Jérémy Stravius : « La Nouvelle-Calédonie est une place forte de la natation française »

Jérémy Stravius a mis un terme à sa carrière haut niveau en 2020, avec l’un des plus beaux palmarès de la natation française. Il a remporté l’or olympique en 2012 avec le relais 4x100 mètres nage libre, ainsi que quatre titres de champion du monde, dont celui du 100 mètres dos en 2011. / © G.C.

Jérémy Stravius est la vedette du Meeting Mobil, qui aura lieu samedi 13 mai au CNC. Le champion du monde 2011 du 100 mètres dos donnera de précieux conseils aux jeunes nageurs qui espèrent être les prochains Calédoniens à atteindre le haut niveau en rejoignant sa ville, Amiens.

DNC : Vous êtes venu en Nouvelle-Calédonie en 2010, juste avant vos premières médailles internationales, pour un stage de 15 jours. Quels souvenirs en gardez-vous ?

Jérémy Stravius : C’est mon meilleur stage, donc j’ai beaucoup de souvenirs. On avait énormément travaillé. On nageait entre 7 et 8 kilomètres par entraînement. On avait fait une compétition en fin de stage : on s’était entraîné avant les séries et on avait refait 4 kilomètres l’après-midi avant les finales.

Je ne l’ai fait qu’une fois, c’était ici. Et puis je me souviens des îles, de la plongée, de la terre rouge, des cascades… On avait fait énormément de choses qu’on fait de moins en moins, parce que les stages sont très centrés sur le sport.

Je prends l’image des bateaux profilés pour leur donner une idée de ce que leur corps doit être dans l’eau.

Dans le court temps qui vous est imparti, qu’allez-vous transmettre aux jeunes nageurs ?

J’ai peu de temps à leur consacrer, et un nageur doit penser à énormément de choses, donc il faut que je fasse simple. Je vais leur répéter quelques conseils essentiels. Il faut que ça s’incruste, que ça rentre.

Souvent, je prends l’image des bateaux profilés pour leur donner une idée de ce que leur corps doit être dans l’eau, ça marche assez bien. Et je serai avec eux dans le bassin pour leur montrer.

Pour la compétition, quel est votre objectif ?

Il faut déjà que je me qualifie pour les finales ! Je dois gérer mais sans trop jouer avec le feu. Je ne connais pas trop mon niveau actuel, je ne sais pas combien de 50 mètres je pourrai enchaîner.

J’ai posé des questions à Thibaut Mary, qui a nagé avec moi à Amiens, je lui ai demandé les temps d’engagement de mes adversaires. Ça va être une belle bagarre !

Thibaut Mary et Maxime Grousset ont beaucoup progressé en rejoignant le club d’Amiens, qui accueille Nathan Hudan, John- William Dabin et Malou Douillard.

Comment expliquez-vous la réussite des Calédoniens à Amiens ?

Ça vient de l’état d’esprit du club. On donne l’opportunité aux jeunes de s’épanouir dans le sport à haut niveau. C’est sûr que ce n’est pas évident de quitter la Nouvelle- Calédonie, d’arriver en Métropole et surtout à Amiens. On est n’est pas à Antibes ou à Marseille…

On est vraiment dans la ville, et puis dans le Nord. C’est dur, mais ce qui rassemble, c’est le côté familial. Thibaut et Maxime sont arrivés ensemble après les Jeux de 2016. On a vécu trois saisons au top : toujours la patate, le sourire, à encourager l’autre malgré la fatigue.

C’est aussi pour ça que je suis resté onze ans dans ce club (il est désormais licencié à Nanterre, NDLR). Et si Amiens a réussi à se faire un nom, c’est aussi grâce aux Calédoniens. De Métropole, on a un regard particulier pour la Nouvelle- Calédonie, qui sort beaucoup de champions. C’est une place forte de la natation française.

Vous avez nagé près de 60 kilomètres par semaine pendant plus de 10 ans. Arrêter le haut niveau, ça a été un soulagement ?

On peut difficilement dire que l’entraînement nous manque… Le jour où on arrête, c’est comme si c’était les vacances qu’on attendait. Ça fait clairement du bien.

C’est aussi très plaisant de ne plus être interdit de sports à risque. Je peux faire du ski, jouer au foot… Le côté moins plaisant, c’est qu’au bout de quatre semaines, le corps change déjà.

Le conseil que je donne, c’est d’en parler à la personne avec qui on a le plus de liens.

Vous avez parlé publiquement de votre homosexualité pour la première fois il y a deux ans, sur France 2. Ici, le sujet reste assez tabou dans le sport. Que conseilleriez-vous à ceux qui souffrent de garder le secret ?

J’avais justement fait cette émission pour aider les jeunes qui appréhendent la réaction de leurs proches. Le conseil que je donne, c’est d’en parler à la personne avec qui on a le plus de liens : le meilleur ami, le frère, la sœur… Neuf fois sur dix, il n’y a pas de surprise, ça se passe bien, cette personne va vous soutenir.

Jérémy Stravius a mis un terme à sa carrière haut niveau en 2020, avec l’un des plus beaux palmarès de la natation française. Il a remporté l’or olympique en 2012 avec le relais 4×100 mètres nage libre, ainsi que quatre titres de champion du monde, dont celui du 100 mètres dos en 2011. /

Si vous voulez en parler à quelqu’un d’autre, votre premier soutien viendra avec vous, ça vous donnera du poids. J’ai fait ça. Je me suis créé ma petite équipe, petit à petit. J’ai reçu beaucoup de retours, j’ai l’impression que l’émission a aidé beaucoup de personnes, jeunes et moins jeunes, notamment dans des corps de métier où c’est difficile, comme la police.

Propos recueillis pas Gilles Caprais