeur / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)

 

Comme on pouvait le craindre, l’épidémie de Covid-19 va exploser. Les autorités n’ont pas attendu pour mettre en œuvre le confinement, optimiser l’accueil des malades, tester et vacciner largement et, in fine, espérer maintenir un système de soins correct. Mais cela n’empêchera pas, malheureusement, une crise durable et de nombreux drames.

 

À peine dix jours après la découverte du variant Delta en Nouvelle- Calédonie, plus de 1 200 cas de Covid-19 ont été confirmés. Chaque jour, 200 à 300 nouveaux cas sont comptabilisés. Si l’épidémie a pris, pour l’instant, une plus grande ampleur en province Sud, le virus circule partout. Quasiment toutes les communes sont touchées, les entreprises également. Personne n’est épargné. On apprend désormais à gérer les cas positifs au travail et à la maison.
Mercredi, 136 personnes étaient hospitalisées et 18 patients en réanimation. Le territoire a aussi rapidement déploré ses premiers morts : quatre personnes âgées ont perdu la vie. Les hospitalisés sont de tous les âges, de 2 à 92 ans. « On voit arriver des gens de moins de 40 ans aux urgences », a commenté le Dr de Greslan. Mardi, le patient le plus jeune en réanimation était âgé de 55 ans.
Les cas graves présentent généralement des comorbidités et ne sont pas vaccinés. Ces hospitalisations confirment notamment que l’obésité, y compris chez les plus jeunes, est un facteur majeur de risque, alors que le pays est largement touché par ce fléau.

 

Saturation

Avec l’augmentation très rapide du nombre de cas et de patients, le Médipôle arrive déjà à saturation. Un appel a été formulé pour une aide immédiate d’infirmières et de médecins locaux. Et une mission nationale d’experts est sur le terrain, cette semaine, pour évaluer le besoin de soignants de la réserve nationale et comment les déployer. Pour amortir les effets sur les hôpitaux qui vont tous être sollicités, les hôtels sont mis à contribution pour accueillir les malades sans gravité, mais qui ont besoin d’une surveillance. 600 personnes pourraient ainsi être accueillies. Les médecins libéraux sont également sur le front chaque jour pour la détection des symptômes et le suivi des patients. Le monde médical se mobilise aussi sur les centres de tests et de vaccination avec pas moins de 300 volontaires en renfort pour assurer ces opérations. Des milliers de tests antigéniques de la réserve sanitaire ont été déployés et l’État envoie vaccins et tests dont nous ne manquons pas pour l’instant. On pourra désormais se faire dépister directement chez le médecin ou en pharmacie.
La préparation au pic épidémique concerne d’autres secteurs comme la production d’oxygène médical. Gazpac tourne à plein régime pour espérer couvrir les besoins relatifs à cette crise. Des établissements de santé se renseignent sur l’achat de conteneurs réfrigéré, les services funéraires s’organisent.

 

Confinés dans la durée

L’enjeu des prochains jours va être de mesurer l’impact du confinement qui a été renforcé – sans que l’on puisse vraiment en déterminer l’utilité – par un couvre-feu dans le cadre de l’état d’urgence décrété au niveau national pour la Nouvelle-Calédonie. Logiquement, le nombre de cas positifs illustrant les contaminations passées devrait diminuer d’ici une semaine. Mais l’impact à l’hôpital ne sera ressenti que deux semaines plus tard. La vaccination se poursuit à rythme important de 5 000 à 6 000 injections par jour. À ce stade, 28,45 % de la population totale a reçu un schéma vaccinal complet et 41,45 % une première dose. C’est encore trop peu pour espérer une incidence à l’échelle de la société. À 50 %, de légers effets pourraient se faire ressentir et à 70 % on pourrait espérer atténuer la pression sur les hôpitaux. La stratégie de dépistage va se poursuivre pour permettre l’isolement des personnes, prévoir les besoins, mais également suivre la courbe épidémique.

Sur la base de toutes ces informations, on peut penser que le confinement va durer un long moment. On sait maintenant que l’on ne retrouvera plus la situation Covid-Free et qu’il faudra vivre avec le virus. La vie ne sera plus la même probablement pour plusieurs années. Le gouvernement a fait état d’un impact économique à « au moins 20 milliards » de francs. La crise sanitaire va continuer à générer des difficultés pour les entreprises, l’emploi, les contribuables. Si l’État a indiqué que le troisième référendum serait maintenu, la crise sanitaire pourrait aussi avoir des répercussions politiques, même peut-être une incidence sur les positions relatives à l’avenir institutionnel. Dans ce contexte, il faudra aussi plus largement rester vigilant sur les règles drastiques qui ont été ou seront instaurées localement, comme la vaccination obligatoire, le pass sanitaire dont on reparle, les mesures aux frontières pour s’assurer qu’elles restent bien corrélées à une situation ponctuelle de crise, qu’elles soient finalement levées et que nous puissions retrouver une liberté de se déplacer, d’agir, avec de réelles perspectives.

 

Chloé Maingourd