KNS s’oriente vers la matte

Neil Meadows est à la tête de KNS depuis l’année dernière. / © A.-C.P.

Le nickel batterie, Koniambo y réfléchit depuis plusieurs mois. Un premier test a été effectué avec une filiale de Glencore, au Canada. Un changement à venir de taille pour l’industriel.

Participer à la « révolution des batteries ». Le président de KNS en est convaincu, Koniambo doit en être un des acteurs. Et pas seulement sur une partie de sa production. « Nous devons nous convertir à 100 %. »

Changer de modèle économique. Neil Meadows est en phase avec les préconisations du rapport de l’IGF, notamment sur la partie matte de nickel. Pour une raison simple. « Les métallurgistes font face à des coûts élevés et une difficulté de rentabilité. Notre ferronickel est moins attractif et moins compétitif que celui d’Asie du Sud-Est. Et il n’est pas prévu que son prix augmente. »

Dans ce contexte, la matte apparaît comme une solution permettant d’atteindre la rentabilité. En devenant « un maillon de la chaîne d’élaboration des batteries, nous pouvons nous attendre, avec la demande et la qualité du produit, à ce que le prix soit meilleur », avance Neil Meadows.

ENVOYER AU CANADA

L’industriel mène des essais dans ce sens, a annoncé le président lors d’une visite de la mine, mardi 8 août. Une étude a été menée sur la possibilité de transformer le ferronickel sur site. Mais, cela ne devrait pas être l’option retenue. Impossible dans la configuration actuelle, cela nécessiterait « la construction d’une nouvelle ligne de conversion, dont le coût ne serait pas négligeable ». Avec un délai de réalisation de trois à cinq ans.

Koniambo Nickel envisage d’alimenter uniquement le marché des batteries. / © A.-C.P.

L’autre option, privilégiée, alimenter une filiale de Glencore au Canada, à Sudbury. « La méthode la plus intéressante et la plus rentable. » Le premier test s’est avéré concluant. Un deuxième est escompté dans les prochains mois. KNS vient d’y envoyer près de 3 000 tonnes de minerai. La matte obtenue est ensuite expédiée dans une autre succursale du groupe en Norvège, avant de fournir le marché des batteries.

Le modèle est envisagé, mais une analyse plus poussée est en cours. « Je ne pense pas que Sudbury puisse capter toute notre production, nous devons regarder l’ensemble de la chaîne pour comprendre comment le site canadien est approvisionné, et il reste à savoir quel prix nous pouvons en obtenir. » Ce qui est sûr, c’est que « nous sommes en accord avec l’idée de vendre de la matte à la France et à l’Europe, et notre actionnaire Glencore, en charge de la commercialisation, ne voit pas de raison de ne pas y aller si la demande est là », commente Neil Meadows.

UN RECORD

Un scénario envisagé au moment où l’usine vient de battre un record. La mise en place d’un nouveau procédé technique a permis d’augmenter la puissance des deux fours à « un niveau jamais égalé ». Résultat, mai, juin et juillet ont été les trois meilleurs mois consécutifs en termes de production avec près de 9 000 tonnes. « C’est un très bon résultat », se félicite Neil Meadows, qui se dit confiant dans la capacité de KNS à y arriver sur de plus longues périodes, 3 000 tonnes mensuelles étant un objectif poursuivi depuis longtemps.

La suite s’écrira à Paris, où les métallurgistes sont attendus début septembre. Il y sera question des pistes avancées par le rapport de l’IGF. De la matte, bien sûr, des exports et de la transition énergétique, surtout. KNS attend la tenue de cette réunion pour lancer l’étude de préfaisabilité de réalisation de la centrale au gaz naturel liquéfié, dont le financement devrait être accordé lors du conseil de direction de novembre.

Anne-Claire Pophillat

Pour la SLN, l’énergie reste « la priorité »

Produire de la matte de nickel ? La SLN le faisait jusqu’en 2015, en plus du ferronickel. Si elle a arrêté, c’est que cela « n’était plus rentable », indique Jérôme Fabre, son directeur général. Sa production pourrait-elle reprendre ? Oui, mais « une étude reste à réaliser afin d’évaluer le point de profitabilité d’une relance », sachant que la SLN « possède toujours les installations et la technicité » pour le faire.

La pertinence de cette approche serait interrogée par les chiffres, estime Jérôme Fabre. « Le nickel métal et alliages représente 82 % du marché du global, contre seulement 12 % pour celui des batteries. » L’urgence est de s’attaquer à la problématique de l’énergie, qui représente 50 % des coûts de l’usine. Doniambo paie « un tarif plus de deux fois supérieur à celui des concurrents indonésiens ». Selon le directeur général, « c’est la priorité pour sauver la filière nickel à court terme ». Car « si l’industrie métallurgique calédonienne bénéficiait des tarifs de l’énergie métropolitaine, elle serait rentable aujourd’hui ».

Jérôme Fabre l’assure, la SLN, « qui maîtrise son procédé et dispose des autorisations d’export lui permettant de valoriser au mieux ses gisements, est positionnée pour affronter les défis des années à venir ».

 

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